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Il reconnoît

que

fes auditeurs n'avoient point de part AN. 3875 à ces défordres; mais il les exhorte à en corriger les

autres.

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Flavien à C. P

Cependant l'évêque Flavien étoit arrivé à C. P. Quand il fut entré dans le palais, il fe tint loin de l'empereur fans parler, baissant la tefte, & fe cachant le visage: comme s'il eût été feul coupable du crime d'Antioche. Hom. 20. p. 226, L'empereur s'approcha de lui, & fans témoigner de colere lui reprefenta les graces qu'il avoit faites à la ville d'Antioche, pendant tout le tems de fon regne: ajoûtant à chaque bien fait qu'il racontoit: Eft-ce donc là leur reconnoiffance? Quelle plainte peuvent-ils faire contre moi? & pourquoi s'en prendre aux morts ? N'aije pas toûjours preferé cette ville à toutes les autres, même à celle de ma naiffance ? & n'ai-je pas continuellement témoigné le defir que j'avois de la voir ? Alors l'évêque gemiffant amerement, & redoublant fes larmes: Seigneur, dit-il, nous reconnoissons l'affeЄtion que vous avez témoignée à nôtre patrie; & c'eft ce qui nous afflige le plus. Ruinez, brûlez, tuez, faites ce qu'il vous plaira, vous ne nous punirez pas encore comme nous le meritons : le mal que nous nous fommes déja fait eft pire que mille morts. Car qu'y a-t-il de plus amer, que d'être reconnus à la face de toute la terre pour coupables de la derniere ingratitude? Les demons ont tout mis en œuvre, pour priver de vôtre bien-veil Fance cette ville, qui vous étoit fi chere. Si vous la ruinez, vous faites ce qu'ils defirent: fi vous lui pardonnez, vous leur ferez fouffrir le fupplice le plus rigoureux. P.215 Vous pouvez en cette occafion orner vôtre tefte d'une couronne plus brillante que celle que vous portez : puifque vous la devez en partie à la generofité d'un autre au lieu que cette gloire fera le fruit de vôtre Yyy iij

AN. 387.

feule vettu. On a renversé vos ftatuës: mais vous pouvez en dreffer de plus précieuses dans le cœur de vos fujets, & avoir autant de ftatues qu'il y aura jamais d'hommes fur la terre. Enfuite il lui rapporta l'exemple de Conftantin, qui ne fe vangea de ceux qui avoient jetté des pierres à fa ftatuë, qu'en portant la main à fon L. 6. 7. 8. C.Th. vifage, & difant qu'il n'en avoit rien fenti; il allegua à Theodofe fes propres loix, pour délivrer à pâque les prifonniers ; & cette belle parole qu'il avoit ajoûtée : P. 230. Plût à Dieu que je puffe auffi reffufciter les morts? Vous le pouvez maintenant, continua Flavien, & vous refsusciterez toute la ville d'Antioche. Elle vous aura plus d'obligation qu'à son fondateur: plus que fi vous l'aviez délivrée, aprés avoir été prife par des barbares.

de indulg. crim.

Confiderez qu'il ne s'agit pas feulement ici de cette ville, mais de vôtre gloire, ou plûtôt de celle du chriftianisme. Les Juifs & les payens font informez de cet accident, & vous regardent attentivement. Si vous fuivez la clemence, ils fe diront les uns aux autres : Voïez quelle eft la force de la religion Chrétienne : elle a retenu un homme, qui n'a point d'égal sur la terre, & lui a infpiré une fageffe, dont un particulier ne feroit pas capable. Affurément le Dieu des Chrétiens eft grand, P.231. puis qu'il éleve les hommes au deffus de la nature. Et n'écoutez point ceux qui diront que les autres villes en feront plus infolentes. Vous le pourriez craindre, fi vous pardonniez par impuiffance mais ils font déja morts de peur, & n'attendent à tous momens que le fupplice. Si vous les aviez fait égorger, ils n'auroient pas tant fouffert. Plufieurs ont été la proie des beftes farouches, en fuïant dans les deferts: d'autres ont passé les jours & les nuits cachez dans les cavernes : non feulement des hommes, mais des petits enfans & des fem

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mes nobles & délicates. La ville eft reduite en un état AN. 387. pire que la captivité : tout le monde le fait, & vous ne donneriez pas un fi grand exemple aux autres en la renverfant de fond en comble. Laiffez là donc deformais un peu refpirer; il eft facile de punir quand on eft le maître, mais il eft rare de pardonner.

Quelle gloire pour vous, quand un jour on dira qu'une P. 23z. E: fi grande ville étant coupable, tout le monde épouvanté, les gouverneurs, les juges, perfonne n'ofant ouvrir la bouche; un feul vieillard revêtu du facerdoce de Dieu, s'est montré & a touché le prince, par sa seule presence & par fon fimple discours! Car nôtre ville, Seigneur, ne vous fait pas peu d'honneur, en me chargeant de cette députation; puifqu'elle juge, que vous estimez plus que P. 133 tout le refte de vos fujets les prêtres de Dieu, quelque méprifables qu'ils foient. Mais je ne viens pas feulement de la part de ce peuple ; je viens de la part du maître des anges, vous déclarer, que fi vous remettez aux hommes leurs fautes, vôtre pere celefte vous remettra aussi vos pechez. Souvenez-vous donc de ce jour où nous rendrons tous compte de nos actions. Songez que fi vous avez quelques pechez à expier, vous le pouvez fans aucune peine en prononçant une parole. Les autres dépu→ tez vous apportent de l'or, de l'argent, des prefens: pour moi je ne vous offre que les faintes loix, vous exhortant à imiter notre maître, qui ne laiffe pas de nous combler de ses biens, quoique nous l'offenfions tous les jours. Ne trompez pas mes efperances & mes promeffes; & fachez que fi vous pardonnez à notre ville, j'y retournerai avec confiance; mais fi vous la rejettez, je n'y rentrerai plus, je la renoncerai pour ma patrie.

