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feignent doivent être de bonnes mœurs, & conformer AN. 362. leurs sentimens aux maximes publiquement reçues, Epif. 42. & à ce qu'ils enfeignent eux-mêmes. Qu'il eft de mauvaife foy d'expliquer aux jeunes gens les anciens auteurs, les leur propofant comme de grands perfonnages, & condamner en même tems leur religion. Homere dit-il, Hefiode, Demofthéne, Herodote, Thucydide, Ifocrate & Lyfias on reconnu les dieux pour auteurs de leur doctrine : les uns ont cru être confacrez à Mercure, les autres aux Mufes. Puis qu'ils vivent des écrits de ces auteurs : ils fe déclarent bien intereffez, de trahi, leur concience pour un peu d'argent. Jufques icy il y a eu plufieurs raifons de ne pas frequenter les temples; & la terreur répanduë par tout, étoit une excufe de ne pas découvrir les fentimens les plus veritables touchant les dieux : mais puis qu'il nous ont eux-mêmes donné la liberté, il me paroît abfurde d'enfeigner ce que l'on ne croit pas. Si ceux-cy eftiment fage la doctrine des auteurs, dont ils font les interpretes; qu'ils commencent par imiter leur pieté envers les dieux. S'ils croyent qu'ils fe font trompez sur ce qu'il y a de plus important, qu'ils aillent expliquer Mathieu & Luc dans les églifes des Galiléens. Il ajoute que cette loy n'eft que pour ceux qui enfeignent; & que les jeunes gens ont la liberté d'aprendre ce qu'ils voudront. Il feroit jufte, dit-il, de les guerir malgré eux comme des frenetiques : mais je leur fais grace, & je crois qu'il faut inftruire les ignorans, & non pas les punir. Cecy nous explique une loy de Julien, qui porte que les profeffeurs doivent exceller, premierement par les mœurs; & qui ordonne qu'en chaque ville, celuy qui veut enfeigner foit examiné par le confeil; & que s'il eft aprouvé, le décret foit envoyé à l'empereur pour le confirmer. Cette loy eft du quinze

Ls. Cod.

Theod. de

Med, & prof.

Theod. 111. c 8

des calendes de Juillet fous le confulat de Mamertin & AN. 362. de Nevitta, c'est-à-dire du dix-feptiéme de Juin 362. Les vrais motifs de cette défenfe étoient les grands avantages que les Chrétiens tiroient des livres profanes, pour combattre le paganisme : foit par l'abfurdité des fables en elles-mêmes, foit par les raifonnemens que: Platon & les autres philofophes avoient employez, pour: Soxom. v, c. 18, en montrer les fuites pernicieuses : foit par la methode: de parler & de raifonner que l'on apprend dans ces au-teurs. Il y. entroit auffi de la jaloufie que Julien avoit conçue contre plufieurs Chrétiens favans, comme S. Bafile, S. Gregoire de Nazianze, le jeune Apollinaire: Soc, 111 .16.. & plufieurs autres tant Catholiques qu'Ariens. Cette défense excita les deux: Apollinaires à compofer divers ouvrages utiles à la religion. Le pere qui étoit grammairien, écrivit en vers heroïques & à l'imitation d'Homere, l'histoire fainte, jufqu'au regne. de Saül, en vingt-quatre livres intitulez des vingt-quatre lettres de l'alphabet grec. Il imita Menandre par des comedies, Euripide par des tragedies, Pindare par des odes; prenant des fujets de l'écriture fainte,& fuivant le caractere & le ftile de chaque poëme, afin que les Chrétiens fe puffent paffer des auteurs prophanes pour apprendre les : Belles lettres. Le fils qui étoit sophiste, c'est à dire rheteur & philofophe, fit des dialogues à la maniere de Platon, pour expliquer les évangiles & la doctrine des apôtres. Il écrivit auffi contre l'empereur & contre les philofophes payens, un ouvrage intitulé de la verité :où il montroit leur erreur touchant la divinité, employer aucun paffage des faintes écritures. Car l'empereur pour fe mocquer des livres facrez, avoit écrit aux plus celebres évêques ces trois mots grecs: Anegno egnon, categnon c'est-à-dire, j'ai lû, j'ai compris, j'ai condamné fe jouant fur la rencontre des mots. On.

Sozem, c. J.

18

:

fans

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lui répondit suivant le même jeu, qu'une autre langue AN. 362, ne peut exprimer : Tu as lû, mais tu n'as pas compris ; car fi tu avois compris tu n'aurois pas condamné. Quelques-uns attribuoient cette réponse à S. Bafile. La perfécution de Julien dura fi peu, que les ouvrages des Apollinaires furent inutiles, & on revint à la lecture des auteurs profanes, dont les chrétiens s'étoient fervis librement dés le commencement, pour en tirer ce qu'ils ont d'utile. Auffi n'avons-nous plus ces ouvrages des Apollinaires, excepté la paraphrafe des pleaumes..

:

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&

Ecebole fameux fophifte à C.. P. ceda au tems se rendit aux careffes de Julien,à qui il avoit enfeigné la rhétorique. Il avoit paru Chrétien fervent fous Conftantius, fous Julien il fut ardent payen aprés fa mort il voulut revenir au Chriftianisme, & fe profternant à porte de l'églife, il crioit : Foulez-moi aux pieds, comme le fel infipide.. Telle fut la legereté d'Ecebole. Mais

la

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la plupart des profeffeurs Chrétiens aimerent mieux orof. 7. c. 38, abandonner leurs chaires que leur religion. On remarque entre les autres Proërefius & Victorin. Le premier Eunap. in prom étoit un fameux fophifte d'Athenes, qui quitta volon-i tairement fon école, bien que Julien qui avoit étudié fous lui, l'exceptât de la loy generale, & lui permît d'en- 363. feigner.

