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Allemagne. Or, dit-il, on n'y trouve point de ces infectes; d'où il conclut de la forte: tam ipfos quam alios deceptos fuiffe autumo, dum locuftas cicadas effe vulgari errore crederent.

Cette méprife aura fait commettre une erreur dans la compofition de quelques remedes pris de cet animal, fur tout dans le diateltigon que Etius recommande dans les maladies des reins.

On ne doit pas prendre à la lettre ce que dit Ifidore, & que l'on foutient encore aujourd'hui, que les cigales viennent de cette rofée ou exudation écumeufe que l'on trou ve en Angleterre vers la fin de May, fur les plantes, & principalement fur les branches du romarin & de la lavende. Car ce n'eft pas de cette rofée que fe forme la cigale; mais il eft certain qu'il en fort une efpéce de fauterelle qui n'eft d'abord qu'un petit infecte d'un verd pâle, & qui reffemble en tout à la fauterelle.

Enfin le nom de fauterelle ne convient point à la cigale ; car dans celle-ci les organes ne font pas formés pour le faut, & fes jambes de derriere ne fçauroient s'étendre autant qu'il lui feroit néceffaire pour s'élancer & avancer en fautant. C'est pourtant ce que l'on remarque dans la fauterelle; fes jambes de derriere font plus longues que tout fon corps, & forment aux fe

conds articles des angles aigus fort élevés au deffus du dos.

On peut d'abord attribuer cette méprise au defaut de notre langue; car cet infecte ne fe trouvant point dans nos climats, fon veritable nom nous a échapé, & nous avons donné un nom commun à des animaux d'efpéce differente; au lieu que les autres nations ont deux noms diftinctifs pour ces deux efpeces. Les Italiens nomment l'un cicada, les Espagnols cigarra, & les François cigale, noms conformes à l'original, & qui diftinguent bien cet infecte des fauterelles; au lieu que notre mot est emprunté du Saxon grashop, & que nos ancêtres l'ont également adopté aux cigales, fans en avoir jamais vû.

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De la figure du ferpent qui tenta Eve.

Ien n'eft plus ordinaire que de voir

R dans les tableaux qui representent le

paradis terreftre, & la chute du premier homme,le ferpent qui le tenta, dépeint avec une face humaine, à peu près comme Cadmus & fa femme dans l'instant de leur métamorphofe. Or ceci ne doit pas être entierement imputé à l'imagination du peintre, mais à une vieille tradition rapportée par Bede & beaucoup d'autres auteurs. Cette

tradition porte que Satan ne fe montra point à Eve fous la fimple forme d'un ferpent, mais avec la tête d'une vierge, afin de préparer une entrée plus facile à fes difcours féducteurs. Cependant on doit rejetter cette tradition, & il est plus raisonnable de croire qu'il fe prefenta fous fa

forme naturelle.

I

Car 1° la figure humaine, fuivant la remarque de Barcephas & de Piérius ne lui eut pas été favorable. Eve à la vue d'une troifiéme créature humaine eût été frapée d'étonnement, elle auroit conçu quelque foupçon de l'artifice, & fe feroit du moins excufée de s'être laiffé perfuader par fon femblable, comme Adam le fit avec moins de fondement

2° La forme du ferpent n'étoit fujette à aucun inconvenient, & ne devoit point l'empêcher de réuffir. On s'imagine qu'elle devoit en être effrayée & le fuir plus tôt que d'en approcher. Mais on fe trompe. Dans le paradis & dans l'état d'innocence nulle créature ne devoit infpirer de la terreur à l'homme, & ce ne fut qu'après fa chute qu'elles purent lui nuire. Il fe pouroit même que Satan eût emprunté la forme du bafilisc, comme l'a crû Ergubinas, fans que l'on doive craindre qu'Eve fûr morte à fon aspect. Car les animaux en les fuppofant malfaisans ne pouvoient pas

plus leur nuire dans le jardin de délices, qu'ils nuifirent à Noé dans l'arche; & s'ils fe nuifirent entr'eux, au moins comme ils avoient reçû paifiblement leurs noms, ils continuerent à être doux & traitables pour l'homme. Et s'il eft vrai, fuivant l'opinion la plus générale, qu'il n'y en eût d'abord que deux de chaque efpece, il leur étoit difficile de fe détruire, ou de nuire à l'homme; en fe détruifant ils auroient rendu inutile le commandement de la multiplication, & gâté l'ouvrage de la création. Ainfi fuppofé queCaïn fût le premier fils d'Adam, c'est par lui que le meurtre devint poffible. Car auparavant ni le ferpent, ni Adam ne pouvoient tuer Eve, & Adam & Eve ne pouvoient mutuellement s'ôter la vie, parce qu'ils auroient renversé le but de la création, & qu'ils auroient obligé le Créateur à recommencer l'ouvrage du fixième jour.

Mais comme on pourroit, à caufe de l'entretien qu'eut le ferpent avec Eve, s'imaginer que Satan prefera la forme humaine à celle du ferpent; on peut répondre que fi dans la fuite il a pû tirer des fons articulés du ventre de fa pythoniffe, & d'un chêne même à Dodone, il ne lui fut pas impoffible alors de faire parler un ferpent.

Enfin, fi l'on fe perfuadoit que la for

me humaine convenoit davantage au deffein de Satan, parce qu'il eft probable qu'Eve devoit être furprise d'entendre parler un ferpent, je répons qu'elle pouvoit encore ignorer que ce fût un privilege de l'homme. Car nouvellement fortie du néant, & deftituée d'experience, elle put n'en être point furprise. D'ailleurs, comme elle ignoroit les noms des animaux, elle pouvoit ignorer auffi leurs facultés, car elle n'étoit point à la revue générale des animaux, lors qu'Adam leur impofa à chacun des noms fuivant leur nature.

Et ce fentiment ne m'eft pas particuler; c'est encore celui de Lombard & de Toftat, & c'est ce que répondit faint Cyrille à l'objection de l'empereur Julien qui comparoit cette hiftoire aux fables grecques,

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Des tableaux qui representent Adam & Eve avec des nombrils.

N peut remarquer encore une autre faute dans les tableaux qui repréfentent nos premiers parens; c'eft qu'on leur donne un nombril comme à leur pofterité. Les plus grands peintres comme Raphael, Michel Ange ont commis cette faute, qu'on ne peut leur pardonner, parce qu'il fuivroit de là que le Créateur auroit donné

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