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lacs de Zurich & de Délitz. Mais on peut mettre au rang des chofes fort douteufes la propriété qu'on attribue aux eaux du lac de Loxvi dans le même Royaume, lefquelles font fi vertes, qu'elles teignent de cette couleur les draps, le bois, &c. Et on doit hardiment compter au nombre des fables ce qu'on rapporte du lac de Cracovie, & celui appelé Guffer, qui eft en Angleterre. Dans le premier, on dit qu'il paroît plufieurs fpectres qui effrayent les pêcheurs; & que le Seigneur de ce lac ayant voulu s'allurer de leur rapport, y envoya quel ques Eccléfiaftiques munis de bannières, de croix & d'eau bénite, & accompagnés de plufieurs payfans, lefquels y trouvèrent un monftre affreux, qui avoit la tête d'une chèvre avec des yeux étincelans : ce qui donna la fuite à tous ces braves gens, dont les plus pareffeux néanmoins ne fe fauvèrent point fans plaies & boffes, car ils en furent tous couverts.

Le lac Guffer n'a point de fpectres, mais il a un naturel particulier; c'eft l'expreffion des faifeurs de ces contes. Tant que la pêche et permise à difcrétion, le poiffon y eft en abondance; mais auffi-tôt qu'on la défend, le poiffon fe perd, & ne revient point que la défense ne foit levée.

On a débité encore bien d'autres chofes merveilleufes de différens lacs, dont plufieurs font auffi fauffes que celles que je viens de rapporter, & dont quelques-unes, quoique croyables, ne font point affez conftatées. Je. terminerai donc cette hiftoire, des lacs par celle du lac Afphaltite, qui eft digne de remarque

& par fon ancienneté, & par fes qualités ou propriétés différentes.

Ĉe lac appelé la Mer-Morte, eft dans la Palestine ou la Terre-Sainte, Son eau eft fi amère & fi falée, que le poiffon ne peut y vivre. Trois fois par jour il change de couleur, & en quelques endroits il dégorge de la poix noire. Toutes les chofes pefantes qu'on y jette y furnagent. On dit que l'Empereur Vefpafien voulant en faire l'expérience, fit plonger dans ce lac deux criminels liés : ils furnagèrent fur l'eau fans s'enfoncer. Cependant un flambeau qui y furnage allumé, va au fond lorfqu'on l'y jette éteint.

Dans plufieurs endroits de ce lac, on trouve une quantité confidérable de beau fel blanc & une efpèce de pierre fort légère, dont on se fert comme du bois, lequel eft rare dans cette contrée. On affure qu'il ne peut être émeu par aucun vent, & qu'il ne groffit jamais. F. H. de Troylo, qui, l'an 1666, le vifita, a écrit, dans fon Voyage du Levant, qu'on pouvoit le comparer à une gueule de l'enfer; car il paroît toujours noir & fombre, & pouffe continuellement une épaiffe vapeur noire & puante.

Cette mer eft plus falée qu'aucune autre: auffi en retire-t-on une quantité prodigieufe de beau fel, qui fournit en abondance toutes les Provinces d'alentour. C'eft ce que nous apprend l'Auteur du Voyage ci-devant cité, & il ajoute çes paroles remarquables, qui méritent d'être tranfcrites:

De l'autre côté du fleuve du Jourdain, » où il fe jette dans cette mer, vers les fron

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»tières de l'Arabie pierreufe, on voit encore la colonne de fel en laquelle la femme de » Loth fut changée : je ne l'ai pas vue, parce que de mille perfonnes qui font le voyage » de la Terre-Sainte, il n'y en a pas une qui »ose se hasarder d'aller jufques-là, à cause » du danger qu'il y a des Arabes; mais à Jéru» falem & à Bétheléem, de vieilles gens m'ont » affuré que cette colonne y étoit encore toute » entière, & qu'ils l'avoient vue. Cette mer » a, de longueur, treize lieues d'Allemagne & dans fa largeur quatre lieues ».

