Imágenes de páginas
PDF
EPUB

voit encore des exemples d'armoiries plus anciens que ceux des tribus d'Ifrael, fi Ofiris, Mitzraim ou Jupiter furent les fils de Cham; puifqu'au témoignage de Diodore ils porterent pour armes diftinctives l'un un chien, l'autre un loup. Et fans parler du bouclier d'Achille & de ceux des grecs illuftres, fi nous adoptons la conjecture de Voffius, qui dit que le corbeau qui parut fur la tête de Corvinus n'étoit autre chofe que le cimier de fon cafque nous aurons une preuve de l'antiquité des armoiries chés les Romains,

Mais nous ouvririons une bien plus ample carriere, fi nous fuivions la doctrine des cabaliftes. Ils plaçoient dans chacune des quatre bannieres ou étendards une lettre du tetragrammaton; & donnant un fens myfterieux aux enfeignes, ils font convenir chacune des tribus aux fignes du zodiaque, & aux mois de l'année, comme ils adaptent les quatre bannieres génerales de Juda, de Ruben, d'Ephraim & de Dan aux fignes du belier, du cancer, de la balance, & du capricorne, qui font les quatre points cardinaux du zodiaque & qui marquent les quatre faifons de l'année.

L

CHAPITRE XI.

De la reprefentation des fibylles.

Es tableaux qui reprefentent les fibylles font très communs, & les chrétiens en font cas à caufe de leurs prétendues prédictions touchant le Sauveur. On les peint jeunes, & l'on en détermine le nombre. Les tableaux ordinaires en prefentent douze. Il y a des auteurs qui n'en comptent que dix, fondés fur un paffage de Varron: & ce font la fibylle de Delphes, celle de Cumes, celle de Samos, la fibylle Erithreênne, la Cimmerienne, l'Hellef pontique, la Libyque, la Phrygienne, la Tiburtine, & la fibylle Perfique. Surquoi les fçavans font partagés, les uns en comptant un plus grand nombre, les autres un moindre, & la plûpart croyant qu'il eft impoffible de rien déterminer fur cet article. Boifard a donné dans fon traité de la divination les figures de ces dix fibylles. Mais il en ajoute deux autres, celle d'Epire', & celle d'Égypte. Il y en a même qui affurent que le nom de fibylle a été donné à toutes les propheteffes,

D'autres en réduisent le nombre. Martianus Capella n'en reconnoit que deux; Pline & Solin en comptent trois; Elien quatre, & Saumaife n'en recoit propre

ment

ment que fept.. Voici comme il s'explique dans fes commentaires fur Solin: Ridere licet hodiernos pictores qui tabulas proponunt Cumane, Cumaa, & Erythrae, quafi trium diverfarum fibyllarum, cum una eademque fuerit Cumana, Cumaa, Erythraa, ex plurium & doctiffimorum auctorum fententia. Boifard même nous permet de croire qu'il n'y en a eu qu'une, lorfqu'il conclut de la forte: In tanta fcriptorum varietate liberum relinquimus Lectori credere, an una & eadem in diverfis regionibus peregrinata, cognomen fortita fit ab iis locis ubi oracula reddidiffe comperitur, an plures extiterint. Ainfi quand les meilleurs auteurs n'ofent prononcer fur le nombre des fibylles, devons-nous nous en rapporter au caprice des peintres ?

Mais l'hiftoire n'eft guere plus favorable à leur jeuneffe. La fibylle dont parle Virgile eft appellée longava facerdos, & Servius charge encore ce portrait dans fes commentaires. La fibylle qui vendit fes livres à Tarquin, & dont nous avons le détail le plus circonftancié, Tite-Live & Aulugelle la nomment anus: mot qui fuivant létymologie de Feftus defigne une femme accablée d'ans & qui radote ; & au témoignage de l'histoire, Tarquin crut qu'elle radotoit. Il faut donc avouer que les peintres fe donnent de grandes libertés. En vertu de ce même privilege ils pourTome II.

ront quand il leur plaira peindre Neftor comme Adonis, Hecube femblable à Helene, & Saturne avec la tête d'Abfalom. Le celebre Michel-ange a évité cette ab furdité dans fon tableau des fibylles de, Cume & de Perfe, comme on les voit dans les tailles douces d'Adam Mantouan,

CHAPITRE

XII.

Des tableaux qui reprefentent la mort de Cléo

L

patre.

Es tableaux qui reprefentent Cléopatre tenant deux afpics attachés à fes. bras, ou à fa gorge, ou à ces deux enfemble, meritent que nous nous y arrêtions. Outre que cette diverfité n'eft pas excufable, on ne fçait pas bien précisément quel fut le genre de fa mort. Plutarque dit nettement dans la vie de Marc-Antoine qu'aucun homme n'a fçû comment elle étoit morte, car quelques-uns ont affuré qu'elle avoit pris du poifon dont elle avoit coutume de porter dans fes cheveux. Dailleurs on ne trouva point d'afpics dans l'endroit. où elle mourut avec deux de fes femmes. On dit feulement alors qu'on lui avoit remarqué au bras deux piqures imperceptibles: & c'est ce qui donna lieu à Augufte de hazarder l'idée qui eft devenue populaire fur le genre de fa mort.

Galien contemporain de Plutarque, dit qu'elle fe fit mordre, par un afpic, ou qu'après s'être piquée elle-même, elle distilla du poison dans la playe. Strabon plus ancien qu'eux rapporte qu'elle mourut de la morfure d'un afpic ou d'une pommade empoisonnée.

Nous pourrions encore obferver que l'on reprefente cet afpic beaucoup plus petit que n'eft l'afpic terreftre dont on croit qu'elle fe fervit, & qui a communément quatre coudées de long. On n'eft pas même certain du nombre des afpics. On en peint communément deux ; mais fi nous en croyons Plutarque; Augufte, lorsqu'il triompha, n'en fit mettre qu'un au tour. du bras de la ftatue de Cléopatre. Les deux marques ne prouvent pas qu'il y en eût plus d'un, puifque l'afpic à deux dents; auffi bien que la vipére.

On ignore enfin à qu'elle partie elle appliqua l'afpic; felon quelques-uns ce fut au fein qu'elle l'appliqua,mais Victorius a remarqué que cette opinion n'eft pas conforme à l'hiftoire. La méprise au reste eft excufable; car c'étoit la coutume d'appliquer des afpics au fein des criminels, comme nous l'apprend l'auteur de theriaca ad pifonem, qui l'a vu pratiquer à Alexandrie, lieu où Cleopatre fe donna la mort. Je vis, dit-il, en combien peu de tems

« AnteriorContinuar »