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de pleurer, me laissa maître d'un fief assez consi dérable. Que je devais y être heureux! le château était magnifique, les environs enchanteurs; c'était un paradis, car il y habitait un ange, une fille embellie de tous les charmes de la jeunesse, fraîche comme la rose des champs, et chaste comme la lumière du ciel. Mais j'ai tort de vous en parler ainsi ; vous ne pouvez pas m'entendre, vous n'avez jamais aimé, vous ne fûtes jamais aimés.

SCREVZER.

Comme le visage du capitaine s'est enflammé.

RAATZ MAN N..

Qu'as-tu Charles?

CHARLES.

Laissez-moi. (A Rosinski.) Je t'écouterai une autre fois, demain, un autre jour, quand j'aurai vu du sang!

Ro INSK I.

Du sang? du sang? Ecoute seulement, et ton âme sera altérée de saug. Elle était d'une famille bourgeoise, une allemande; mais un de ses regards dissipait tous les préjugés de la noblesse. Avec une modestie charmante, elle avait accepté l'espérance d'être mon épouse, et je la lui avais donné avec transport. J'allais conduire aux autels mon Amélie...

CHARLES, se levant.

Ton Amélie !...

ROSINS K I.

Au milieu de l'ivresse du bonheur qui m'attendait, et des apprêts si doux de notre éternelle union, je suis mandé à la cour; je m'y rends: on me présente des lettres pleines de trahison, et on ose m'a

cuser de les avoir écrites. Confondu de taut de scélératesse, je rougis; on saisit mon épée; on me jette dans un cachot affreux, où toute ma raison m'abandonna.

ROLLER.

Une affaire de plus pour notre tribunal. Continue. ROSINSK I.

Je restai là un mois éternel. Je m'attendrissais sur mon Amelie, pour qui chaque minute de ma captivité devait être une mort affreuse. Enfin, le premier ministre vint me féliciter sur la découverte de mon innocence, et d'un ton de courtisan me lire l'ordre de ma liberté. Je lui avais tout pardonné ; je ne pensais qu'au bonheur de revoir Amelie. Je vole à ma demenre: elle n'y était plus ; on l'avait enlevé, et ses ravisseurs n'avaient laissé aucune trace. Une affreuse clarté m'éclaire. J'accours au palais du prince; je l'y cherche de toutes parts; je l'y découvre enfiu. Au,travers d'une grille elle me jette une petite lettre. O désespoir ! me voir expirer dans l'opprobre et dans les tourmens, ou devenir la maîtresse du prince, elle avait eu à choisir, ( souriant amèrement. ) et j'étais sauvé. ROLLER. Que fis-tu ?

ROSINSK I.

Je restai écrasé. Du saug, fut ma première pensée. Ma dernière pensée fut du sang. Ecumant, je m'arme d'une épée, et je cours avec ma vengeance au palais du ministre.

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à le voir. On dit qu'il est chez le prince. J'y 'volea Il n'y était pas je retourne chez lui; on me laisse entrer: je lui parle ; et voilà qu'une douzaine d'assassins sortent d'une embuscade et m'arrachent mon épée. Je fus chargé de fers, accusé, poursuivi criminellement, et par grace singulière chassé de la principauté, comme scélérat. On fait présent au ministre de tous mes biens; et mon Amélie, mon Amélie, épuisée de soupirs et de larmes, reste entre les griffes du tigre, loin de celui qu'elle aime....

CHARLEs, presqu'en délire.

Amélie! Amélie ! Il faut que je la voie! je veux la voir. Levez-vous tous. Tu restes avec nous, Rosinski ? Préparez-vous à partir.

LES VOLEURS, surpris.

Où ? quoi ?

CHARLES.

Qu'est-ce qui demande où ? (A Roller, qui se trouve près de lui. ) Traître! tu veux me retenir : mais par le ciel....

ROLLER.

Moi, un traître ? Descends aux enfers, je t'y suis. CHARLES, l'embrasssant.

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Coeur de frère, tu m'y suivrais? Elle pleure: le désespoir flétrit son cœur. (A Rosinski. ) Et moi aussi j'ai une Amélie et moi aussi .. Ah! de quel souvenir tu m'as dévoré. (Aux voleurs.) Allons, tous en Franconie: il faut que nous soyions-là sous huit jours.

FIN

DU TROISIEME ACTE.

ACTE IV

t

ACTE I V.

97

Le théâtre représente le jardin du château de Moour.

SCENE PREMIERE. DANIEL, SON ENFANT, âgé de 6 à 7 ans ; CHARLES.

DANIE L.

Il est triste pour un vieux serviteur de voir tout changé dans la maison qui l'a vu naître, et de ne trouver qué de la peine et de l'amertume dans des devoirs qu'il avait l'habitude de remplir avec tant de satisfaction. Va, mon enfant ne te presse pas de vieillir.

M'y voilà!

,

CHARLES, entrant.

DANIEL.

Qu'est-ce, monsieur ? Qui demandez-vous?

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HARLES.

Je m'appelle le comte de Brand. Je voudrais parler à une demoiselle qu'on m'a assuré demeurér ici. DANIEL.

Mademoiselle Amélie, peut-être ?

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Elle est ici je vais la voir. (Craignant de s'être trahi. ) Vous êtes le premier domestique du vieux somte de Moour,

DANIEL.

Hélas! je le serais, s'il vivait encore. (1)

CHARLES.

Il n'est plus ?

DANIEL.

Il n'est plus !

CHARLES, à part, pénétré.

Et je n'ai pas fermé ses yeux! Ah! mon ami, quel bon maître vous avez perdu.

DANIEL.

Vous le connaissiez.

CHARLES.

Qui.

DANIEL.

Il n'est pas un seul homme dans tout le canton qui n'eut donné sa vie pour prolonger la sienne. Quel convoi! hommes, femmes, enfans, tout le monde y était, tout le monde fondait en larmes. Aussi plus de bonheur depuis sa mort, pas une bonne année, pas une récolte heureuse. Les impôts enlèvent ce qui a échappé à la grêle et aux débordemens; et les habitans de la ville ne sont pas plus heureux que les habitans des campagnes. Quelle différence! Les bons maîtres ne vivent jamais assez long-temps.

CHARLE S.

Quelle fut la cause de sa mort'? Son âge n'était pas si avancé.

DANIEL.

Le chagrin que ses enfans lui ont causé.

CHARLES.

Ah, malheureux! ( A Daniel.) Quoi! ses deux fils ?

(1) Presque toute cette scène est du citoyen Lamartellière.

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