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cap des aiguilles en Afrique; Maurolycus des côtes de la Morée en Europe, & Gilbert du milieu des grandes terres dans la plus grande partie du globe.

ILY

CHAPITRE VII I.
Du Nil.

y a plufieurs opinions reçues par rapport au Nil, lefquelles meritent nos réfléxions. On croit communément que ce fleuve fe décharge dans la Mediterranée par fept embouchures; mais les anciens ne deposent point unanimement de ce fait, & les voyageurs modernes femblent prou

ver le contraire.

Certains auteurs de l'antiquité qui devoient être plus inftruits fur cet article, n'en font aucune mention. Homere par exemple n'a point limité le nombre de fes branches; Eratofthene n'en parle point dans fa defcription de l'Egypte. Ariftote s'exprime d'une maniere fi confufe au premier livre de fes meteores, que l'on ne peut rien déterminer par les chofes qu'il en dit : l'Egypte que nous regardons comme le pays du plus ancien peuple de la terre, ne fut d'abord autre chofe, dit cet auteur, que des terres enlevées à la mer par des digues qui arrêterent les boues que le Nil entraînoit. Ariftote eft dans le même fentiment par rapport aux

palus

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Palus Mæotides; il dit que de fon tems les débordemens du Tanais leur avoient beaucoup ôté de leur pronfondeur, & qu'il ne doutoit pas qu'un jour ils ne deviffent terre ferme. Sa conjecture n'eft pas encore verifiée; mais cela même eft arrivé à une branche de l'Euphrate, l'une des quatre qui arrofoient le jardin d'Eden. Elle portoit autrefois, fes eaux dans la mer Perfique, & maintenant elle fe perd dans les marais de Chaldée, car telle est la vaste distance qu'elle a laiffé entre la mer Perfique & fon embouchure.

D'autres qui ont écrit exprès fur cette matiere ne font pas d'acord entr'eux. Herodote nomme dans fon euterpe fept bouches du Nil, mais il y en a deux, l'embouchure bolbitine, & l'embouchure bucolique qu'il croit l'ouvrage de l'art, & faites à l'occafion de quelques befoins. Strabon en compte jufqu'à quinze. Il y a, dit-il, plufieurs villes confiderables fur ces canaux ou branches du Nil, celles principalement qui ont donné le nom à fes embouchures, non pas à toutes, toutes, car il y en a onze, & quatre autres encore, mais feulement aux fept principales qui font : Canopicum, Bolbitinum, Selenneticum, Sebenneticum, Pharniticum. Mendefium, Taniticum, & Pelufiacum. Il faut obferver ici qu'une de ces fept eft un canal artificiel nommé par Herodote. PtoTome II.

lomée qui étoit né à Pelufe, en compte neuf dans fa geographie, & dans la troifiéme carte qu'il donne de l'Afrique, il les nomme ainfi, Heracleoticum Bolbitinum, Sebenneticum, Pineptum, Diolcos, Pathmeticum, Mendefium, Taniticum, Pelufiacum ; & il y en a trois qui font nommées autrement par Pline. Il refulte de ces varietés que Magina eu raifon de dire: Dé oftiorum Nili numero & ominibus valde antiqui fcriptores difcordant.

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Les geographes & les voyageurs modernes en diminuent beaucoup le nombre; & Guillaume de Tyr avoit déja observé il y a plufieurs fiécles qu'il ne s'en trouve plus que trois ou quatre. Car au deffous du Caire le Nil fe partage en quatre bran ́ches dont celle de Damiette, & celle de Rofette font navigables; les deux autres, dit Sandys voyageur Anglois très curieux, font peu confiderables, & coulent entre les deux que j'ai nommées. Or, dit Sandys, des fept branches que cite Herodote, & des neuf dont parle Ptolomée voilà celles que j'ai pu découvrir, ou dont j'aye entendu parler. Par là eft verifié le témoignage de l'évêque de Tyr, homme fort curieux, & témoin oculaire, qui dans fa guerre fainte s'exprime en ces termes : Nous Jommes très furpris que les anciens ayent donné fept embouchures au Nil & nous ne pouvons concilier leurs relations avec la verité, qu'en difam

qu'avec le tems la face des chofes a changé, & que plufieurs de ces canaux fe font remplis, autrement ils n'ont jamais été bien inftruits fur cet article. Si ce paffage d'Ifaye: Le Seigneur rendra deferte la langue de la mer d'Egypte, il élévera fa main fur le fleuve, il l'agitera de fon foufle puissant; il le frapera & le divisera en sept ruiffeaux, enforte qu'on pourra le passer à pied; fi ce paffage, dis-je regarde la riviere du Nil, il ne peut s'entendre que de fes fept branches capitales; mais ce paffage eft obfcur, & de ce qui fuit: Le refte de mon peuple qui fera échapé des mains des affyriens y trouvera un paffage, comme Ifrael en trouva un dans la mer, lorfqu'il fortit de l'Egypte, on peut conclure qu'il regarde l'Euphrate; & cela d'autant mieux que fuivant la remarque de Grotius le mot fleuve étant feul fignifie ordinaire. ment l'Euphrate, enforte que ce peut être ici une prédiction du partage de l'empire d'Affyrie en plufieurs royaumes, ce qui devoit contribuer au retour des juifs dans leur patrie, felon la remarque du même Grotius, & ce qui paroîtra encore plus clairement, fi l'on convient que les paffages d'Edras 2, 13, 43, 47, & de l'Apocalypfe

16, 22, y ont rapport.

Enfin quelqu'ait été le nombre de ces branches, les geographes ne font d'acord fur ce point ni entr'eux, ni avec eux-mêmes. Quoique Ptolomée en ait marqué neuf,

Hondius en met dix dans fa carte géne rale de l'Europe, & dans fa carte de l'Afrique il n'en marque que huit. Ortelius. n'en met pas davantage dans fa carte de l'empire Turc, mais on en compte onze dans fa carte particuliere de l'Egypte; & Magin dans fa carte du même pays en met pareil nomdre. Si nous entrions dans un plus grand détail, nous trouverions dans les autres la même variation.

Dans ces contrarietés, il femble que nous devions également nous défier & des anciens & des modernes. Si nous regardons comme autant de bouches du Nil tous les canaux de ce fleuve, il y en avoit plus de fept; fi nous ne recevons que les bran ches naturelles, il y en avoit moins ; mais quelque parti que nous prenions, nous trouverons toujours des contradictions. C'eft donc fans fondement que les orateurs & les poetes tirent des comparaifons éternelles du nombre fixe de ces embouchures.

C'est une autre opinion reçue par rap port au Nil, qu'il eft le plus grand fleuve de la terre, & qu'il eft appellé par cette raifon le pere des fleuves, ou, comme l'appelle Ortelius, le plus grand de tous les fleuves. Mais fi cette opinion étoit con forme à la verité, combien de cartes à redreffer, & que deviendroient les meilleures xelations Selon plufieurs cartes de l'A

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