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Prefque par-tout la terre labourable eft rougeâtre & mêlée de ces différentes matières : car on ne peut trouver nulle part fur notre globe une terre homogène; toutes font diversement mêlées de particules pierreufes, inflammables & métalliques.

La feconde couche de la terre eft formée de pierres à chaux, de marne, de coquillages, de bancs de terre, compofés d'un amas de coquilles foffiles, qui ont perdu leur vernis, de gravier, de craie & de plâtre. Ces couches font toujours pofées parallélement les unes fur les autres, & les lits ont la même épaiffeur dans toute leur étendue.

En pénétrant plus avant dans la terre, on rencontre, comme au fommet des montagnes, des coquilles, des fquélettes de poiffons de mer & d'animaux terreftres, des plantes marines, &c. Dans certains cantons de la terre, comme en Flandres, dans la Province d'Yorck, &c. on trouve même des arbres en fi grande quantité, & fi proches les uns des autres, qu'ils forment une forêt. Ce font ici des fapins, là des chênes, ailleurs des hêtres, des ifs, des aubépines, des faules, &c. Tous ces arbres paroiffent rompus, & les troncs font féparés de leurs racines, comme des arbres que la violence d'une inondation auroit caffés & emportés, ce qui pourroit bien être la caufe de ce phénomène. Ce qu'il y a de très-probable, c'est que la terre a fubi une grande révolution, qui a beaucoup changé fa compofition primi

tive.

Quoi qu'il en foit, il eft toujours conftant

que le globe de la terre eft rempli de grottes profondes, de divers canaux, par lefquels des eaux coulent & y forment des lacs & même de petites mers, fuivant la grandeur des creux où elles s'arrêtent.

C'eft auffi ce que penfoit Sénèque. Selon cet ancien Philofophe, le globe renferme des antres vaftes, des goufres, des cavernes, des rochers, des plaines, des abîmes, dans lefquels des monta gnes & des villes fe font quelquefois écroulées, lorfque la terre s'eft ouverte enfin il y a dans l'intérieur de la terre, ajoute Sénèque, des vallées remplies par des lacs, & des affemblages d'eaux qui reffemblent à des mers, &c. Les décou vertes ont fi bien confirmé fes conjectures, qu'on doit croire qu'il parloit ainfi avec quelque connoiffance de caufe, & qu'avant lui on avoit déjà pénétré dans l'intérieur de ce globe.

Guidé ou aiguillonné par le récit de ce Philofophe, les Naturalistes modernes, en continuant de fouiller dans cet intérieur, ont trouvé que non-feulement il y a des eaux coulantes & ftagnantes, mais encore que plufieurs fleuves s'y abîment; & après avoir traversé ainsi fous terre un espace de quelque lieues, en fortent pour revenir arrofer fa furface. C'est ainfi que le Rhône, en France, fe perd dans certains goufres près de Greffin, d'où il fort à quelque diftance beaucoup plus gros qu'auparavant ; que le Tigre fe perd dans des montagnes, & qu'il ne reparoît qu'après avoir traverfé des marais; que plufieurs fleuves de l'Afie difparoiffent & reviennent fur la terre continuer leur courfe ; fleuve

enfin que dans la Laponie, le

feuve Umoa fe plonge dans le globe pour en fortir plus abondant & plus clair, &c.

Il paroît que cette courfe obfcure des rivières étoit connue des anciens, puifqu'ils difoient que l'amoureux Alphée fe précipite fous terre dans l'Arcadie, pour fuivre la fugitive Aréthufe, & qu'après avoir paffé par des routes profondes au-deffous de la mer, il va rendre fes eaux dans la Sicile, auprès de Syra

cufe.

