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ceffer alors, quiconque oferoit commencer ou réprendre fes leçons, feroit exclu à jamais du AN. 1254. corps de l'univerfité. Ce reglement fut fait au mois d'Avril. Enfin Alphonfe comte de Poitiers regent en l'absence du roi fon frere fit faire juftice de ceux qui avoient maltraité les écoliers: deux furent traînez par les rues & pendus, les autres bannis.

L'affaire eft reprife de plus loin & expliquée. plus au long dans une lettre que l'univerfité écrivit l'année fuivante à tous les prélats, & qui porte en fubftance: Les freres Prêcheurs étant venus Dubon. pl à Paris en petit nombre, & vivant fous une ap- 255. parence de pieté & d'utilité publique, font entrezavec nous dans l'étude de la théologie avec ferveur & modeftie: c'eft pourquoi nous les avons reçus avec une charité fincere, & leur avons donné une maison qui nous appartenoit & où

iis demeurent encore à prefent. Ainfi profitant Sup. Ins de nos bienfaits ils fe font tellement multipliez, LXXV111. qu'ils ont maintenant plufieurs colleges par tout le monde. Ils avoient commencé par l'humilité, mais touchez de l'ambition d'être docteurs, ils voulurent profiter de la difgrace qui arriva à l'école de Paris, & qui en fir transferer à Angers la plus grande partie. Ils parlent de la querelle qui furvint entre les écoliers & les bourgeois en 1229. En cette rareté d'étudians qui étoient Sup. līd demeurez à Paris, & en l'absence des docteurs, LXXIX les freres Prêcheurs obtinrent de l'évêque & du chancelier une chaire de profeffeur. Ils la confere verent après que l'univerfité fut rétablie à Paris & y en érigerent d'eux-mêmes une feconde, par la facilité que nous eûmes à le fouffrir, n'étant point encore refferrez par d'autres colleges des reguliers.

Dans la fuite du temps, nous avons confideré,, qu'ils le trouve à Paris fix colleges de religieux

fçavoir de Clairvaux, de Prémontré, du Val des AN. 124. Ecoliers, des Trinitaires, des freres Prêcheurs & des freres Mineurs: outre les autres reguliers qui viennent étudier à Paris fans y avoir de colleges i que quelques-uns font parvenus à la chaire doc torale & que d'autres y afpirent. De plus les chanoines de l'églife de Paris dont trois font chez nous regens en theologie,ont accoûtumé de mul, g. 256. tiplier le nombre felon qu'ils ont des fujets. Enfin par rapport à l'état de la ville & au regle ment donné par le. faint fiége, à peine pouvonsnous entretenir honnêtement douze chaires dans la faculté de theologie tant à cause du petit nombre de ceux qui l'étudient chez nous, qu'à cause que les freres Prêcheurs & d'autres l'enfei-gnent en d'autres lieux.

Ainfi de ces douze chaires neuf étant occupées fans retour par les reguliers, il n'en restera que deux ou trois pour les feculiers qui viennent de tous les pays du monde étudier à Paris. Et fi les autres colleges vouloient auffi doubler leurs chaires comme les freres Prêcheurs, tous les étu dians feculiers feroient à jamais exclus des chai res de theologie, & nous ferions contraints d'ar bandonner la ville de Paris, où nous nous fom mes accommodez à grands frais depuis long-tems, pour aller en d'autres lieux moins commodes, Qu nous appliquer tous aux fciences feculieres; quoique la theologie foit plus neceffaire aux clercs feculiers,qui font appellez au foin des ames & au gouvernement des églifes, qu'aux reguliers que l'on en charge plus rarement. Par ces confi derations nous avons ordonné, après meure déliberation, qu'aucun convent de reguliers ne puiffe avoir dans notre corps deux chaires de docteurs regentans enfemble fans que nous prétendions les empêcher de faire autant de le Cons à leurs confreres qu'ils le jugeront à propos,› tà

:

Or les freres Prêcheurs s'oppofent de toutes leurs forces à ce ftatut.

AN. 1254

Après le défordre arrivé le carême paffé, nous promimes tous d'en pourfuivre la réparation, excepté les freres Prêcheurs qui régentoient alors, & ils refuferent d'entrer dans cet engagement, fi nous ne leur accordions les deux chaires de theologie à perpetuité. Ce que nous ne pûmes leur accorder ; & il n'étoit pas alors queftion de leurs écoles, ni des nôtres, mais de la réparation de l'injure que nous avions reçuë. Leur ré-, fiftance fut caufe que cette réparation fut retardée pendant fept femaines, & nos leçons interrompuës autant de temps. Cependant pour prévenir une pareille révolte de la part des autres docteurs, nous fimes encore un ftatut, portant qu'aucun ne feroit admis au doctorat, qu'il ne jurat auparavant d'obferver nos conftitutions. p. 257 Les freres Prêcheurs refuferent encore d'y confentir, fi nous ne leur accordions les deux écoles, & nous en vertu d'une conftitution du pape, qui nous en donnoit le pouvoir, les déclarâmes excommuniez & féparez de notre corps: ce que nous fimes publier felon notre ufage par toutes les écoles.

