Ay lû par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux un manufcrit intitulé Effai fur les erreurs populaires, traduit de Anglois; & j'ay crû que cette traduction feroit utile & agréas ble au public. Ce premier Décembre 1731. MOREAU DE MAUTOUR. PRIVILEGE DU ROI. L OUIS, par la grace de Dieu, Roi de France & de Nai varre, à nos amez & feaux Confeillers les Gens tenans nos Cours de Parlement, Maîtres des Requêtes ordinaires de notre Hôtel, Grand Confeil, Prevôt de Paris, Baillifs, Sené◄ chaux, leurs Lieutenans civils & autres nos Jukiciers qu'il ap partiendra, SALUT. Notre bien amé PIERRE WITTE Libraire à Paris, Nous ayant fait remontrer qu'il fouhaiteroit faire im primer & donner au public plufieurs livres qui ont pour titre Effai fur les Erreurs populaires traduit de l'Anglois de Thomas Brovun ; les Oeuvres du Sr. Clermont, contenant fon Arith métique militaire &fa Geometrie pratique pour les Ingénieurs ouvrages en Espagnol, Aventures de Telemaque Vie de Guz man d'Alfarache: Catechisme hiftorique ; l'Imitation de notre Seigneur Fefus-Chrift; Hiftoire de Don Quichotte; S'il Nous plaifoit de lui accorder nos Lettres de privilege fur ce néceffaires, offrant pour cet effet de les faire imprimer en bon papier & en beaux caracteres, fuivant la feuille imprimée & attachée pour modele fous le Contre-fcel des Prefentes: A CES CAUSES, voulant traiter favorablement ledit Expofant, Nous lui avons permis & permettons par ces Prefentes, de faire inprimer lefdits livres ci-deffus fpecifiez, en un cu plufieurs volu mes, conjointement ou féparément, & autant de fois que bon lui femblera, fur papier & caracteres conformes à lad. feuille imprimée & attachée fous notred. Contre-fcel,& de les vendre, faire vendre &débiter par tout notre Royaume, pendant le tems de fix années confecutives, à compter du jour de la date defd. Prefentes. Faifons défenfes à toutes fortes de perfonnes de quelque qualité & condition qu'elles foient,d'en introduire d'impreffion étrangere dans aucun lieu de notre obéiffance: comme auffi à tous Libraires-Imprimeurs & autres, d'imprimer, faire imprimer, vendre, faire vendre, débiter, ni contrefaire aucuns defdits livres ci-deffus expofez, en tout ni en partie, ni d'en faire aucuns extraits fous quelque prétexte que ce foit d'augmentation, correction, changement de titre, même de traduction étrangere, en langue Efpagnole ou autrement, fans La permiffion expreffe & par écrit dudit Expofant, ou de ceur qui auront droit de lui, à peine de confifcation des exemplaires contrefaits, de fix mille livres d'amende contre chacun des con trevenans, dont un tiers à Nous, un tiers à l'Hôtel-Diet: de Paris, l'autre tiers audit Expofant, & de tous dépens, dommages & interêts à la charge que ces Prefentes feront enregiftrées tout au long fur le regiftre de la Communauté des Libraires & Imprimeurs de Paris dans trois mois de la date d'icelJes; que l'impreffion de ces livres fera fiite dans notre Royau me & non ailleurs; & que l'Impétrant fe conformera en tout aux Réglemens de la Librairie, & notamment à celui du dix Avril 1725. Et qu'avant-de les expofer en ventes, les manufcrits ou imprimez qui auront fervi de copie à l'impreffion desd. livres, feront remis dans le même état où les approbations y atront été données ès mains de notre très-cher & feal Chevalier Garde des Sceaux de France le Sieur Chauvelin; & qu'ilen fera enfuite remis deux exemplaires de chacun dans notre Bibliotheque publique, un dans celle de notre Château du Louvre, & un dans celle de notre très-cher & féal Chevalier Garde des Sceaux de France le Sieur Chauvelin; le tout à peine de nullité des Prefentes. Du contenu defquelles vous mandons & enjoignons de faire jouir l'Expofant, ou fes ayans caufe pleinement & paifiblement, fans fouffrir qu'il leur foit fait aucun trouble ou empêchement. Voulons que la copie desdites Prefentes qui fera imprimée tout au long, au commencement ou à la fin defdits livres, foit tenue pour duement fignifiée, & qu'aux copies collationnées par l'un de nos amez & féaux Confeillers & Secretaires, foi