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fe font écoulés depuis le deluge d'Ögygés jufqu'à la premiere olympiade, laquelle tombe fur l'année du monde 3174, au tems à peu près du prophete Ifaïe, & environ vingt ans avant la fondation de Rome. Ils appelloient cet âge uxor ou fabuleux, parce que les commencemens fur tout en font mêlés de fables. On a des hiftoires abregées de ces tems dans les auteurs dont nous avons parlé, & fur tout dans Herodote, Diodore de Sicile, Troge Pompée &c. Les plus celebres poetes grecs vécurent dans cet âge; tels font Orphée, Linus, Homere, Hefiode. Ce fut auffi l'âge des auteurs des fables poetiques, lesquelles furent copiées par des hiftoriens ce qui jetta une grande confufion dans les memoires des égyptiens & des chaldéens, auxquels ils ajouterent ces tiffus fabuleux.

Le troifiéme âge qu'ils faifoient defcendre jufqu'à leur tems, ils l'appelloient hiftorique, parce que les faits y font plus conformes à la verité; & par cette raison ils meritent plus de créance. C'eft dans cet âge qu'ont écrit Herodote, Thucydide, Xenophon, Diodore &c. & ceux qui en ont écrit des hiftoires univerfelles ou chronologiques, font Eufebe, Julien l'africain, Orofe, Adon de vienne, Scot, Carion, Pineda, Salien, & parmi les anglois le chevalier Walter Raleigh.

Or des premiers tems dont nous aurions befoin de connoître l'hiftoire, il ne nous refte que quelques fragmens peu confiderables, & qui ne peuvent nous être ici d'aucun fecours.

Les auteurs du fecond âge n'ont point un rapport immediat à notre fujet ; cependant nous ferons obligés de nous en fervir, parce que cet âge a quelque liaison avec le premier, & qu'il y peut répandre de la lumiere.

Pour les auteurs du troifiéme âge il eft évident que nous ne pourrons en tirer aucun fecours, non plus que de ceux qui de nos jours ont auffi écrit du premier, comme tous les chronologiftes..

Je dis le même à peu près des livres faints. Nous n'avons fur ces premiers tems que la narration de Moyfe, laquelle eft très fuccincte, & ne peut, ce femble, nous mettre en état de rien établir de certain. Nous n'y trouvons que deux genealogies, celle de Caïn, & celle de Seth. Il ne nomme que dix generations de celle-ci, & fept feulement de celle de Caïn; encore ne parlet'il que des defcendans en ligne directe. Lamech eft le feul dont il nomme les femmes, le fils & la fille. Cependant fi l'on examine bien la narration de Moyfe; fi l'on fait attention aux confequences qui en peu vent refulter, on aura des argumens affés

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forts pour prouver que la terre étoit bien peuplée & habitée au loin avant le deluge. Nous n'employerons, au refte, que les preuves qui font manifeftement contenues dans les livres faints, comme la longue vie des hommes qui vivoient avant le deluge, & le tems qui s'eft écoulé depuis la création jufqu'au deluge.

Nous demandons d'abord qu'on nous accorde que bien que Moyfe ne nomme qu'un petit nombre de perfonnes, nous devons préfumer qu'il y en avoit un plus grand, & que quand il ne nomme que dix perfonnes dans la genéalogie de Seth, nous ne devons pas nous imaginer qu'il n'ait point eu en effet d'autres defcendans. Les livres faints ne s'attachent bien précisément qu'à la race d'où les juifs, & par eux le Meffie devoient fortir, Ils commencent cette genéalogie par Noé, & la conduisent jusqu'à J. C. Or il eft clair que cette race contenoit un bien plus grand nombre de perfonnes que celles qui font nommées; car il eft dit d'eux tous qu'ils engendrérent des fils & des filles. Et quoiqu'on life qu'ils étoient déja avancés en âge quand ils engendroient, les perfonnes nommées les plus jeunes d'entr'eux ayant alors plus de 65 ans, cela ne prouve point qu'ils n'euffent pas eu des enfans auparavant, cela prouve feulement qu'ils n'en avoient point d'autres de qui

les juifs duffent defcendre. Car avant qu'il foit dit qu'Adam engendra Seth à l'âge de 130 ans, Moyfe avoit déja dit que Caïn avoit connu fa femme, laquelle apparemment étoit fille d'Adam, & qu'il en avoit eu un fils. Ainfi nous pouvons raifonnablement conclurre qu'il y avoit déja un certain nombre d'hommes fur la terre, lorfque Caïn tua fon frere Abel'; & l'on ne doit point aggraver fon crime par la raifon qu'ils n'étoient encore que quatre, comme on le fait communément, & de ce dit Adam à l'occafion de la naiffance de Seth, Dieu m'a fufcité une autre lignée à la place d'Abel, on ne doit pas en conclure que depuis la mort d'Abel il n'avoit point eu d'enfans; cela fignifie feulement qu'ils n'étoient pas deftinés à être la race fainte d'où fortiroit le Sauveur du monde, l'antitype d'Abel.

que

La premiere preuve fur laquelle nous établiffons notre opinion que la terre étoit bien peuplée avant le deluge, c'eft la longue vie des premiers hommes, laquelle s'étendoit depuis fix jufqu'à sept ou huit & même neuf cens ans. Et pour concevoir combien cette longue vie devoit contribuer à la propagation des hommes, il ne faut que refléchir fur les deux caufes ordinaires & principales de la multiplication de toutes les efpeces; l'une, que plufieurs

animaux foient produits à la fois, ou, ce qui revient au même, que leur production foit frequente dans une vie courte; l'autre une longue vie, qui leur donne occafion de multiplier par eux-mêmes leur efpece, & de la voir multiplier encore par ceux qui fortent d'eux.

Nous rangerons dans la premiere claffe tous les animaux qui fe reproduisent par des œufs, comme les oifeaux & les poif fons; ceux qui fe reproduifent par des vers, comme les mouches, les fauterelles &c, ceux encore qui fe reproduifent par leurs femblables, comme les lapins, les chiens, les cochons &c. On voit un exemple remarquable de la multiplication de ceux-ci dans ce troupeau de Galilée dont l'évangile fait mention; & par rapport aux lapins, Athenée nous apprend qu'une feule paire, laiffée dans une desCyclades nommée aujourd'hui Stampalia, en produifit un fi grand nombre, que les habitans furent obligés de confulter l'oracle de Delphes pour apprendre un moyen de les détruire.

D'autres font dédommagés de cette fe condité par la longueur de leur vie. Pour fe convaincre de cette verité, on n'a qu'à jetter les yeux fur ce qui arrive aux animaux bifulques, comme les chameaux & les bœufs. On tue de ceux-ci plus d'un million chaque année en Angleterre. Il est

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