VI. Theodofe pare

Flavien ayant ainfi parlé, Theodofe eut peine à retenir fes larmes, & dit : Qu'y a-t-il de merveilleux ; fi nous donne à Antioche pardonnons aux hommes, nous qui ne sommes que des

AN. 387,

P. 234.

hommes, puifque le maître du monde eft venu fur la terre, qu'il s'eft fait esclave pour nous ; & qu'étant crucifié par ceux qu'il avoit comblez de graces, il a prié fon pere pour eux? Flavien vouloit demeurer à C. P. & celebrer la pâque avec l'empereur; mais l'empereur lui dit : Je fai que vôtre peuple eft encore dans l'affliction : allezles confoler. Flavien insistoit & prioit Theodose d'y envoyer fon fils; mais il lui répondit: Priez Dieu d'ôter ces obftacles & d'éteindre ces guerres, & j'irai moi-même. L'empereur fit auffi réponse à la lettre des moines Theod. v. hift. c. d'Antioche, que Cefarius avoit apportée ; & fembla chercher à se justifier envers eux. Les payens voulurent avoir part à l'honneur de cette reconciliation, & ils l'attribueLiban. or.12. init. rent à l'éloquence du fophifte Libanius. En effet, il alla Zef. lib. 4. p. 766. à C. P. malgré fon grand âge, & se presenta à l'empereur, non comme deputé du fenat d'Antioche, ainfi que pretend Zofime; mais comme il dit lui-même, de fon chef, fans être envoyé de perfonne. Nous avons quaOr. 12, 13. tre harangues qu'il fit en cette occafion; deux à l'empereur Theodofe, la premiere pour lui perfuader de pardonner à Antioche, la feconde pour le remercier de l'avoir fait : deux à la louange des deux commissaires de l'empereur Cefarius & Hellebicus.

20,

Or. 20. 21. Chryf. hpm, 20. P. 234.

Aprés que l'évêque Flavien fut parti, & qu'il eut pasfé le détroit, Theodofe envoya favoir s'il fe preffoit de retourner à Antioche; craignant qu'il ne s'arrêtât en chemin,& qu'il ne celebrât ailleurs la pâque. Flavien ne perdit point de tems, mais auffi il ne fe piqua pas de porter le premier à Antioche cette heureufe nouvelle; il envoya devant des couriers, qu'il chargea des lettres de l'empereur. A cette nouvelle, le peuple d'Antioche orna de feftons la place publique, alluma des lampes, celebra cette fête, comme la naiffance

de

de leur ville. Flavien eut la joie en arrivant, de retrou- Ibid. p. 225. ver en vie fa fœur qu'il avoit laiffée à l'extrémité, & de celebrer la pâque avec fon troupeau. Au refte, il ne s'attribuoit rien de cet heureux fuccés ; & quand on lui demandoit comment il avoit fait pour appaifer l'empereur, il difoit: Je n'y ai rien contribué; c'eft Dieu qui lui a attendri le coeur; il s'eft appaifé de lui-même P. 216. A avant que j'euffe ouvert la bouche ; & il a parlé de ce qui s'eft paffé auffi tranquillement, que fr un autre avoit été offenfé. Tel fut l'évenement de la fédition d'Antioche.

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VII. Commencement

de S. Chryfofto

me.

• Pallad dialog.

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Socr. VI. 3.

Soz. VIII. 2.
Chryfoft. Sacerd.

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S. Jean Chryfoftome qui confola tant de peuple encette occafion, avoit environ quarante ans, étant né vers l'an 347. à Antioche même, d'une famille noble & qui avoit fervi avec honneur dans la compagnie des officiers du maître de la milice d'Orient. Ses parens étoient Chrétiens; fon pere se nommoit Second, & fa mere Anthuse: ils eurent deux enfans, une fille & ce fils, qui reffembloit parfaitement au pere, & dont la phyfionomie étoit noble & genereuse. Peu de tems aprés fa naiffance, Second mourut, n'ayant vêcu que deux ans avec fon époufe qui n'en avoit alors que vingt; & paffa le refte de fes jours en viduité. Jean étant né avec un efprit excellent, s'appliqua à l'étude des lettres; il fut difciple du fophifte Libanius & du philofophe Andragathius, il plaida quelques causes, & fit des difcours que Libanius même admiroit ; & ce fophifte dit Ap. Ifid. Peluf en mourant, qu'il eût choifi Jean pour fon fucceffeur, fi les Chrétiens ne lui euffent enlevé. A l'Age de dix-huit ans, il se dégoûta de la vanité des reteurs & de l'injuftice des tribunaux, & s'appliqua à l'étude des faintes lettres. S. Melece qui gouvernoit alors l'églife d'Antioche, voyant le beau naturel de ce jeune homme, lui Tome IV.

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2. Epist.

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