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de croire appercevoir des chofes, qui jufques-là m'avoient paru très- obfcures; mais ces principes fi fimples s'imprimerent d'abord intimement dans mon elprit. Après avoir entendu Monfieur Rohault dans fes Conferences publiques, & avoir reçû de lui des Leçons particulieres, toujours occupé de ces Refléxions, je n'oubliois rien de ce qui pouvoit me les confirmer. Je me fuis trouvé, si je puis parler ainfi,dans l'Ecole de feu Monfieur de Meaux, ce Prelat qui fera une immortelle Lumiere de l'Eglife, comme il en a été dans notre Siecle un des principaux Ornemens. J'ai été long-temps affidu auprès de ce grand Prelat, dont le Sçavoir profond & universel embrasfoit toutes les Veritez, & dont l'aimable & vive Eloquence charmoit dans fes moindres Entretiens; il en augmentoit la douceur par l'attention qu'il donnoit aux autres. Je ne puis m'empêcher de dire qu'il a fouvent approuvé ces Principes Philofophiques, ou les a rectifiez par

fes Confeils. J'ai vécu avec deux excels lens Hommes, parfaits Amis, Monfieur de Court & Monfieur de Malezieu, qui m'avoient associé dans leur Amitié. Je pouvois les entretenir à toutes les heures, & leurs Converfations m'ont été infini ment cheres & utiles. J'ai eu de particulieres Conferences avec le Pere Lami, ce docte & pieux Benedictin. J'ai confulté le Pere Malebranche dont les Ecrits font si estimez, même par les fçavans Etrandont il combattoit les Opinions. Enfin j'ai eu le bonheur d'entendre un Cardinal, qui au milieu des plus importantes, & des plus difficiles Negociations a fçû penetrer tous les fecrets de la Philofophie, & qui nous les expliquant par des Vers plus harmonieux, plus riches & plus expreffifs que ceux de Lucrece, furmonte ce fameux Poëte avec ses propres armes, & diffipe tous les enchantemens de la dangereufe Doctrine d'Epi

gers

cure.

C'eft de toutes ces diverfes Medita

tions que j'ai tiré ce qui compofe cet Ouvrage; & c'eft en des Lieux tran quilles & folitaires que je les ai de nouveau approfondies. Elles m'ont fuivi par tout. Tantôt je tâchois d'envisager les choses tout d'une vûe, & de les peindre ensemble dans mon Efprit. Tantôt je les développois, comme fi elles y étoient nées dans ces momens ; je les révêtois d'expreffions & d'éclairciffemens qui m'étoient propres ; & fans nulle autre prétention, je ne fongeois qu'à m'instruire, & à me fatisfaire moi-même.

S'il fe trouve cependant quelqu'un, comme des Gens habiles m'en flattent, qui veuille profiter de mon Travail, je pourrai fervir de guide, même à ceux qui ont plus de Lumieres que moi, mais qui n'ont pas pensé à les tourner de ce côté-là. Par cette premiere ouverture ils feront peut-être excitez à en connoître davantage. Ils pourront, après s'être arrêtez à cette vûe generale, paffer, s'ils veulent, à un détail plus profond & plus

précis.

that is the night pestic

précis. Je ne les aurai pas du moins engagez à une longue fatigue, & ils pourront me sçavoir gré, d'avoir réduit à huit ou dix heures de lecture les Meditations de tant d'années,

J'ai fongé principalement à l'ordre & & à la clarté. Et fi j'ai écrit en Vers, je. m'y fuis embarqué fans y penser. J'en compofai d'abord un petit nombre, dont je croyois me fervir comme d'une efpece de Memoire artificielle', pour mieux retenir les Sujets, & me les remettre en abregé devant le yeux. Je ne prévoyois pas qu'un endroit, où je m'étois arrêté avec plaifir, ne devoit être que le pafsage pour un autre. Ces endroits les premiers échappez furent en Vers libres, & je continuai par reprises avec la même liberté.

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Après tout, je ne fçai fi cette irregularité n'est point un avantage plutôt qu'un défaut. Il n'y a point ici, il eft vrai, cette gravité uniforme qui fe trouve dans le Poëme Epique; mais il y a

b

I. Part.

plus de varieté & plus de facilité. Les Matieres font liées par des Tranfitions qui font comme autant de petits Exordes, & je me fuis appliqué avec foin à diftribuer chaque Sujet felon l'enchaînement naturel des Penfées.

po

IL EST neceffaire de confiderer d'abord qu'on ne peut parler raisonnablement de la Nature, fans connoître l'Auteur de la Nature. On ne peut rien fer de certain que fur ce fondement. Cette Science eft appellée Metaphyfique, & ce mot étonne certaines perfonnes du Monde qui fe figurent par là quelque chofe de fort obfcur, ou même d'inintelligible. Mais fi nous voulons nous affurer de quelque verité, & nous connoître nous-mêmes, ce qui eft notre plus grand intereft & notre premier devoir, il faut bien examiner les Principes de nos Connoiffances. Nous trouvons que l'Esprit & Dieu font les Idées les plus fimples & les plus claires qui fe puiffent presenter à nous, &

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