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ces ferpens ôtent la vie ; fi l'on veut faire grace, c'eft-à-dire faire mourir promptement quelqu'un de ceux qui ont été condamnés à cette espéce de mort, on lui applique un afpic fur le fein, on le fait marcher, & la mort fuit immediatement.

CHAPITRE

XIII.
De la reprefentation de plufieurs heros.

LE

Es tableaux qui les reprefentent ont leurs difficultés, & les critiques y trouvent plufieurs chofes à dire. On demande d'abord pourquoi Alexandre eft monté fur un élephant, car on ne lit point qu'il s'en. foit fervi dans les guerres qu'il a faites, ni qu'il en ait jamais monté: au lieu que fon cheval eft celebre dans l'hiftoire, & que le nom de bucephale eft dans la bou che de tout le monde. D'ailleurs il ne donna qu'une bataille remarquable par le nombre des élephans, c'est la bataille où Porus roi des Indes fut vaincu, & dans laquelle felon Plutarque, Q. Curce, Arien, il combattit à cheval. Or s'il eft raisonnable de le peindre monté fur un élephant, parce qu'il a défait une armée où il y en avoit un grand nombre, on pourra à plus jufte titre reprefenter de la forte Judas Machabée, & Jule Céfar fur tout, dont le triomphe éclata par le nouveau fpectacle

des élephans, comme on peut le voir dans la marche décrite par Jacques Laurus, in Splendore urbis antiqua. Suppofé encore qu'en cette journée il ait monté un élephant, il refte à prouver qu'il ait conduit feul cet animal. Car outre le champion qui étoit ordinairement fur le dos de l'élephant, il y avoit toujours une efpece d'écuyer fur fon col, pour le conduire felon les ordres du champion. C'eft ainfi que Porus montoit fon élephant quand il fut bleffé par Alexandre. Et c'est auffi la maniere qui eft décrite au 2 des Machabées. L'élephant portoit une tour de bois qui mettoit les combattans à couvert, & chacune de ces tours contenoit trente-deux hommes fans le conducteur.

On demande encore pourquoi Hector eft representé fur un cheval; car c'étoit l'ufage alors de monter fur un char, & les autres princes troyens qui felon Pline inventerent cette maniere de combattre, le pratiquerent toujours. Diodore de Sicile, confirme la même chofe, & l'illuftre hif torien Walter Rawleigh en donne une femblable defcription. On eftimoit peu la milice qui combattoit à pié legerement armée, & qui éprouvoit d'ordinaire le fort de fes capitaines, lefquels n'étoient point montés für des chevaux, mais fur des chars tirés par deux ou trois chevaux. Telle fut

auffi la maniere de combattre des anciens bretons, ainfi que l'affurent Diodore de Sicile, Céfar & Tacite : d'où quelques au teurs n'ont pas manqué de conclure qu'ils étoient une colonié de troyens.

Enfin, quiconque fera verfé dans la connoiffance de l'antiquité, demandera fans doute pourquoi les chevaux de ces héros, & celui de Céfar principalement font reprefentés avec des felles & des étriers. Peut-être pourroit-on établir l'usage des felles, mais pour l'ufage des étriers Pancirolle a bien prouvé qu'il n'étoit pas connu. Polydore Virgile & Victorius ont fait des traités exprès pour le démontrer, & l'on n'en voit pas le moindre veftige dans les monumens anciens, comme les médailles & les arcs triomphaux des romains. Les latins n'ont pas même de terme pour exprimer la chofe. Ceux de ftaphia, ftapes ou ftapeda ne fe trouvent point dans les bons auteurs ; & ceux que l'on cite ordinairement ou fignifioient autre chose du tems de Céfar, ou font plus niodernes. De là vient, fuivant la remarque de Lipfe, qu'afin qu'une chofe d'un ufage auffi general eût un nom, Philelphe les nommasta. pedas, & Bodinus Subicus pedaneos. Et parce qu'on pourroit regarder ces termes comme anciens, fur ce qu'un des os de l'organe de l'ouie eft appellé ftapes par les anato

miftes, il faut remarquer qu'aucun des anciens, ni Hippocrate, ni Galien n'ont connu cet os; & Laurent nous apprend que Colomb & Ingraffias, l'un Sicilien, l'autre Cremonois, qui vivoient dans le feiziéme fiecle, se font disputé l'honneur de cette découverte.

On peut conclure la même chofe du témoignage de plufieurs bons auteurs. Polybe décrivant la route d'Annibal en Italie, employe le mot staι, c'est-àdire au fentiment de Victorius qu'il avoit fait difpofer de petites hauteurs nommées bemata, afin que fes foldats remontaffent plus facilement à cheval. Plutarque en dit autant dans la vie de Gracchus, Comme il s'étudioit à gagner la bienveillance du peuple, outre qu'il fit mettre des pierres au bout de chaque milliaire, il fit encore placer en de moindres intervalles des efpéces de marches, afin que l'on pût plus commodément monter à cheval. Et fi l'on demande comment on pouvoit y monter fans étriers, Lipfe répond que les perfonnes foibles avoient leurs αναβήχεις ou ftratores qui les aidoient. Telle fut felon Plutarque la maniere de Craffus; celle de Caracalle felon Spartien ; & plus tard encore celle de Valentinien, qui coupa la main droite de fon ftrator, parce que fon cheval s'étant cabré, il ne put le monter.

Mais Vegece dans fon traité de re militari; nous inftruit fuffifamment de quelle maniere ils fautoient fur leurs chevaux ; il nous apprend qu'ils avoient chés eux des chevaux de bois fur lefquels ils s'exerçoient, & devenoient fi habiles, qu'ils montoient en tenant leur épée à la main, fuivant ce vers de Virgile:

Pofcit equos atque arma fimul, faltuque fuperbus

Emicat...

Et cet autre du même poete:
Infrænunt alii currus, & corpora faltu
Injiciunt in equos...

c'eft encore pour cela que Julius Pollux confeilloit de dreffer les chevaux à s'incliner, afin que les cavaliers les montaffent plus facilement. Par là on entend ce qu'Hippocrate dit des Scythes, qu'ils étoient fort fujets à la fciatique, parce qu'ils étoient continuellement à cheval; & ce que Suetone raconte de Germanicus, qu'il avoit les jambes grêles, mais qu'elles groffirent par l'exercice qu'il prenoit à cheval après fes repas ; c'eft que les humeurs defcendoient plus aifément dans ces parties qui n'étoient point foutenues.

Mais, dira-t-on, ces erreurs ne font point importantes,& n'intereffent que foiblement la verité hiftorique. Je répons que la raifon défend d'admettre aucune fauffeté, &

que

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