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XXVIII.

2. p. 780. C.

fe, il ajoûta quelques herbes, & ne prenoit fa nourriture qu'aprés le foleil couché. Tel étoit le grand Aphraate qui vint alors au fecours de la religion, & fit enfuite plufieurs autres miracles. Theodoret qui les rapporte l'avoit vû, & avoit receu fa benediction étant encore enfant.

Les heretiques firent courir le bruit que le grand JuS. Julien Sabas. lien avoit embraffé leur communion: ce fameux foliThe Philot. taire de l'Ofroëne, qui avoit connu par revelation la Sup. liv. xv. ». mort de l'empereur Julien. On le nommoit Sabbas, c'està-dire en fyriaque chenu ou vieillard. Pour diffiper cette impofture, Flavien, Diodore & Aphraate s'adrefferent à Acace depuis évêque de Berée, qui avoit été inftruit dans la vie monaftique par Afterius difciple de Julien Sabbas. Ils perfuaderent à Acace d'aller avec Afterius trouver le S. vieillard, & de l'emmener au fecours de l'églife. Quand ils furent arrivez aupréz de lui, Asterius lui parla ainsi : Dites-moi, mon pere, pourquoi fouffrezvous agreablement tant de peines? Julien répondit: c'eft que le fervice de Dieu m'eft plus cher que mon corps & que ma vie. Je vous montrerai, dit Acace, le meilleur moïen de le fervir maintenant. Quand il voulut montrer à S. Pierre comment il feroit voir, qu'il l'aimoit plus que les autres, il lui dit : Si tu m'aimes, pais mes brebis. Vous devez faire de même, mon pere le troupeau eft en danger, vous trahiriez la verité par vôtre filence. Car vôtre nom fert d'appât aux Ariens pour tromper les fimples, & ils fe vantent d'avoir vôtre communion.

Joan. XXI 17.

Auffi-tôt que le S. vieillard eut oüi ces paroles, il prit le chemin d'Antioche, renonçant pour un tems à la folitude. Après avoir marché deux ou trois jours dans le defert, il arriva le foir à une bourgade où une femme riche yint se jetter à ses pieds, & le supplier de loger

chez elle avec fa fainte troupe. Il y confentit, quoique depuis plus de quarante ans il n'eût point vû de femmes. Pendant que celle-ci étoit occupée à fervir fes hoftes, comme il étoit nuit, un fils unique qu'elle avoit, âgé de fept ans, tomba dans un puits. Cet accident fit du bruit, la mère l'aprit : mais elle commanda à tous ses gens de fe tenir en repos, couvrit le puits, & continua à fervir fes hôtes. Quand ils furent à table, le S. vieillard dit que l'on appellât l'enfant pour recevoir fa benediction. La mere dit qu'il étoit malade; mais le faint infifta & pria qu'on l'apportât. Elle déclara enfin l'accident. Julien fe leva de table & courut au puits. Il le fit découvrir, & apporter de la lumiere; il vit l'enfant affis fur la furface de l'eau, qu'il frapoit de la main en se joüant. On attacha un homme à des cordes, on le defcendit dans le puits, & il en retira l'enfant; qui auffi-tôt courut aux pieds du S. vieillard, difant qu'il l'avoit vû qui le foûtenoit fur l'eau.

Quand il fut arrivé à Antioche, le peuple accourut de tous côtez pour le voir, & pour recevoir la guérifon de diverses maladies. Il fe logea au pied de la montagne dans ces cavernes, où on difoit que S. Paul s'étoit caché : mais auffi-tôt il tomba malade lui-même d'une fiévre violente. Acace en étoit affligé, craignant que ceux qui venoient en foule, dans l'efperance d'être gueris, n'en fuffent fcandalifez. Julien lui dit: Ne vous découragez point : fi ma santé eft necessaire, Dieu me la donnera incontinent. Auffi-tôt il fe mit à prier à son ordinaire, profterné fur les genoux, le front contre terre, demandant à Dieu de lui rendre fa fanté, fi elle devoit estre de quelque utilité aux affiftans. Il n'avoit pas achevé fa priere, quand il lui vint tout d'un coup une grande fueur, qui emporta fa fiévre. Ensuite il guérit plufieurs malades de toutes fortes, & s'en alla à l'affemblée des

Baf. ep 60.

XXIX. Maffacre des magiciens.

c. 14.

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catholiques. Comme il paffoit devant la porte du palais, un mandiant qui fe traînoit fur fon fiége n'aïant point l'usage des jambes, étendit la main & l'aprocha du manteau du S. vieillard. Auffi-tôt il fut gueri, fe leva en fautant & en courant : ce qui fit assembler tout le peuple de la ville, & le champ des exercices en fut rempli: enforte que les heretiques furent chargez de confufion. S. Julien guerit plufieurs autres malades qui l'attirerent en leurs maifons, entre autres le comte d'Orient: puis il reprit le chemin de fa cellule.

