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CHAPITRE X V.

Des Lettres de Debitis.

LA dénomination qu'on a donnée à ce genre d'im

pétration, annonce de refte ce qu'elle eft. Les créanciers par contrats ou par autres titres, veulent être payés de leurs débiteurs, & leur faire un commandement, même faire procéder à des faifics, en vertu de l'exécution parée qui émane de leur titre, & à cet effet ils impetrent des Lettres de rigueur qu'ils attachent à leur titre, & en vertu defquelles ils font faire des commandemens, & bien fouvent des faifies.

Les articles 164 & 165 de la Coutume de Paris portent, que les obligations paffées fous le fcel Royal ou fous fcel authentique non Royal, font exécutoriables fur les meubles & fur les immeubles du débiteur; mais il faut y attacher des Lettres de Debitis, qu'on appelle de rigueur, pour pouvoir faire des commandemens & des exécutions. Le modele de ces Lettres annonce affez le cas où on doit s'en fervir: nous nous bornons à deux obfervations.

La premiere, que quand les contrats & obligations font paffées dans une Juftice Royale, il faut la permiffion du Juge pour l'exécuter dans un autre, & c'eft pour fe paffer de cette permiffion qu'on prend des Lettres de Debitis, dont on peut fe fervir dans le reffort du même Parlement, car si c'étoit d'un Parlement à l'autre, il faudroit prendre un Paréatis, autrement permiffion d'exécuter dans le reffort.

La feconde, que le débiteur ordinairement forme Opposition au commandement, & introduit à cet

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'égard une inftance devant les Juges qui en doivent connoître, & qui eft fuivie de difcuffion; cès Lettres font adreffées au premier Huiffier ou Sergent requis.

Modele de Lettres de Debitis.

Louis, par la grace de Dieu, &c. Au premier notre Huiffier ou Sergent requis, nous te mandons & commandons par ces préfentes, que toutes & chacunes les fommes qui t'apparoîtront être légitimement dues à notre amé Jofeph. . . . . foit par contrats, obligations, contrats de mariage, testamens, codicilles, promeffes, miffives, livres de raifon comptes arrêtés & autres confeffions des Parties, bons & autres légitimes engagemens, tu les lui fasles payer incontinent & fans délai, en contraignant à ce tous & chacuns fes débiteurs par prise & faisie de leurs biens, vente & délivrance d'iceux à l'encan public, au plus offrant & dernier enchériffeur, même par emprisonnement de leurs perfonnes, fi à ce font obligés, ès cas portés par notre Ordonnance; & en cas d'opposition, refus ou délai, notre main demeurant fuffifamment garnie, affigner les oppofans, refufans ou dilayans pardevant les Juges naturels & compétens des Parties, à qui la connoiffance doit en appartenir, auxquels mandons aux Parties ouïes ou dûment appelées, administrer bonne & brieve justice, de ce faire te donnons pouvoir, car tel eft notre plaifir, les préfentes après l'an non-valables. Donné à...... le....... du mois de....... l'an de grace 17...... & de notre regne le...... Par le Confeil.

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CHAPITRE X VI

Des Lettres en refcifion ou reftitution.

LA matiere que je vai traiter dans ce Chapitre eft

abondante & difficile. Elle exige de la part d'un Commençant l'actention la plus fcrupuleufe, & l'étude la plus férieufe. Quelque clarté que j'aie tâché d'y répandre, la néceffité de me réduire dans un ouvrage élémentaire, m'a fait laiffer beaucoup de chofes de côté. Je ne puis donc affez exhorter la Jeunetfe de recourir en cette matiere à des fources plus abondantes, fi elle veut être parfaitement éclairée.

La refcifion, qu'on appelle également reftitution en entier, eft un bénéfice que les Lois accordent à celui qui a été léfé dans quelque acte qu'il a pailé, par le moyen duquel bénéfice, il peut en Juftice fe faire remettre au même état où il étoit avant d'avoir

confenti l'acte qui contient la léfion, pourvu qu'il vienne dans le temps, qu'il emploie de bons moyens, & qu'il en démontre la juftice.

La refcifion eft un moyen permis & reçu entre majeurs pour attaquer un contrat, ou tel autre acte qui n'a été confenti que par quelque force, violence, crainte ou autre voie illicite, ou dans lequel il eft intervenu du dol, de la fraude, de la léfion ou erreur de fait. Ce font là les caufes ordinaires qui portent à impétrer contre les actes, & qu'on appelle moyens de reftitution.

