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paffé pour des aftres nouveaux, & entiérement exempts des loix de tous les autres, pouvoient être, & de la même régularité & de la même ancienneté, que ces planetes auxquelles on eft accoutumé depuis la naiffance du monde. En toute matiere les premiers fyftêmes font trop bornés, trop étroits, trop timides, & il femble que le vrai même ne foit le prix que d'une certaine hardieffe de raifon.

Ce fut cette heureuse & fage hardiesse qui lui fit entreprendre la réfolution d'un problème fondamental pour toute l'aftronomie, déja tenté plufieurs fois fans fuccès par les plus habiles mathématiciens, & même jugé impoffible par le fameux Kep'er, & par M. Bouillaud, grand aftronome François. Deux intervalles entre le lieu vrai & le lieu moyen d'une planete étant donnés, il falloit déterminer géométriquement fon apogée & fon excentricité. M. Caffini en vint à bout, & furprit beaucoup le monde favant. Sou problême commençoit à lui ouvrir une route à une aftronomie nouvelle & plus exacte ; mais comme pour profiter de fa propre inven

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tion, il avoit befoin d'un plus grand nombre d'obfervations qu'il n'avoit encore eu le tems d'en faire, car à peine avoit-il alors vingt fix ans, il écrivit en France à M. Gaffendi, & lui demanda celles qu'il pouvoit avoir principalement fur les planetes fupérieures. Il les obtint fans peine d'un homme auffi zélé pour les fciences, & auffi favorable à la gloire d'autrui.

Mais il reftoit encore dans le fond de l'aftronomie des doutes importans, & des difficultés effentielles. Il eft certain, & que le foleil paroît maintenant aller plus lentement en été qu'en hiver, & qu'il eft plus éloigné de la terre en été. Ce plus grand éloignement doit diminuer l'apparence de fa viteffe. Mais n'y a-t-il point de plus dans cette viteffe une diminution réelle C'étoit le fentiment de Kepler & de Bouillaud: tous les autres, tant anciens que modernes, croyoient le contraire, & la certitude de la théorie du foleil & des autres planetes dépendoit en grande partie de cette queftion. Pour la décider, il falloit obferver fi, lorsque le

foleil étoit plus éloigné de la terre, la diminution de fon diametre, car il doit alors paroître plus petit, fuivoit exactement la même proportion que la diminution de fa viteffe ; en ce cas, bien certainement toute la diminution de viteffe n'étoit qu'appparente; mais la difficulté étoit de faire ces obfervations avec affez de fûreté. Comme il ne s'agiffoit que d'une minute de plus, ou de moins, dans la grandeur du diametre du foleil, & que les inftrumens étoient trop petits pour la donner fûrement, chaque obfervateur pouvoit la mettre ou l'ôter à son gré, & en disposer en faveur de fon hypothefe, & la question demeuroit toujours indécife. Nous ne donnerons que cet exemple de l'extrême importance, dont peuvent être, chez les aftronomes, de petites grandeurs indignes par-tout ailleurs d'être comptées. En général il eft aifé de concevoir que quand on fe fert d'un quart de cercle pour obferver, fa proportion aux grandeurs qu'il doit mesurer, est presque infiniment petite, & qu'à l'épaiffeur d'un fil de foie fur cet inftrument, il répond dans le ciel des mil

lions de lieues. Ainfi la précifion de l'aftronomie demande de grands inftrumens.

Il fe préfenta heureusement à M. Caffini une occafion d'en avoir un, le plus grand qui eût jamais été, précisément lorfqu'il étoit dans le deffein de refondre toute cette fcience. Le défordre où le calendrier Julien étoit tombé, parce qu'on y avoit négligé quelques minutes, avoit réveillé les aftronomes du feizieme fiecle: ils voulurent avoir par observation les équinoxes & les folftices que le calendrier ne donnoit plus qu'à dix jours près, & pour cet effet, Egnazio Dante, religieux dominicain, profeffeur d'aftronomie à Boulogne, tira, en 1575, dans l'église de S. Pétrone, une ligne qui marquoit la route du foleil pendant l'année, & principalement fon arrivée aux folftices. On ne crut point mettre une église à un usage profane, en la faisant fervir à des obfervations néceffaires pour la célébration des fêtes. En 1653, on fit une augmentation au bâtiment de S. Pétrone. Cela fit naître à M. Caffini la penfée de tirer, dans un autre endroit de l'églife, une ligne plus

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longue, plus utile, & plus exacte que celle du Dante, qui n'étoit même pas une méridienne. Comme il falloit qu'elle fût parfaitement droite, & que par la néceffité de fa pofition, elle devoit paffer entre deux colonnes, on jugea d'abord qu'elle n'y pouvoit passer, & qu'elle iroit périr contre l'une ou l'autre. Les magiftrats, qui avoient foin de la fabrique de S. Pétrone, doutoient s'ils confentiroient à une entreprise auffi incertaine. M. Caffini les convainquit, par un écrit imprimé, qu'elle ne l'étoit point. Il avoit pris fes mesures fi juftes, que la méridienne alla rafer les deux dangereufes colonnes qui avoient penfé faire tout manquer.

Un trou rond, horizontal, d'un pouce de diametre, percé dans le toit, & élevé perpendiculairement de mille pouces audeffus d'un pavé de marbre, où eft tracée la méridienne, reçoit tous les jours, & envoie à midi, fur cette ligne, l'image du foleil, qui y devient ovale, & s'y promene de jour en jour, felon que le foleil s'approche ou s'éloigne du zénith de Boulogne. Lorsqu'il en eft le plus près qu'il

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