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ce que

Les anciens Latins nommoient pifcina ce que nous appelons étang. C'eft un petit lac qui n'a point de dégorgement. J'ai dit ci-devant c'étoit que les marais. J'ajouterai ici que les marais des plaines font plus profonds que ceux des vallées; qu'il y a des marais qui femblent n'avoir pas de fond, & qu'on y voit des puits d'une grande profondeur, & d'une eau très-pure.

Sénèque croyoit qu'il y a des lacs, des mers & des rivières fouterrains, & il regardoit la circulation des eaux dans la terre, comme on confidère celle du fang dans l'homme, c'eft-àdire, que de même que le défaut de la circulation de ce précieux fluide dans le corps humain en dérange l'économie, y caufe des maladies, ainfi le cours des eaux fouterraines étant arrêté, donne lieu à des fecouffes, à des tremblemens de terre, & à plufieurs autres accidens. C'eft cette opinion ingénieufe qui peut intéreffer les Phyficiens, mais qui n'ajoute rien à l'histoire de l'Hydrologie que je viens d'écrire.

HISTOIRE

DE LA

BOTANIQUE.

IL N'EST point de substance qui ait autant de propriétés que l'eau. M. Mufchenbrock en compte dix, dont les plus effentielles font qu'elle humecte l'air & la terre par fa circulation, & qu'elle contribue à la production des minéraux, à la confervation de la vie des animaux, & à la végétation de toutes les plantes: elle eft même ici fi nécessaire, que non feulement fans eau aucune plante ne peut exister, mais encore que cet élément forme même leur substance, en laquelle elle fe tranfforme, fi l'on en croit quelques Phyficiens (a). C'est donc à l'eau qu'on doit ce nombre innombrable de plantes qui couvrent la terre, & dont la connoiffance forme cette grande partie de l'histoire naturelle qu'on appelle Botanique.

L'origine de cette fcience fe perd dans les temps les plus reculés. Les premiers peuples du monde ont cultivé les plantes, & les Livres faints nous apprennent que les Hébreux connoiffoient plufieurs de leurs vertus. On leur

(a) Voyez l'hiftoire de l'Eau, dans celle des progrès de l'Esprit humain dans les Sciences naturelles, pag. 81 & fuiv,

en attribuoit même qu'elles n'avoient pas. Perfuadée que la mandragore étoit bonne contre la ftérilité, Rachel demanda avec empreffement à fa fœur cèlles que Ruben avoit apportées. On lit dans l'Ecriture Sainte que Salomon traita de tous les arbres, depuis le cèdre jufqu'à l'hyfope, c'est-à-dire, depuis le plus grand arbre jufqu'à la moindre plante, & que la fageffe ou la fcience de ce Prince furpaffoit celle des Orientaux & de tous les Egyptiens. Cela fuppofe que les Egyptiens étoient verfés dans la Botanique ; & cette fuppofition eft affez probable, puifqu'il eft certain que le peuple étoit habile dans la Médecine; art qu'il n'auroit pas pu pratiquer fans la connoiffance des fimples.

Quoi qu'il en foit, Hercule de Thèbes, ville d'Egypte, enfeigna la Botanique aux Grecs: il donna fon nom à plufieurs fimples, & fit transplanter l'olivier fauvage & le peuplier blanc en diverfes contrées, où ces arbres n'étoient pas connus. Diodore de Sicile (Liv. 5 de fon Hiftoire) prétend qu'Efculape étoit un grand Botaniste : cependant Héfiode, Homère, Métrodore & Hippocrate regardoient Cratérias comme le premier Botanifte. Ariftote, en plufieurs endroits de fes Ouvrages, parle de deux de fes Livres fur les plantes; mais il ne nous en refte que quelques morceaux, qui, suivant l'Auteur de la Famille des Plantes, (M. Adanfon) font déshonorés par l'inepte rempliffage d'un Auteur Arabe trop peu verfe dans la Botanique.

Quelques Savans ont confondu Cratérias

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