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à Mantoue. Il étoit entré dans le chapitre pour AN. 1234. travailler à la réformation de ce monaftere, dont le fiege étoit vacant: quand les meur triers fe jetterent fur lui, lui porterent d'abord des coups d'épée dans le vifage, lui couperent les deux mains qu'il avoit mifes en croix & le déchirerent de plus de quarante plaïes. Au bruit de ce meurtre dont toute la ville s'émut, le podefta ne fe donna pas grand mouvement, ce qui le rendit fufpect ; & on crur qu'il avoit favorise la fuite des meurtriers. Mais le peuple s'éleva contre eux; & ne les trouvant plus il abattit leurs maifons & leurs tours. Ils fe retirerent à Verone près d'Ecelin, qui étoit le refuge de tous les méchans.

3. C. 77.

Le pape aïant donc appris cette trifte nouvel le, affembla les cardinaux & les autres prélats qui fe trouverent auprès de lui; & de leur avis il déclara excommunié les auteurs & les complices du crime, & les lieux où ils iroient in . Gemma terdits. Ajoûtant qu'ils ne pourroient être abanima lib. fous que par le faint fiege, & que leur peni tence feroit d'aller outre-mer à pied portant le bâton de penitens, & y paffer le refte de leur vie en vifitant les faints lieux. C'est ce que Ic pape rapporte dans la lettre qu'il écrivit fur ce fujet au podefta, au confeil & au peuple de Mantoue, où il ajoûte; Nous vous enjoignons de bannir les coupables de votre ville, du dio cefe & du diftrict, avec confifcation de leurs biens, & d'obliger vos magiftrats à l'obfervation de cet ordre: autrement votre ville auroit fujet de craindre d'être privée de la dignité épilcopale. La lettre eft du cinquième de Juin 1235. Et tels étoient les funeftes effets de la divifion des peuples de Lombardie.

1.

En même temps le pape travailloit à appaiser la croifa les troubles de Palestine, & à y relever l'auto

Préparatifs

rité

tité de l'empereur Frideric. Il exhorta donc les
Hofpitaliers, les Templiers & les chevaliers Teu- AN. 1235.
toniques à s'opposer aux deffeins de Jean d'Ibelin ibid. n. 41.
feigneur de Barut & des bourgeois d'Acre, qui
s'étoient joints à lui, s'ils entreprenoient le fiege
de Tyr ou de quelque autre place du roïaume de
Jerufalem; & il écrivit à Jean d'Ibelin lui-mê-
me pour le détourner de ce deffein, attendu,
dit-il, que les interêts de l'empereur Frideric ix. ep. 1716
font les nôtres, en confideration des grands fer- ibid.
vices qu'il a rendus à l'églife. La lettre est du
vingt-huitiéme de Juillet. Thierri archevêque de
Ravenne & légat en Paleftine avoit foûtenu vi-
goureufement les droits de l'empereur & de Con-
rad fon fecond fils, heritier par fa mere du roïau-
me de Jerufalem, & comme les bourgeois d'Acre epif. 230.
ne youloient pas fe foumettre à son jugement, il ibid. 43.

avoit mis la ville en interdit: mais le pape
confidera
que cette ville étoit habitée par des
chrétiens de divers rites, qui à l'occafion de
cette cenfure fe pourroient retirer de l'obéïffan-
ce de l'églife Romaine & donner lieu à l'herefie. #. 44.
C'est pourquoi il leva l'interdit, aïant reçû
caution du peuple d'Acre d'obéir à fes ordres, &
ferendit leur médiateur envers l'empereur. D'ail--
leurs il exhorta ce prince à s'accommoder avec
le roi de Chipre, ou du moins à faire une

Στένε.

Ce fut dans le même deffein de faciliter la croifade, que le pape reçut favorablement l'en

woïé d'Aladin fultan d'Icone. C'étoit le chef Bibl.Orient. de la branche des Turcs Seljouquides qui regnoit P.240. 807. en Natolie, & il fe nommoit proprement Alaeddin Caïcobad. Comme il faifoit la guerre aux fultans de Syrie & d'Egypte de la famille de Saladin, il cherchoit à exciter contre eux les chrétiens Francs, & regardoit le pape comme leur calife. Il lui envoïa donc un chrétien fou Tome XVI

H

Epift. ap.

fujet nommé Jean Gabra, qui dit au pape que AN. 1235. le fultan defiroit l'avoir pour ami, comme il avoit déja l'empereur Frideric, & qu'il étoit prêt Rain. 1235. de les aider pour le recouvrement de Jerufalem: . 37. 38. le priant de lui envoïer un nonce. Le pape promi c. Aboul. de lui en envoïer au plûtôt par la lettre du vingtiefar. p. 312. me de Mars 1235. mais Aladin mourut l'année fuivante 1236. 634. de l'hégire, après avoir regné dix-huit ans.

rx. p. 735. ap. Rain.

n. 46.

