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maine. Ainfi la dépofition de Frideric II. ne doit point être tirée à `conféquence contre les autres AN. 1245fouverains: outre que la puiffance ecclefiaftique

en general ne s'étend point fur les chofes tempo- 3. Difcours. relles, comme je l'ai montré ailleurs.

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22. II.

Matth. Par

p. 593.

Le pape aïant déclaré l'empire vacant, décla- XXX. ra auffi les princes d'Allemagne qui étoient Suites de la alors reconnus pour électeurs: fçavoir les laï- dépofition ques, les ducs d'Autriche, de Baviere, de Sa- de Frideric. xe & de Brabant, c'est-à-dire de Louvain: les prélats, les archevêques de Cologne, de Mayence & de Salsbourg. Ils devoient s'affembler feuls dans une ifle du Rhin, fans qu'il fut permis à perfonne d'en approcher jufques à ce qu'ils fe fuffent accordez pour l'élection. Le pape leur écrivit, les priant inftamment d'élire un autre empereur, leur promettant fon fecours & celui de toute l'églife, & les affurant d'abord de quinze mille marcs d'argent: mais ces princes furent quelque-temps retenus par l'oppofition de Frideric, principalement le duc d'Autriche fon

allié.

dit:

L'empereur apprenant la nouvelle de fa dé- Matth. Para pofition fut tranfporté de colere, & dit en re- p. 195. gardant de travers les affiftans: Ce pape m'a déposé dans fon concile & m'a oté ma couronne: d'où lui vient cette audace? Qu'on m'apporte mes caffettes. Et quand on les cut ouvertes, il Voyez fi mes couronnes font perduës., Il en mit une fur fa tête, puis fe redreffa, & avec des yeux menaçans & une voix terrible, il dit: Je n'ai pas encore perdu ma couronne, & le pape, ni le concile ne me l'ôteront pas fans qu'il y ait du fang repandu. Un homme du commun aura l'infolence de me faire tomber de la dignité imperiale, moi qui n'ai point d'égal entre les princes. Ma condition toutefois en devient meilleure: j'étois obligé de lui obéir en quelque

chofe, ou du moins de le refpecter: maintenan AN. 1245. je ne lui dois plus rien. Et deflors il s'appliqua plus fortement à faire tout le mal qu'il pourroit

au pape,en fes biens,en fes parens & en fes amis. Il Mon, Pa- étoit à Turin quand il apprit fa dépofition; & duan. an. d'abord il retourna à Cremone, où il regla les af1245. p. faires de l'empire: puis il paffa en diligence dans la Pouille, & envoya promptement fon fils Conrad en Allemagne.

591.

Petr.devin.
Tib. 1. ep. 2.
Matth. Par. pape

596.

Pour détourner les princes de l'obéïfsance du & fe les rendre favorables, il leur écrivit deux lettres. Dans la premiere il les exhorta à profiter de fon exemple, & dit: Que ne devez-vous point craindre d'un tel pape chacun en particulier, s'il entreprend de me dépofer, moi qui fuis couronné empereur de la part de Dieu par l'élection folemnelle des princes & l'approbation de toute l'églife, & qui gouverne tant d'autres grands royaumes? Lui qui n'a droit d'exercer aucune rigueur contre nous, quant au tempo rel, fuppofé même qu'il y en eût des caufes legitimes & bien prouvées. Mais je ne fuis pas le premier que le clergé a ainfi attaqué, abusant de fa puiffance, & je ne ferai pas le dernier. Vous en êtes cause obéiffant à ces hypocrites, dont l'ambition eft fans bornes. Si vous vouliez y faire attention, combien découvririez-vous dans la cour de Rome d'infamies que la pudeur ne permet pas même de reciter? Ce font les grands revenus dont il fe font enrichis aux dépens de plufieurs royaumes qui les rendent infenfez: quelle recompenfe, quelle marque de reconnoiffance vous donnent-ils, pour les dîmes & les aumônes dont vous les nourriffez? Et enfuite: Ne croïez pas que je fois abbatu par la fentence du pape: la pureté de ma confcience, dont Dieu m'eft témoin, m'affure qu'il eft avec moi. Mon intention a toûjours été de réduire

es ecclefiaftiques, principalement les plus grands, à l'état où ils étoient dans la primitive eglife, AN. 1245menant une vie apoftolique & imitant l'humilité de notre-Seigneur. Ils voïoient les anges, ils guériffoient des malades, reffufcitoient des morts, & foûmettoient les rois & les princes, non par les armes, mais par leur vertu. Ceux-ci livrez au fiecle, enyvrez de délices, méprisent Dieu; & l'excès de leurs richeffes étouffe en eux toute religion. C'eft donc une œuvre de charité de leur ôter ces richeffes pernicieufes qui les accablent; & c'eft à quoi vous devez travailler tous avec moi.

XXXI.

Lettre de

Frideric à

p. 614.

v. Rain.

