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de Sénèque, qui a expliqué leurs effets en développant l'opinion d'Anaximènes. Suivant Gaffendi, les tremblemens de terre font caufés par une inflammation fouterraine. Enfin Lemery, Newton, Halès, & Mufchenbroeck, &c. adoptent l'explication dont j'ai déjà parlé, favoir un mêlange de diverfes matières, qui fermentent & qui s'enflamment.

Telles font les caufes générales que les Phyficiens & les Naturaliftes affignent aux tremblemens de terre : mais pour completter leur hiftoire, je dois ajouter que la terre a quelquefois été ébranlée par des caufes furnaturelles. Ainfi la terre trembla à la promulgation de la loi fur le mont Sinaï, à la mort de J. C., & à fa réfurrection. Un tremblement de terre ouvrit les portes de la prifon de Paul & de Silas. Un tremblement de terre arriva pour engloutir Coré, Dathan & Abiron (a).

Les Romains étoient perfuadés qu'il ne pouvoit y avoir de tremblemens de terre, fans la permiffion de quelque Divinité : auffi dès qu'ils en éprouvoient, ils ordonnoient des fêtes ou des féries. Mais plus éclairés & mieux inftruits, ils comprirent que tous ces grands mouvemens provenoient de caufes naturelles.

J'ai dit que les pays où l'on éprouve le plus fouvent des tremblemens de terre, font pleins de foufre & de nitre. Dans les autres endroits,

il

y a dans des bancs de rochers, dans des couches de terre, ou de fable, des matières de

(a) Nahum, 1, 5, nomb. 16, 31, Mémoires hiftoriques & phyfiques fur les Tremblemens de Terre, Mémaire I.

différentes espèces; ce font des fucs huileux épaiffis, du bitume, de l'afphalte, du pétrole de naphte, du jais, de l'ambre, des fels, du fel gemme, du nitre, du falpêtre, d'alun, de vitriol, &c. &c. Tout cela eft diversement mêlé avec différentes fortes de fables, de gravier, de terre, de limon, d'argille & de marne, Sous ces couches de terre, de fable, ou de gravier, on voit des carrières & des lits de tuf, de diverfes confiftances, lefquels ne paroiffent compo fés que de morceaux de bois, de petites branches, de rameaux, de mouffe, de feuilles d'arbres à demi-pétrifiés. Près de ces amas de tuf, on trouve pour l'ordinaire des fources ou des ruiffeaux. Souvent on y rencontre des morceaux de bois,des coquillages, des poiffons entièrement pétrifiés. On donne le nom de foffiles à toutes ces matières qui fe forment en terre, fans paroître avoir vie; & on appelle Oryctologie, Oryctographie, ou fous une feule dénomination Minéralogique, l'énumération & la defcription de ces fubftances: cependant le mot foffile défigne principalement les pétrifications, & toutes les fortes de coquilles qui fe trouvent dans les entrailles. de la terre.

Pour parvenir à la connoiffance de ces corps, on les a divifés en fix claffes : favoir, les terres, les pierres, les fels, les bitumes, les minéraux & les métaux. Les Anciens ne nous ont rien appris à cet égard. Les premiers d'entre les Modernes qui ont voulu en faire une étude, ont commencé par examiner fi ces corps ant toujours exifté, ou s'il s'en eft formé depuis la création du monde, & s'il s'en forme encore

aujourd'hui. Cette queftion a beaucoup exercé, & fans fuccès, deux Philofophes très-connus, Scaliger & Cardan..

Les Naturaliftes, plus fages peut-être que ces Savans, ont abandonné la folution de ce problême, pour s'attacher à décrire tous les corps qui font renfermés dans toutes les parties de la terre. Ainfi Hill, Mendez da Cofta, Woodward, &c. ont décrit les fofiles de l'Allemagne. Ainfi Spada, Allion, Vallifneri, Boccone, &c. ont fait l'énumération des foffiles de l'Italie. Ainfi M. d'Argenville a fait connoître les foffiles de la France.

