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LXI.

Theodore.

Id. n. 74.

maine, il ne lui convient pas d'y prendre part. Ne faites plus prêcher la croifade, puifque Dieu AN. 1259, a cu pitié de fon église en la délivrant d'Ecelin; & pour le rachat des vœux nous y pourvoirons. La lettre eft du treiziéme de Decembre 1259. Cette même année Mainfroi envoïa du fecours à Michel defpote d'Epire dont il avoit Mort de épɔusé la fille, contre Michel Paleologue empe- Michel Pareur de C. P. L'empereur Theodore Lafcaris fut leologue attaqué d'une maladie à laquelle les médecins ne empereur. trouvoient point de remede. Il crut être enfor- Acropol. celé, & fur le moindre foupçon il faifoit arrê- 2. 81. ter ceux qui étoient dénoncez, fans qu'il y eût Pach. lib. d'autre moïen de fe juftifier que par l'épreuve 111. c. 12. du fer chaud : car cette fuperftition duroit encore chez les Grecs. Theodore fe voïant à la mort se Gregoras revêtit de l'habit monaftique, & aïant fait venir lib. 111.6.2. l'archevêque de Mitylene, il lui fit fa confeffion, ". 6. & fe profternant à fes pieds, il arrofa la terre de fes larmes, criant plufieurs fois : JESUS-CHRIST, je vous ai abandonné, & diftribua de fa main de grandes aumônes. Il mourut ainfi dans fa trente fixième année n'aïant pas encore achevé la quatriéme de fon regne, qui avoit commencé au mois de Novembre 1254. & finie au mois d'Août 1258. Il laissa un fils nommé Jean qui n'avoit Maxr. Dapas encore huit ans, & par fon teftament il avoit vid, animad déclaré régent de l'empire le protovestiaire Geor- in Possin, Muzalon. Mais comme c'étoit un homme de fortune, les grands s'éleverent contre lui, & il fut maffacré le neuvième jour après la mort de l'empereur Theodore dans l'églife même où l'on faifoit fes funerailles.

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On jetta enfuite les yeux fur Michel Paleologue, qui prenoit auffi le nom de Comnene à caufe de fon aïeule & Arfene patriarche de C. P. nommé tuteur du jeune prince avec Muzalon fe laiffa perfuader de lui donner la régence.

Greg. lib.

IV. C. 1.

Астор. к.

77. Pach,

Lib. 11.

Ce prélat avoit plus de pieté que de politique, & AN. 1259. après avoir tenu plufieurs confeils avec les principaux évêques & les grands de l'empire, il confentit à donner le gouvernement des affaires à Michel Paleologue pendant le bas âge du jeune empereur Jean Lascaris, avec le titre de defpote.Mais bien-tôt après les grands de l'empire éleverent Paleologue fur un bouclier, & le proclamerent empereur à Magnefie. Le patriarche Arfene. qui étoit alors à Nicée en fut penetré de douleur, craignant pour le jeune prince, & penfa d'abord excommunier Paleologue & ceux qui l'avoient élû: mais il se retint & crut qu'il valoit mieux les engager par les fermens les plus terribles à ne point attenter fur la vie de cet enfant & ne lui faire aucun mal. C'étoit au commencement de Decembre ; & avant qu'un mois fût passé, c'eftà-dire le premier de Janvier 1259. le patriarche même couronna devant l'autel à Nicée Michel Paleologue.comme empereur, mais seulement pour un temps jufques à ce que Jéan Lascaris fût venu en âge de gouverner: & à la charge de quitter alors de lui-même le trône & toutes les marques de l'empire, ce qu'il lui fit promettre par des fermens encore plus grands que les precedens.

. LXII.

en Italie.

p. 612.

Il s'éleva cependant en Italie un mouvement: Flagellans de dévotion fans exemple jusques alors. Il comMon. Fad, mença à Perouse, paffa à Rome, puis dans le. refte du païs. Les nobles & le peuple, les vieillards & les jeunes gens jufques aux enfans de cinq ans, touchez de la crainte de Dieu, pour les crimes dont l'Italie étoit inondée, alloient dans les villes par les ruës tout nuds hors ce que la pudeur oblige absolument de cacher. Ils marchoient deux à deux en proceffion tenant à la main chacun un foüet de courroïes, & avec beaucoup de gemiffemens & de larmes fe fra

poient fi rudement fur les épaules, qu'ils fe mettoient tout en faing, implorant la mifericorde de AN. 1259. Dieu & le fecours de la fainte Vierge. Ils marchoient même la nuit tenant des cierges allumez & par un hyver très-rude: on en voyoit des centaines, des milliers & jufqu'à dix mille précedez par des prêtres avec les croix & les bannieres; ils. accouroient aux églifes & fe profternoient devant les autels. Ils en faifoient de même dans les. bourgs & les villages, enforte que les montagnes. & les plaines rétentiffoient de leurs cris..