L'autre lettre de l'empereur Frideric eft adreffée au roi faint Louis, & tend principalement à montrer les nullitez de la fentence du pape. 5. Louis. La premiere eft l'incompetence du juge. Car, Petr. de dit-il, encore que fuivant la foi catholique nous vin. 1. ep. reconnoiffions que Dieu a donné au pape La ple- 3. nitude de puiffance en matiere fpirituelle: on Matth. Par. ne trouve toutefois écrit nulle part, qu'aucune loi divine, ou humaine lui ait accordé le pou- 1246.1.21. voir de transferer l'empire à fon gré, ou de ju- . ger les rois & les princes pour le temporel, & les punir par la privation de leurs états. Il eft vrai que par le droit & la coûtume il lui appartient de nous facrer: mais il ne lui appartient pas plus pour cela de nous dépofer qu'aux prélats des autres roïaumes qui facrent leurs rois.

Il vient enfuite aux vices de la procedure. Il n'a procedé contre nous, dit-il, ni par accufation, ni par dénonciation, ni par inquifition: mais fur une prétendue notorieté > que nous nions; & qui ferviroit à tout juge de prétexte pour condamner qui il voudroit fans ordre judiciaire. On dit que quelques témoins en trèspetit nombre fe font élevez contre nous dans le soncile: dont l'un fçavoir l'évêque de Calvi,

étoit irrité parce que nous avons fait pendre juftement fon frere & fon neveu convaincus de trahifon. D'autres comme l'archevêque de Tarragone & celui de Compostelle venus de l'extrémité de l'Espagne, & nullement inftruits des affaires d'Italie, ont été faciles à fuborner. Mais quand il y auroit eu un accufateur & des témoins, il falloit encore que l'accufé fût present ou contumacé dans les formes. Nous n'avions point été cité valablement & nous avons envoïé des proeureurs propofer les caufes de notre abfence, qu'on n'a point voulu écouter. Or il eft clair, que nous n'étions pourfuivi que civilement & non criminellement: puifque la citation même portoit, que nous comparoîtrions en perfonne, ou par procureur. Suppofé même la coutumace, elle ne doit pas être punie par un jugement définitif, qui condamne fans connoiffance de caufe. La forme de prononciation montre encore la nullité de la fentence: puifque ce n'eft pas notre procureur prefent qui eft condamné, mais nous abfent..

comme le

Nous montrons au fonds l'injuftice de la fentence par des monumens publics, porteur des prefentes l'expliquera en détail. On voit la précipitation de la fentence en ce que le pape n'a pas voulu attendre feulement trois jours l'évêque de Frifingue, le maître de l'or dre Teutonique & Pierre des Vignes, que nous. avions envoïez au concile en dernier lieu, pour

conclure le traité de paix. Enfin la qualité de la peine fait voir l'animofité & la vanité du ju ge. Il condamne pour crime de leze-majefté l'empereur Romain, il foûmet à la loi celui qui par fa dignité eft affranchi des loix, que Dieu feul peut punir de peines temporelles, puifqu'il n'a aucun homme au-deffus de lui. Quant aux peines fpirituelles, c'eft-à-dire, des

nitences pour nos pechez, nous les recevons ec refpect & les obfervons fidelement quand AN. 1246.e les nous font impofées, non feulement par le ape que nous reconnoiffons au fpirituel pour noe pere & notre maître, mais encore par quelque rêtre que ce foit. Ce qui fait voir manifeftement avec quelle juftice on veut nous rendre afpect touchant la foi, que nous croyons ferement & profeffons fimplement, Dieu en eft téoin, fuivant l'approbation de l'églife catholiue & Romaine.

Confiderez donc fi nous devons obéir à cete fentence fi préjudiciable, non feulement à nous, mais à tous les rois, les princes & les eigneurs temporels: donnée fans la participaion d'aucun des princes d'Allemagne, de qui dépend notre élection & notre deftitution. Confiderez les fuites de cette entreprife. On commence par nous, mais on finira par vous; & on fe vante publiquement qu'on n'a plus aucune refiftance à craindre, après avoir abattu notre puissance. Défendez donc vôtre droit avec le notre, & pourvoïez dès à prefent à l'interêt de vos fucceffeurs. Loin de favorifer notre adverfaire publiquement ou fecretement, ni fès légats ou fes nonces refiftez-lui courageufement de pouvoir & ne recevez dans vos terres aucun de fes émissaires qui prétende foulever vos fujets contre nous. Et foyez affurez qu'avec le fecours du roi des rois qui protege toûjours la juftice, nous nous oppoferons de telle forte à ces commencemens, que vous n'aurez pas fujet d'en craindre les fuites. Dieu demandera compte de ce trouble; qui met en péril toute la chrétienté, à celui qui en fournit la matiere. Cette lettre eft dattée de Turin le dernier jour de Juil let 1245. Elle fut envoyée au roi d'Angleterre, & apparemment à d'autres princes.

tout votre

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