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qu'elles naiffent en nous. On ne pourra nier que notre Esprit par fa propre operation ne s'apperçoive lui-même, & ne s'apperçoive enfuite de tous les Objets qui caufent fes Senfations. Par là il ne peut s'ignorer, & ne peut ignorer un Efprit fouverain, ni l'Existence de cet Etre, feul neceffaire, qui a produit tous les Etres. C'eft ici le premier pas, & le plus important de la Philofophie.

De-là on paffe à l'Origine du Monde. On parle de la Matiere, du Mouvement; Des proprietez de la Matiere, des Loix, du Mouvement. On voit que par une Loi generale, inviolablement suivie, tout se forme, tout change, tout subsiste dans l'Univers.

CET immense Edifice de l'Univers, II. Part. fes Beautez, fa Splendeur, & fon Harmonie, peuvent-elles manquer de nous donner quelque defir d'en connoître la Structure ? Il faut par la pensée remonter à la formation de ce grand Ouvrage, & se representer que Dieu divife un amaş

immense de Matiere, en de petites par ties qui feront les Elemens de tous les Etres fenfibles. Dans la matiere agitée & broyée par le choc mutuel de fes parties, & devenue un grand Liquide, il fe formera d'abord comme des Torrens; lefquels empêchez dans leur cours direct les uns par les autres, se rameneront séparement fur leurs centres, d'un mouvement rapide & circulaire, & composeront ce qu'on appelle des Tourbillons, mot fi connu, & fi propre dans cette fignifi. cation philofophique.

Les divers mouvemens qu'on obferve dans les Cieux nous font juger que ces Corps errans, nommez des Planetes, & qui doivent être de la matiere épaiffie en globe, font entraînez chacun par le mouvement circulaire d'un Tourbillon particulier de matiere fluide où ils ont été formez, tandis qu'emportez par un grand Tourbillon qui les contient tous & dont le Soleil occupe le Centre, ils décrivent des cercles differens autour

de ce grand Aftre, & qu'il répand fur leur furface cette Lumiere dont ils bril lent inégalement à nos yeux. La Terre doit être comptée au rang de ces Planettes, & rouler en la troifiéme Sphere, à la place où l'on avoit mis le Soleil entre le Ciel de Venus & celui de Mars. On prévoit par là toutes les Revolutions de ces Aftres, leurs Cours, leurs Accroiffemens, leurs Décroiffemens, Stations, Rétrogradations. On connoît la Pefanteur, la Le gereté, le Flux & le Reflux de la Mer, le partage des Jours, & des Nuits, des Saifons & des Années. On va jufqu'à ces Efpaces étoilez où l'imagination ne peut mettre de bornes. On penetre la Cause des mouvemens particuliers, des Generations, des Corruptions, de la Rarefraction, de la Condensation, des effets que l'on imputoit à la crainte du Vuide. On voit que par un ordre aifé tout fuit clairement de la fimple pofition qu'on a faite, comme les mouvemens d'une Montre fuivent de fes roues & de fon

III. Part.

reffort. Rien fans doute n'eft plus capable de fatisfaire l'Efprit, ni de lui donner de l'élevation & de l'étendue.

ENSUITE ramenant notre attention fur nous-mêmes, nous fommes plus particulierement obligez, ce femble, de connoître ces Objets qui nous environnent, & nous touchent de plus près. Ce font des Corps qui agiffent inceffamment fur le nôtre, & qui produisent tous nos fentimens. Ils nous font fentir ce que nous appellons Dureté, Liquidité, Chaleur, Froideur, Saveur, Odeur, Son, Lumiere, & Couleur. Comment agiffentils en tant de fortes fur nos Corps ? Pouvons-nous mieux faire que de les examiner par le mouvement & par la figure que doivent avoir les petites parties dont ils font compofez, plus ou moins folides, plus ou moins agitées ? Par-là elles font capables de produire une infinité de divers ébranlemens dans nos orga. nes. L'application des unes eft vifible, celle des autres ne l'eft point du

tout: mais qu'elles foient visibles, ou invisibles, c'elt toujours la même forte d'impreffion accommodée à la difpofition de nos organes.

Ainfi l'Attouchement nous fert d'induction pour découvrir ce qui fe passe dans les Sens plus délicats. Si l'on n'attribue point au fer cette douleur qu'il nous cause en nous perçant, on ne doit point attribuer au feu la chaleur qu'il nous fait fentir quand il nous brûle. De plus il n'arrive à notre Corps qu'un dérangement de parties, qui n'a rien de commun avec ces qualitez que nous imaginons dans les Objets qui agitent nos Sens. Par un femblable Examen de toutes les Sensations nous reconnoîtrons qu'elles ne font qu'en notre Ame; & ceffant de les donner au Corps, nous rendrons à notre Efprit fes veritables droits, nous corrigerons les erreurs où nous étions tombez par la foibleffe de notre enfance.

CONNOISSANT donc plus particulie- IV. Part.

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