On juge par-là combien doivent être confi dérables les creux, les canaux & les antres qu'il y a dans la terre. Les découvertes qu'on a faites des mines, mettent encore en état de les eftimer. On appelle Mine un lieu fouterrain, d'où l'on tire le minéral. Il y a des mines verticales qui defcendent profondément de la furface de la terre vers fon centre, & d'autres qui s'étendent horizontalement, & qui occupent fou vent beaucoup d'efpace en largeur. Il y a plufieurs fortes de mines ; des mines de fel, des mines d'or & d'argent, des mines de diamant, des mines de fer, de cuivre, de mercure, de charbon, &c. & ces fouterrains font dans toutes les parties de la terre. Les mines d'or & d'argent font très-abondantes: les autres mines font vers le Nord; mais on ne trouve des mines de diamant que dans les pays méridionaux. Tavernier prétend qu'il n'en exifte que quatre dans la terre ; & que celle, où l'on trouva le gros diamant du Grand Mogol, fut découverte, il y a cinq cents ans, par un pauvre homme, lequel en bêchant, trouva une pierre qui luifoit un il la fit voir à une perfonne, qui par ha

peu :

D

fard s'y connoiffoit, & qui reconnut bientôt

cette mine.

Mieux inftruit que Tavernier, on compte aujourd'hui plus de quatre de ces mines, & on fait que les meilleures & les plus riches font dans les pays de Golconde, de Vifapour, dans les Etats du Grand Mogol, & fur-tout dans le Bréfil.

C'eft à-peu-près ainfi qu'une des mines d'argent du Pérou fut découverte par un Chasseur, qui, pourfuivant une bête fur une montagne, trouva une végétation d'argent, laquelle formoit un arbriffeau. On affure auffi qu'une mine d'or fut trouvée par un Voyageur, qui, voulant arracher un arbriffeau pour en faire un bâton, trouva fes racines entortillées de filets d'or.

Tout cela eft fort vraisemblable, car le hafard a plus fait de découvertes en ce genre que le génie. Cependant fi l'on a ainfi connu les mines, il faut que ce foit dans un temps bien reculé, puifque les Anciens en exploitoient : il eft vrai que ce ne font pas celles que nous poffédons à préfent ; car plufieurs d'entre celles-là

font inconnues.

En effet, Philippe, père d'Alexandre le Grand, avoit plufieurs mines dans fes Etats, qui lui procuroient un grand revenu: elles furent long-temps ouvertes, & elles font aujourd'hui abandonnées. Strabon & Pline ont écrit que les Carthaginois & les Romains tiroient autrefois d'Efpagne une grande quantité d'or & d'argent. On croit que ces mines font dans l'Andaloufie & dans l'Eftramadure. Les premières mines des Romains étoient en Italie,

mais ils les laifsèrent bientôt pour fouiller dans celles d'Efpagne. Si l'on en croit Pline, ils puifoient dans celles des Afturies & de la Galice, & même du Portugal, beaucoup d'or & d'argent ils en tiroient quantité des mines de France, qui en fournit fi peu aujourd'hui à ses habitans. Strabon dit qu'il y avoit fur-tout dans les Pyrénées, une mine d'or très-pur & très-aifé à tirer; & Pline ajoute qu'on trouvoit dans les Gaules un or plus fin que celui d'Efpagne.

Dans la vie d'Agricola, Tacite nous ap prend qu'anciennement l'Angleterre avoit des mines d'or, qui furent le prix de la victoire des vainqueurs on voyoit encore des mines d'or dans la Dalinatie.

Mais fi ces mines, fi fameufes jadis, font aujourd'hui inconnues, il en eft en Allemagne une plus grande quantité que dans toute autre contrée, que les modernes ont découvertes. Les premières font celles de Gollar: on n'eft d'accord fur le temps où on les a connues ; mais l'opinion la plus probable, eft que ce fut fous Othon le Grand (a).

pas

Ainfi donc des mines font répandues de toutes parts dans le fein de la terre. On voit dans leurs galeries des exhalaifons qui fortent des entrailles de ce globe, fi l'on peut parler ainfi,' & qui produifent des effets différens. Elles font accompagnées d'une epaiffe fumée,& occafionnent des éruptions: un fifflement annonce toujours leur fortie; elles voltigent dans les carrières, & s'enflamment quelquefois aux lampes des

(a) Dictonnaire univerfel des Foffiles, par M, Bertrad, article Mines.

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