On n'entendoit plus que ces triftes voix au lieu des inftrumens de mufique & des chanfons amoureuses. Les femmes jufques aux plus grandes dames & aux filles les plus délicates, prirent part à cette devotion, & enfermées dans leurs chambres fuivant l'ufage du pays,elles en ufoient de même gardant la modeftie convenable. Alors. la plupart des ennemis fe reconcilierent : les ufuriers & les voleurs s'empreffoient de reftituer les biens mal acquis: tous les autres pe cheurs confeffoient leurs crimes & s'en corrigeoient. On ouvroit les prifons, on délivroit les captifs, on rappelloit les exilez on faifoit autant de bonnes œuvres que fi l'on eût craint de voir tomber le feu du ciel, la terre s'ouvrir ou quelque autre effet femblable de la juftice divine. Ce mouvement fi fubit de penitence donnoit à penfer aux plus fages, qui ne voyoient point d'où il pouvoit venir. Le pape qui étoit toûjours à Anagni ne l'avoit point ordonné, ce n'étoit ni l'éloquence d'aucun predicateur, ni l'autorité d'aucune perfonne qui l'eût excité : les fimples avoient commèncé, & les autres les avoient fuivis.

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Cette penitence s'étendit en Allemagne, puis en Pologne & en plufieurs autres pays. Les penitens marchoient nuds de la ceinture en haut,

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la tête & le vifage couverts pour n'être pas reAN. 1259. Cǝnnus: depuis la ceinture ils avoient un vêtement qui defcendoit jufques aux pieds. Ils se flagelloient deux fois le jour pendant trente-trois jours en l'honneur des années que l'on dit que JESUS-CHRIST a vêcu fur la terre; & chantoient certains cantiques sur sa mort & fa paffion.. La fuperftition s'y mêla bien-tôt; & ils difoient que perfonne ne pouvoit être abfous de tous fes pechez, s'il ne faifoit un mois cette penitence. Ils Le confeffoient les uns aux autres, & fe donnoient l'abfolution quoique laïques, & prétendoient que leur penitence étoit utile aux morts, même àceux qui étoient en enfer ou en paradis.

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Ces flagellans, car on les nommoit ainsi, devinrent fufpects à Mainfroi, même avant qu'on les accusat d'aucune erreur. Il craignit que cette multitude de gens attroupez ne fit quelque entreprife contre fon autorité, & défendit fous peine de mort cette efpece de penitence dans toute l'étenduë de fon royaume, dans la Marche d'Ancone & la Tofcane. A fon imitation le marquis Palavicin fit la même défense à Cremone, à. Breffe, à Milan, & par tout où s'étendoit la puiffance. Henri duc de Baviere & quelques évêques d'Allemagne rejetterent ces flagellans avec mépris: Prandotha évêque de Cracovie les en chaffa, les menaçant de prifon s'ils ne fe rétiroient promptement. Januffe archevêque de Gnefne & les autres évêques de Pologne ayant découvert leurs erreurs, firent défendre par les feigneurs. fous de groffes peines, que perfonne fuivit cette fecte: ainfi elle fut bien-tôt méprifée & abandonnée, comme elle s'étoit formée fans autorité & fans raifon.

A Paris l'univerfité confentit enfin à la reception des freres Prêcheurs, comme on voit par un acte dreffé au nom du recteur & de. tous

les maîtres & les écoliers où ils difent: Nous

ftatuons & ordonnons pour certaines caufes ex- AN. 1260. primées plus amplement en d'autres lettres, que Dubonlai. les freres Prêcheurs ou Jacobins, toutes les fois p. 356. qu'ils feront appellez ou admis à nos actes publics, y tiendront le dernier rang; fçavoir les docteurs en theologie après tous les autres docteurs jeunes & vieux, feculiers & réguliers de la même faculté ; & dans les difputes ils n'ar gumenteront qu'après les autres docteurs. Les Bacheliers de leur ordre auront auffi le dernier lieu après ceux des autres ordres, c'est-à-dire des freres Mineurs, des Carmes, des Augustins, des Cifterciens, & des autres religieux. Et cette prefente ordonnance fera publiée & affichée aux portes des églifes, & jurée par tous ceux qui nous ont fait ferment. Donnée à faint Maturin dans notre affemblée generale convoquée exprès par trois fois, le vingtiéme de Janvier; le dix-neuf & le vingt-uniéme de Fevrier 1259. c'est-à-dire 1260. avant Pâques.

Il eft ici parlé de deux nouveaux ordres de religieux mandians qui venoient de s'établir à

Paris, les Carmes & les Auguftins. Les Carmes Sup. liv. étoient les ermites dont j'ai parlé établis fur le Lxxvi.n.55. mont Carmel avant la fin du douziéme fiecle aufquels Albert patriarche de Jerufalem donna enfuite une régle. Saint Louis en amena quel- Dubreüil. ques-uns avec lui à fon retour de la Terre fainte Antiq. p. & les établit à Paris, comme il fe voit par une 567. lettre du roi Charles le Bel fon arriere petit-fils, de l'an 1322. Ils demeuroient au commencement fur le bord de la riviere de Seine à la même place où font à prefent les Celeftins.

Les Auguftins étoient ces ermites que le pape Alexandre IV. avoit réunis en une même congregation fous le general Lanfranc en 1256. Ils étoient établis à Paris dès le mois de Decembre

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