Ce privilege ne peut être exercé qu'en vertu de Lettres prifes à la Chancellerie près les Parlemens, & la néceffité de prendre ces Lettres pour pouvoir être écouté, eft une véritable néceffité de forme pour

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mettre le Juge à qui elles font adreffées, dans le cas de pouvoir prononcer, comme il eft d'une forme indifpenfable de faire bien connoître fa demande, & prendre des conclusions en matiere ordinaire, pour que le Juge puiffe les accueillir ou en débouter.

Les majeurs & mineurs peuvent ufer de ce bénéfice, pourvu qu'ils viennent dans le temps, comme nous le dirons bientôt.

On l'accorde aux majeurs contre le contrat de vente qu'ils ont confenti de leurs immeubles; mais il faut qu'ils foient léfés de plus de la moitié du jufte prix de l'effet vendu; la validité du moyen qu'ils prennent à cet égard, dépend toujours de l'eftimation que le Juge ordonne être faite du bien vendu par Experts accordés ou pris d'office, lefquels font tenus d'eftimer les biens ce qu'ils valoient à l'époque de la vente qui en a été confentie, & par là on voit fi la léfion y eft ou n'y eft pas.

Par exemple, le bien a été vendu 4000 livres; la vente a été attaquée par léfion; le Juge ordonne une estimation par Experts qui n'eftiment le bien à l'époque de la vente qu'à 8000 liv. : alors il n'y aura point de léfion fuffifante pour opérer la refcifion de l'acte. Pourquoi? Parce qu'il faut entre majeurs, que la léfion excede la moitié du jufte prix. Or, le jufte prix étant 8000 liv., & le bien ayant été vendu 4000 liv., qui eft la moitié du jufte prix, s'il faut que la léfion excede cette moitié, il ne peut y avoir lieu à la refcifion puifque ce n'eft que de 4000 liv. que le vendeur a été léfé, & qu'il n'y a pas d'excès.

Mais fuppofons que les Experts euffent eftimé le bien 8100 livres; alors il y auroit léfion. Pourquoi ? Parce qu'elle feroit opérée par les 100 liv. d'excès fur les 40 00 liv., qui font la moitié du jufte prix.

On les y admet encore, quand il y a léfion dans un partage qu'ils ont fait; & alors, pour opérer la

refcifion de ce partage, ils n'ont befoin que de juftifier d'une léfion du tiers au quart du prix.

On les y admet contre beaucoup d'autres contrats & actes, comme le dit le Droit Romain, ex pluribus caufis majores reftituuntur, & ces caufes font, par exemple, lorfqu'ils attaquent des contrats lors defquels ils ont été trompés & circonvenus par dol & fraude; lorfqu'ils les ont confentis, ou in vinculis, ou par force, violence, ou crainte, ou enfin lorfqu'ils contiennent des erreurs de fait. Voilà en général les caufes qui peuvent occafionner de la part des majeurs des demandes en reftitution.

Quant aux mineurs, ceux-ci font bien plus favorables, quoique la Loi dife que ce n'eft que comme léfés qu'on les écoute. Minor enim non tanquàm minor, fed tanquàm læfus reftituitur, puisque quand ils attaquent les actes, & qu'ils fe plaignent de léfion, la moindre les fait admettre à la reftitution, ex minima caufa læfionis minor reftituitur. Cette différence eft grande.

Auffi font-ils reftituables, lorfqu'ils le demandent, tam de damno vitando, quàm de lucro captando. Par exemple, un mineur avoit un choix à faire; en prenant un tel lot il auroit fait un profit, & il ne l'a point pris. Il auroit eu de l'avantage à accepter une telle fucceffion qu'il avoit cru d'abord lui être onéreufe, & cependant il y a renoncé. Dans ce cas, & dans tant d'autres où il aura négligé fon avantage réel, il fe fera relever de fon choix, de fa renonciation. Lege 7, §. 6 & 7, ff. de Minor.

Il fera plus, car s'il s'eft fait reftituer, il fera encore reçu pendant fa minorité à revenir contre cette reftitution. In integrum reftitutio ambulat, ità ut detur reftitutio adverfùs reftitutionem.

Par l'ancien Droit, le mineur étoit obligé, lorf qu'il vouloit attaquer un acte, d'impétrer des Lettres en refcifion ou reftitution dans l'an après fa majorité

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