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Au troifième jour du fiége, le Maréchal 19 Août. de Saint Géran & le Duc de Chevreufe, s'ávancent vers le baftion du Mouftier; ils parviennent à fe loger dans les mafures du faubourg, après un combat très-rude & trèsopiniâtre. Les Affiégés y perdent Bardon, Gardéfi & quelques autres; mais font mordre la pouffière à un grand nombre d'Affiégeans.

Montauban étoit déjà alors investi de trois côtés. Le quatrième, qui étoit celui de Saint Antoine ou de Villenouvelle, refta toujours libre; circonftance qui ne contribua pas peu au mauvais fuccès du fiége. Les deux jours fuivans furent employés par les Royalistes à conftruire deux ponts de bâteaux fur la rivière, l'un au-deffus de la ville & du moulin de Sapiacou, & l'autre au-deffous de Moncau, pour la communication des quartiers qu'on acheva de mettre hors d'infulte.

La funefte inaction de l'armée royale donna le temps aux Montalbanois de fortifier entièrement la corne de Montmirat, ainfi que les baftions de l'Eclufe, de Rohan & des Carmes. Il eft vrai qu'on peut

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attribuer cette inaction à l'espoir d'arriver à la place fans effufion de fang. Le Duc de Sully, qui vivoit retiré dans des terres qu'il avoit en Querci & en Languedoc, vint trouver le Roi pour le fupplier de donner la paix à fes peuples, & lui demander la permiffion d'entrer dans Montauban, parce qu'il efpéroit de ramener les habitans à l'obéiffance. Le Roi le lui permit. Mais le Duc arrivé dans la ville ne fut pas peu furpris, lorfqu'il apprit que le Marquis de la Force, le Comte d'Orval & les autres Seigneurs du parti avec qui il avoit cru négocier, y étoient fans aucune espèce d'autorité, & que tout étoit gouverné par les Officiers municipaux. Il demanda que le Confeil de ville fût affemblé; il s'y rendit, & pénétré de cet amour de la patrie, dont il avoit été toujours embrasé, il parla ainfi : « D'où vient cet aveugle obsti»nation à fermer les yeux fur le danger » preffant qui menace vos perfonnes, vos » familles & vos biens? Vous courez à » une ruine certaine, & vous ne pouvez » la prévenir qu'en implorant la clémence

» du meilleur des Rois, juftement irrité » contre vous. Vainement vous vous re» pofez sur des fecours étrangers. Les Rois » n'accordent leur protection qu'à ceux qui » peuvent leur être utiles, & leur intérêt » commun leur fait un devoir d'abandon»ner les factieux qui mettent le trouble » dans les états. Ne penfez pas que votre » cause foit regardée comme la caufe de » toute la religion réformée. Votre con» duite opiniâtre vous a rendu odieux à la » plupart des églifes, & les Princes pro» teftans vous regardent comme des rebel» les dont ils follicitent en fecret le châ» timent. » Plus le Duc de Sully mit de » véhémence & d'intérêt dans fon discours, plus le Confeil sembla l'écouter avec impatience. Le premier Conful fe hâta de prendre les avis & répondit : « Notre réso»lution eft de vivre & mourir dans l'u»nion des églifes; nous en avons fait le » ferment folennel & nous ne le violerons jamais. Jamais nous n'agirons que de con>> cert avec nos Frères Réformés, & de » l'aveu du Duc de Rohan, Général de la

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»province. Toute tentative contraire fera » fans fuccès. Nous fommes étonnés

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qu'un grand homme, uni à nous par la » même croyance & le même culte, nous invite aujourd'hui à la perfidie, & pré» tende nous engager à abandonner la » caufe commune, pour n'écouter que no»tre intérêt particulier. Notre conduite » inébranlable atteftera la pureté de nos » fentimens, & l'inutilité des fourdes me» nées que l'on mettra en oeuvre pour » nous rendre parjures.

Le Confeil fe fépare après cette réponfe, & le Duc, fuivi par les principaux jufqu'à la porte de la ville, fortit fans avoir parlé à personne en particulier. Il rendit compte au Roi de fon entrevue infructueufe avec les Montalbanois, & fe retira dans fes terres.

Quoique toute voie de conciliation parût fermée par le mauvais accueil fait au Duc de Sully, le Connétable, toujours défireux de faire tourner, à l'honneur du Roi, cette entreprise qui étoit fon ouvrage, & dont il commençoit à fentir les dif

ficultés, ne fe rebuta pas encore. Il mit dans fes intérêts le Capitaine Sauvage, qui avoit déjà utilement fervi le Roi à Clairac, & lui avoit ménagé la reddition de cette place. Dans l'efpoir de mériter de nouvelles récompenfes, Sauvage vient au camp s'abouche avec Defplan - Grimaud, confident zélé du Connétable, & ofe lui faire efpérer qu'il ne feroit pas peut-être impoffible d'amener à un accommodement ceux qui commandoit dans Montauban.

Le Connétable chargea Defplan-Grimaud de faire toute forte de promeffes à Sauvages, s'il réuffiffoit. Il n'ignoroit pas que les gens de qualité qui étoient dans la ville, n'y étoient rien moins que puiffans, ainfi que Sully l'avoit éprouvé; mais il efpéroit que fi on pouvoit les gagner & les engager à en fortir, cette multitude fans Chefs feroit plus aifée à réduire. Defpland exécuta ponctuellement ces ordres, & Sauvages fe jeta dans la ville avec deux Gentils 21 Août hommes qui ignoroient entièrement fés deffeins. Son arrivée fit un grand plaifir aux gens de guerre, & furtout au Comte de

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