Outre les lettres que le pape avoit envoïées l'année precedente pour exciter les peuples à la croifade, il en envoïa encore cette année de très-preffantes: comme il fe voit par celle qu'il adreffa à l'archevêque de Reims & à fes fuffra

gans,

ans,

entrete

où il applique à la croifade ces paroles de JESUS-CHRIST: Qui veut venir après moi, qu'il renonce à foi-même, qu'il prenne fa croix & me fuive, & dit que ceux qui ne travaillent pas de toutes leurs forces à retirer fon heritage de la puiffance des infideles, feront coupables de I trahifon envers lui. Il conclut en difant, que par le confeil des cardinaux il a donné les or dres pour avoir des troupes qui foûtiennent cette guerre au moins pendant dix nuës par les aumônes des fideles ; & il compa re ces aumônes aux collectes que faint Paul faifoit pour les pauvres de Jerufalem. C'eft pourquoi il ordonne que tous les fideles de l'un & de l'autre fexe de quelque condition qu'ils foient, contribuent par femaine au moins un denier chacun, pour être emploïé aux frais de cette guerre, par les mains de ceux qui feront choi is pour cet effet. Ainfi tout ce difcours fi pathetique aboutit à une levée de deniers. La let tre eft dattée de Peroufe le vingt-huitiéme de Juin 1235.

La prédication de cette croifade fe faifoit principalement par les freres Prêcheurs & les

feres Mineurs, & il eft vrai-femblable que dans leurs fermons ils employoient les mêmes motifs AN. 12359 & les mêmes autoritez que le pape dans les bulles. Ils avoient le pouvoir non feulement de donper la croix, mais de commuer le vœu en aumône pecuniaire; & d'accorder des indulgences de plufieurs jours à ceux qui entendoient leurs fermons. Or nonobftant l'humilité de leur profeffon, pour foûtenir la dignité de miffionnaires du pape, ils fe faifoient recevoir folemnellement dans les monafteres & dans les villes. Il falloit venir au devant d'eux en proceffion avec les bannieres, le luminaire & les plus beaux ornemens. En peu de temps les agens du pape amafferent à l'occafion de la croifade, de grandes fommes d'argent, dont on ne voïoit point l'emploi: ce qui refroidit beaucoup la devotion du peuple pour cette entreprise. C'est ce que Mathieu Paris té- an.1234.) moigne de l'Angleterre,par où l'on peut juger des 339.

autres pays.

LI.

Concile de

Les freres Prêcheurs étoient chargez en même temps de l'inquifition contre les heretiques Narbonne. en Languedoc & dans les provinces voifines, Inquifition. avec ordre aux évêques de les aider de leurs confeils, comme ils firent. Car les trois archevê- t.xi.p.487. Spond. conques Pierre de Narbonne, Jean d'Arles & Rai- tin. 1223, mond d'Aix avec plufieurs autres prélats étant ». 2. concile à Narbonne l'an 1235. &

aflemblez en

confultez

fer aux

par ces religieux fur divers doutes,

leur envoyerent un grand reglement de vingt-
neuf articles, dont voici la fubftance. Telle eft cap. s
la penitence que nous vous confeillons d'impo-
heretiques & à leurs fauteurs, que vous
de la prifon, pour être venus
d'eux-mêmes dans le temps marqué, & vous avoir
déclaré la verité, tant contre eux que contre les
autres. Ils viendront à l'églife tous les dimanches
portant des croix fur leurs habits, & fe presen-

aurez

exemptez

teront au curé entre l'épitre & l'évangile, teAN. 1235. nant à la main des verges dont ils recevront la difcipline; & en feront de même dans toutes les proceffions. Les premiers dimanches du mois ils vifiteront les verges à la main, toutes les maifons de la ville où ils ont autrefois vû des heretiques. Ils affifteront tous les dimanches à la c. 2. messe, aux vêpres & au fermon. Ils porteront les armes à leurs dépens pour la défenfe de la foi & de l'églife, contre les Sarrafins, les heretiques, ou d'autres rebelles pendant un certain temps, felon qu'il leur fera commandé par le pape: mais on ne leur enjoindra plus pour penitence le yoyage d'outremer, de peur qu'ils ne s'y raf c. 5. 7. femblent pour pervertir les catholiques. Les inquifiteurs pourront ajoûter à ces penitences ou les diminuer felon les circonftances particulieres, & les curez obferveront fi les penitens les accompliffent.

c. 4. 2.

Les heretiques qui ne font pas venus fe dénoncer dans le temps de grace, ou fe font rendus de quelque autre maniere indignes de l'indulgence, & qui toutefois fe foûmettent à l'églife, doivent être enfermez pour toujours: mais comme le nombre en eft fi grand qu'il eft impoffible de leur bâtir des prifons, yous pourrez ferer de les enfermer jufques à ce que le pape en 10.11.12. foit mieux informé. Quant aux rebelles qui re

5.14.15.16.

dif

fufent d'obéir, foit pour entrer en prifon ou y demeurer, ou pour accomplir quelque autre penitence vous les abandonnerez au juge seculier, fans les écouter davantage, & vous traiterez de même les relaps qui feront retombez après leur abjuration. C'eft affez qu'ils ayent trompé une fois l'églife.

On reputè fauteurs ceux qui favorisent les heretiques, les cachant, ne les découvrant pas, empêchant qu'on ne les puniffe, qu'on ne les ar

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