Alors les freres Prêcheurs oubliant leur ancienne humilité & nos bienfaits, commencerent à nous diffamer & à nous traiter de perfécuteurs de la pieté & de tous les religieux, & nous accuferent devant le comte de Poitiers & les grands de fa cour, d'avoir fait des ftatuts contre Dieu & l'églife univerfelle, & des confpirations contre l'honneur du roi & le bien du roïaume. Puis s'adreffant au pape & aux cardinaux fans qu'il y eût perfonne de notre part, ils ont obtenu par leurs menfonges & leurs calomnies, une commiffion au vénérable évêque d'Evreux, pour nous exhorter à les recevoir dans

notre corps fauf nos ftatuts fuldits: jufquesă ceAN. 1254. que le pape mieux informé, en ordonnát autrement; pour l'execution de ce refcrit ils ont fait fubdeleguer par le même évêque maître Luc chanoine de Paris: qui fans nous appeller en jugement ni entendre nos défenfes, fans avoir égard à notre appel, en vertu d'un fecond refcrit du pape à lui adreffé, a fufpendu de leurs fonctions tous les docteurs en theologie, en droit, & en médecine, & tous leurs écoliers ; & fait publier cette fufpenfe dans toutes les paroiffes de Paris au grand fcandale des laïques.

Or comme nous faifions publier une feconde fois par toutes les écoles notre decret de feparation, à caufe des nouveaux écoliers qui furviennent de jour en jour : nos bedeaux vinrent à l'école des freres Prêcheurs, & un d'eux commença à lire le decret. Mais les freres qui étoient là en grand nombre, fe jetterent fur les bedeaux. avec de grands cris, & les aïant chargez d'injures, arracherent le papier des mains de celui qui le lifoit, & en frapperent un, jufques à effufion de fang. Le recteur y vint lui-même avec trois maîtres ès arts: mais il ne fur pas mieux reçu, & s'en retourna fans rien faire. De plus ils ont extorqué de maître Luc une lettre, contenant que quelques-uns de nos docteurs & de nos écoliers, jufques au nombre de quaran te, avoient confenti en fa prefence à les admet tre dans notre corps. Mais cette lettre aiant été lue publiquement devant nous, ceux qui y ont été nommez ont nié le fait : enforte que mattre Luc honteux de l'avoir donnée en a lui-même rompu le fceau, & donné une lettre où il affure le contraire. Nous les gardons toutes deux. Crai gnant donc que les freres Prêcheurs qui font répandus dans toutes les églifes, ne déguifent la verité des faits pour juftifier leurs freres da

Paris, nous avons cru vous en devoir inftruire, afin que voyant les conféquences de leurs entre- AN. 1254" prifes, vous y apportiez le remede convenable: autrement il eft à craindre que l'école de Paris, qui eft le fondement de l'églife, étant ébranlée, l'édifice même ne foit en danger de tomber. La lettre eft dattée de faint Julien le pauvre où elle fut luë en l'assemblée des docteurs le mercredi après la Purification l'an 1253. c'est-à-dire le quatrième de Février 1254. Je n'ai point encore vu ailleurs que l'école de Paris fût le fondement de l'églife.

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Guilt. S.

Matth. Par.

p. 806.

La même année on commença à expliquer publiquement à Paris un livre intitulé l'évangile Amour p. éternel attribué à Jean de Parme, qui étoit alors 38.39.500. general des freres Mineurs. Ce livre étoit fondé fur la doctrine de l'abbé Joachim & contehoit plufieurs erreurs. O y lifoit que l'évangile de JESUS-CHRIST devoit finir l'an 1260. pour faire place à l'évangile éternel autant fuperieur à celui de JESUS-CHRIST que le foleil eft plus parfait que la lane: que c'est l'évangile du Saint-Efprit, qui preferira une autre maniere de vivre, & difpofera autrement l'églife. Or les docteurs de Paris rejettoient la haine de cette doctrine fur les Jacobins comme fur les Cordeliers, & entre ces docteurs le plus ardent à les attaquer étoit Guillaume de faint Amour: qui fe plaignoit hautement que les nouveaux religieux abufoient de leurs privileges, & troubloient l'ordre de la hierarchie.

LV.

Bulle con

tre les en

Le pape Innocent ayant donc reçu plufieurs plaintes femblables donna une bulle adreffée à treprises des tous les religieux de quelque ordre qu'ils foient, reguliers. où après avoir rapporté les réproches des prélats Bulla Etfi & du clergé feculier contre eux, il dit: Confidepraf.S.Am. rant donc que ces entreprises produisent dans le p. 74. peuple le mépris de leurs pafteurs, & ôtent la Duboulai

animar.

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