Paffant par la ville de Cyr à deux journées d'Antioche, il s'arrêta dans l'églife d'un martyr, où les catholiques du lieu s'affemblerent, & prierent Julien de les délivrer du sophiste Afterius, que les heretiques avoient fait évêque, & envoïez chez eux pour féduire les fimples, Prenez courage, dit le S. vieillard: priez Dieu avec nous: & joignez à la priere le jeûne & la mortification. Ils le firent & le fophifte. Afterius la veille de la fefte où il devoit parler, fut frappé d'une maladie qui l'emporta en un jour. Theodoret qui raporte ces merveilles, les avoit aprifes d'Acace difciple du faint. S. Bafile secourut en cette occafion l'église d'Antioche par une lettre pleine de tendresse & de confolation.

Tandis que l'empereur Valens perfecutoit ainfi les feuls catholiques, il'laiffoit aux autres l'exercice libre de Theodiv hift. leur religion,c'est-à-dire à tous les heretiques, aux Juifs & aux païens mêmes. Ils obfervoient en toute feureté leurs ceremonies profanes rétablies par Julien, & aboId.v.b... lies par Jovien. Pendant tout le regne de Valens, on alluma du feu fur les autels, on offrit aux idoles des libations & des victimes: on fit les feftins publics dans les places on celebra les festes de Jupiter & Cerés. Aux orgies de Baccus, on vit les hommes & les femmes cou

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rir furieux, portant des peaux de chevres, déchirant des chiens & faifant les autres extravagances de cette feste. A la fin toutefois, l'empereur Valens fit auffi fentir aux païens fa colere : & telle en fut l'occafion.

2. Zof. 4.1·743.

Comme il étoit à Antioche, on découvrit que deux mm. XXV. c. prétendus devins Hilaire & Patrice avoient été emploïez pour favoir qui devoit regner aprés Valens. Etant pris tous deux & mis à la queftion, Hilaire dit: Nous avons fait avec des branches de laurier cette table

à trois pieds, qui nous eft representée, à l'imitation du
trepié de Delphes; & aprés l'avoir confacrée par des
charmes fecrets & de longues ceremonies, nous l'avons
pofée au milieu d'une maifon purifiée de tous côtez par
des parfums. On a mis dessus un baffin rond fabriqué de
divers métaux, où l'on avoit gravé dans le bord les vingt-
quatre lettres de l'alphabet grec,à certaine diftance l'une
de l'autre. Un homme s'en eft aproché, vêtu de lin avec
des chauffons de même, & une bandelette autour de la
teste, portant de la vervene. Aprés avoir invoqué par
certains cantiques le dieu qui prefide à la divination,
c'est-à-dire Phebus, cet homme a balancé un anneau
pendu à des petits rideaux par un fil tres leger. Cet an-
neau avoit été auparavant preparé par les myfteres de
l'art. Nous demandâmes qui devoit fucceder au regne
prefent, parce qu'on difoit que ce devoit être un hom-
me accompli : & l'anneau en fautant fur le baffin, mar-
qua les deux fyllabes Theod, en s'arrêtant fur les
lettres grecques theta, epfilon, omicron & delta. Quel-
qu'un des affiftans s'écria que le deftin marquoit Theo-
dore. On n'en chercha pas davantage : car il étoit affés
conftant entre nous, que c'étoit lui qu'on demandoit.
Telle fut la confeffion d'Hilaire.

quatre

Ce Theodore tenoit le fecond rang entre les notaires

vid.

p. 104. 105.

Chradun de l'empereur, dignité trés- confiderable alors. Il étoit tres-bien fait de fa perfonne, fort inftruit des bonnes lettres & accoûtumé à parler à l'empereur avec une Soz. vi. c. 35. grande liberté. Il étoit païen: ce qui le faifoit defirer pour maître aux philofophes & autres païens indignez de l'accroiffement du Chriftianifme. Ainfi il ne faut pas s'étonner si l'anneau magique bien conduit, marqua les premieres lettres de fon nom. L'empereur Valens, naturellement violent,aïant découvert cette confpiration, fut transporté de fureur, & ne mit point de bornes à fa vengeance. Il fit mourir tous les complices, & tous ceux qui furent même foupçonnez de l'eftre: les uns par le feu comme magiciens, les autres par le fer. Antioche, fut pour ainsi dire inondée de fang. On recherEunap. inMax. cha les philofophes comme magiciens. Maxime fut accufé d'avoir eu connoiffance de cette operation magique & d'avoir prédit un grand maffacre, aprés lequel Valens periroit d'une maniere extraordinaire. Il fut donc amené à Antioche, puis renvoïé en Afie, où le gouverneur Feftus lui fit trancher la tefte: & telle fut la fin du philofophe Maxime, le principal auteur de l'apoftafie de l'empereur Julien. L'épouvante fut fi grande parmi les SOX.VI.C. 35. philofophes, que perfonne n'ofa plus en faire profeffion ni en porter l'habit ; & les particuliers même quitterent les manteaux à frange, qui pouvoient reffembler aux leurs On fit aufli la recherche des écrits de magie, & on brufla publiquement de grands monceaux de livres, où l'on en confondit qui ne traitoient que de lettres humaines ou de jurifprudence. Enfin l'empereur VaSe r. 18.6. 19. lens étendit fa precaution, jusques à faire mourir plufieurs perfonnes confiderables, dont le nom commençoit par les deux fyllabes fatales Theod, c'eft-à dire les Theodores, les Theodofes, les Theodotes, les Theodules:

&

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