Hier. Chr. an.

c. 2. c.

Victorin étoit Afriquain,& enfeignoit à Rome la rhetorique depuis long-tems; il avoit vû entre fes difci- Aug. TILL.conf. ples les plus illuftres fenateurs, & on lui avoit érigé pour fon merite une ftatue dans la place de Trajan: Hier. Chr. an. mais il étoit demeuré idolâtre jusques à la vieillesse. A. 355° la fin il fe convertit. Il lifoit l'écriture fainte, examinoit foigneufement tous les livres des Chrétiens; & difoit. en fecret à un ami Chrétien qu'il avoit, nommé Simplicien Sachez que je fuis déja Chrétien. Simplicien

répondoit: Je n'en croiray rien, que je ne vous voye AN. 362. dans l'églife. Victorin fe moquoit de lui, en difant: Sont-ce les murailles qui font les Chrétiens? Ils fe redirent souvent la même chose de part & d'autre : car Victorin craignoit de choquer les amis puiffans qu'il avoit entre les idolâtres. Enfin s'étant fortifié par la lecture, il eût peur que J. C. ne le renonçât devant les faints anges, s'il craignoit de le confeffer devant les hommes; il vint trouver Simplicien lors qu'il s'y attendoit le moins, & luy dit : Allons à l'églife; je veux devenir Chrétien. Simplicien tranfporté de joye l'y conduifit. Victorin reçût les ceremonies du cathecumenat, & donna fon nom peu aprés pour être baptifé, au grand étonnement de Rome; & au grand dépit des payens. Quand fe vint à l'heure de faire la profeffion de foy que l'on prononçoit à Rome, d'un lieu élevé à la vûë de tous les fideles : les prêtres offrirent à Victorin de la faire en fecret, comme on l'accordoit à quelquesuns que la honte pouvoit troubler; mais il aima mieux la prononcer en public. Lors qu'il monta pour reciter le Symbole, comme il étoit connu de tout le monde, il s'éleva un murmure univerfel, chacun disant tout bas pour s'en réjouir avec fon voifin: Victorin, Victorin : un moment aprés le défir de l'entendre fit faire filence. Il prononça le Symbole avec fermeté ; & chacun des afliftans le mettoit dans fon cœur par l'affection & la joye. Telle fut la conversion de Victorin; & peu de tems aprés, l'édit de Julien luy donna occafion de quitter fon école de rhetorique. Il avoit traduit en latin plug. ibid. c. fieurs livres des Platoniciens; & de puis fa converfion, Hier. de fcript. il écrivit de la Trinité contre les Ariens quatre livres que nous avons, & des commentaires fur S. Paul : mais avec peu de fuccez, parce qu'il s'étoit appliqué trop à l'étude des faintes lettres.

s.

& pram epist. da Gala.

tard

AN. 362.

SocT. III. c. 12.

Theed. JII. c.8.

Sozom. T. 6. 18.

Julien ne défendit pas feulement aux Chrétiens d'enfeigner les lettres humaines, mais encore de les apren- Aug. XVIII. dre; ne voulant pas que leurs enfans étudiaffent les poc- civit. c. 82. tes, les orateurs & les philofophes : ni qu'ils fréquentaffent les écoles de ceux qui les enfeignoient. Prétendant qu'il ne devoit être permis qu'à ceux qui fuivoient la religion des anciens Grecs, de s'appliquer à leurs étu- Greg.NAK. or.3. des, & même de parler purement leur langue; que les Galiléens devoient demeurer dans l'ignorance & la barbarie que les Grecs leur reprochoient, & fe contenter de croire fans raisonner.

P.51. p. 97. &c.

VII.

Julien veut

imiter les Chré

tiers.

Soz. v. c. 16.

Mais quelque mépris qu'il témoignât pour les Chrétiens, il fentoit l'avantage que leur donnoit la pureté de leurs mœurs & l'éclat de leurs vertus. Il voulut donc les imiter & profiter de leur exemple, pour réformer le paganisme, qui faisoit peu de progrez nonobftant fa Jul. epift. 49. puiffante protection. Voici comme il s'en explique, écrivant à Arface fouverain pontife de Galatie: L'Hellenisme ne va pas encore comme il devroit, & c'est par notre faute. De la part des dieux tout eft grand & magnifique, au-deffus de tous les fouhaits & de toutes les efperances. Soit dit fans les offenser : qui eût ofé, il y a quelque tems, efperer un tel changement ? Quoi donc, croyons-nous que cela fuffife: fans regarder ce qui a le plus accru l'athéïsme; fçavoir, l'hofpitalité, le foin des fépultures & & la feinte gravité des mœurs:nous devons pratiquer tout cela veritablement. Et il ne fuffic pas que vous foyez tel, tous les pontifes de Galatie le doivent être. Perfuadez-leur d'être gens de bien par raifon ou par crainte, autrement privez-les des fonctions du facerdoce : s'ils ne fervent les dieux avec leurs femmes, leurs enfans & leurs domeftiques; & s'ils fouffrent dans leurs familles il y ait des Ĝaliléens. Avertissez

que

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