DES ODEURS. DE plus en plus notre Raison découvre Des Objets de nos Sens le plus fecret pouvoir; Si nous voulons de même expliquer les Odeurs. ရာ Chacun connoît l'Odeur par fon experience: Mais cherchons ce que c'eft dans les Corps odorans. Si nous fuivons toujours la même vraisemblance, De nombreux petits Corps de tiffus differens, Produifent les Odeurs, en font la difference. Que les Corps odorans foient donc imaginez, Que le Cerveau prolonge au fond de notre Nez. A travers l'Os cribleux en filets divifées, Qui s'évaporent dans les Airs. De même que pour les Saveurs De tous ces petits Corps de diverfe figure, Selon que dans les Airs ces parcelles font meues Qu'elles font rondes, ou pointues Elles font éprouver leur force, ou leurs douceurs. Comme un fubtil Extrait de ces mêmes parties, Qui fur la Langue étoient fenties, Leurs Corps les plus legers parmi l'Air envolez, Jufqu'au Cerveau sont exhalez. On fent l'aimable Odeur des Arbres qui fleuriffent. On fent avec plaifir les doux Fruits qui meuriffent. Nous trouvons qu'un Vin genereux, Sur la Langue fi favoureux, Exhale dans le Verre un Efprit qui nous flatte; Avant qu'à l'effayer le Goût foit excité, Une Vapeur fubtile, & délicate Nous fait juger de fa Bonté. Ce fut du Créateur le fage Reglement, Qui, par ce fubtil fentiment, Voulut que l'Animal fe trouvât plus capable Et le trouver plus aifément. On voit parmi les Paturages Les Animaux, & privez, & fauvages, Par l'instinct que l'Auteur leur donne en les formant Choifir toujours heureusement, Dans l'Herbe, dont l'Odeur a d'abord fçû leur plaire, La Nourriture neceffaire, Mieux Ou le Remede falutaire, que nous ne ferions par le Raifonnement. Ainfi donc, hors des temps où des Sujets contraires Dérangent notre Goût, & fes Loix ordinaires, Les Odeurs, les Saveurs ont la même Action, Font à la Langue au Nez la même impression : On void prefque toujours ces Regles veritables, Les Mets qui fentent bon au Goût font delectables. On l'éprouve dans ces Repas, Où l'abondance avec Art fe déploye. Des Conviez invitent le Defir, A les goûter, à les choisir. Une trop forte Odeur nous eft infuportable, Le Cerveau n'en fçauroit fouffrir l'ébranlement Une plus temperée agite doucement, Autant Et cause un effet agréable. que l'on prévoid aux Sujets odorans, De Mouvemens differens, De differens effets leur Odeur eft capable. Change, & fur le Cerveau ne fait qu'un doux effort, ရာ Les voltigeantes parties, Dont un Corps odorant fe trouve compofé, Un Homme a d'un Odeur un trop fort fentiment, Qu'un Homme eft aux Odeurs bizarement sensible Si de cette façon la Nature en difpofe, Il ne faut qu'une Fleur dans un riant Jardin, Dans un Corps la force odorante, Avec le Mouvement fe produit, & s'augmente. L'Ambre jette un Parfum après qu'on l'a frotté; la Cire en feu l'Odorat eft flatté. Et par Ainfi lorfqu'au Printemps la diligente Aurore Dans les Champs Sabéens où tant de riches Plantes Par leurs qualitez odorantes, Où l'Arbre qui porte l'Encens Sur ces Arbres aimez il arrête fon Cours, Il fubtilife, il fait purifier |