foit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huiffier ou Sergent de faire pour l'exécution d'icelles tous actes requis & néceflaires, fans demander autre permiffion, & nonobftant clameur de haro, Chartre Normande & Lettres à ce contraires: CAR tel eft notre plaifir. DONNE' à Verfailles le vingt-feptiéme jour du mois de Novembre l'an de grace mil fept cent trente-deux, & de notre regne le dixhuitiéme. Par le Roi en fon Confeil, FAURSON, Fay affocié pour moitié au droit du prefent Privilege, Monfieur Didot, Libraire à Paris, accordé pour l'Effai fur les erreurs populaires, les Oeuvres de Clermont, le Telemaque, Don Qui chotte, & Don Guzman d'Alfarache en Espagnol, & me fuis réservé le furplus. A Paris ce premier Décembre 1732. WITTE Regiftré ensemble la ceffion fur le regiftre v111. de la Cham bre Royale des Libraires & Imprimeurs de Paris, n. 446. fol. 429. conformément aux anciens Réglemens, & notamment a l'Arrêt du Confeil du 13 Août 1703. A Paris le z. Décembre 1732. G. MARTIN, Syndic. ESSAI SUR LES ERREURS POPULAIRES. LIVRE CINQUIE'ME. De plufieurs chofes douteuses felon qu'elles font reprefentées en des tableaux. CHAPITRE PREMIER. Na coutume de representer le pelican s'ouvrant la poitrine avec le bec, & nourriffant fes petits du fang qui en découle. Ce n'eft pas feulement fur des enfeignes que l'on voit cette reprefentation, on la voit auffi dans les armes de plufieurs maisons. Le fait eft d'ailleurs attefté par plufieurs écrivains,& c'eft pour cela que les Egyptiens ont fait du pelican le fym Tome II. A ole de la charité, & que par cette raifon ils l'ofoient en manger. Mais on ne trouve ien de pareil dans les anciens qui ont écrit 'hiftoire des animaux, comme Ariftote, lien, Pline, Solin &c, bien qu'ils oulient rarement des proprietés de cette nature, & qu'ils fe foient étendus fur des articles moins confiderables. J'avoue pourtant que cette reprefentation n'eft pas fans fondement. Pourquoi refuferoit-on au pelican un caractere fi marqué de tendreffe pour fes petits? Elien parlant des cicognes & de leur affection pour leurs petits qu'elles inftruifent à voler, & qu'elles nourriffent des viandes qu'elles ont été obligées d'avaler pour les apporter, dit en finiffant, que les herons & les pelicans en ufent de même. Pour les témoignages des anciens peres & des auteurs ecclefiaftiques, nous devons plus y chercher des fymboles que des realités. De l'aveu d'Eucherius le pelican eft l'emblême de notre Seigneur. Et peuton prendre dans un autre fens ce que dit S. Jerôme, que lorfqu'il s'apperçoit que fes petits ont été tués par les ferpens, il fe perce le côté, & les reffufcite avec fon fang? Ce qui pouvoit figurer la deftruction de l'homme par le vieux ferpent, & fon rétablissement par le fang de Jefus-Chrift. Nous adopterons en ce fens ce que difent du pelican S. Auguftin, S. Ifidore, Albert le Grand &c. Chés les Egyptiens c'étoit un hierogliphe qui defignoit l'amour paternel, lequel éclate dans le pelican par le foin qu'il prend de fauver les petits, forfque le feu prend à fon nid. Pour ce qui regarde cette effufion de fang, ils n'en difoient rien. Il femble que l'on ait emprunté ce trait du vautour pour l'attribuer au pelican, comme le dit Pierius: Sed quod pelicanum, ut etiam aliis plerifque perfuafum eft, roftro pectus diffecantem pingunt, ita ut fuo fanguine filios alat, ab Egyptiorum hiftoria valde alienum eft; illi enim vulturem tantum id facere crediderunt. Si l'on confidere enfin cette reprefentation par rapport au fens naturel, elle contient des traits qui n'ont aucun rapport au pelican. Au lieu qu'on le depeint verd ou jaune, il eft blancheâtre, excepté le bout de fes aîles qui eft brun. On lui donne la groffeur d'une poule, au lieu qu'il égale toujours, & que fouvent il excede la grof feur d'un cygne. On le reprefente avec un bec court, au lieu qu'il eft large, plat, un peu recourbé. On le peint avec des pieds fendus, comme la plupart des oifeaux, au lieu qu'il eft palmipede comme les cygnes, les oyes, les canards, fuivant l'inftitution de la nature qui donne des nageoires à tous les oifeaux qui ont le bec large & |