Et afin d'avoir une méthode dans ce travail épineux, d'autres Naturalistes fe font bornés à des efpèces de foffiles, & en ont approfondi la nature & la formation. Tel eft J. Gefner, qui, dans un Traité Physique fur les Pétrifications, a renfermé avec autant d'ordre que de précifion, tout ce qu'on connoît dans les pétrifications. Tel eft Vallérius, qui a mis le plus bel ordre dans l'énumération de ces fubftances. Teleft Linnaus, qui les a rangées méthodiquement par claffes. Enfin tels font Scheuchzer, Lang & Bourguet, qui ont décrit les diverfes fortes de concrétions cryftallines', & publié des catalogues méthodiques des pierres figurées, &c.

Quand on confidère la quantité innombrable des différentes espèces de foffiles, on eft étonné de ce mêlange & de cette confufion. On y trouve non-feulement toutes fortes de coquillages, mais encore différens poiffons, & même des animaux terreftres. Tenzelius a publié la defcription des parties d'un grand

éléphant, découvert à vingt-quatre pieds de profondeur à Tounen, près d'Erfort, dans le Landgraviat de Thuringe, qu'on croit avoir été enfeveli dans ce lieu au temps du déluge. D'où peut provenir cette grande diverfité ? Quoi! la terre n'eft donc qu'un globe informe, une maffe confufe de parties amoncelées fans ordre? On n'y voit que des cavernes, des affaiffemens interrompus par des creux, des efpaces inutiles & difpofés avec confufion, qui ne contiennent que des ténèbres & des ordures, d'où naiffent des exhalaisons malignes & peftiférées. Dans les lieux les plus bas de ce globe, qui fervent de réfervoirs aux eaux, on n'apperçoit, ni dans la forme, ni dans la distribution des parties, nul ordre, nulle mesure nulle proportion. S'il y a des montagnes qui fervent à la conduite des eaux, à fournir des pierres & des métaux, combien en eft-il d'inutiles? En un mot, tout eft confus dans l'extérieur, & dans l'intérieur de la terre (a).

Eft-ce-là l'ouvrage de Dieu ? Non, dit M. Burnet, Auteur de ces réflexions. Lorsque ce globe fortit des mains du Créateur, fa furface étoit égale, uniforme, fans mers & fans montagnes; & elle n'a dégénéré ainfi que nous la voyons, que par vétufté: de forte que les pre

miers hommes ont eu la terre toute neuve, & par les bouleverfemens qu'elle a éprouvés elle s'eft fracaffée tellement, qu'on peut dire que nous habitons fur fes ruines: & nos habitamus ipfius ruinas.

(a) Thoma Burnetii, Tell. Theor. facra, lib, 1, cap, 7.

Mais quelle a pu être la caufe d'un fi grand dérangement? J'ai analysé les systêmes des plus célèbres Philofophes pour expliquer cette cataftrophe dans l'hiftoire du globe terreftre pag. 249 de l'Hiftoire des Sciences naturelles: je me bornerai donc à une expofition fommaire de quelques fentimens particuliers, qui font partie de l'hiftoire naturelle, & qui ferviront de fupplément à cette analyse.

C'eft à quatre fyftêmes principaux que fe réduifent toutes les recherches des Philofophes pour réfoudre le problême important que forme le changement de notre demeure. Premièrement la chûte du monde, imaginée par Platon, & exposée fyftématiquement par Burnet, & encore par Jofeph-Antoine-Gonzalez de Salus, Auteur Espagnol (a). En fecond lieu, le féjour fucceffif de la mer fur les terres, d'où elle s'eft retirée peu-à-peu, fystême d'Ariftote, Leibnitz, Pallifi, Vallifnieri, Juffieu, Maillet, de Buffon, &c. & combiné avec la chûte d'une partie du premier monde par Stenon, Wifthon, Halley, Hartzoeker, Buttner, &c. La troisième hypothèse eft celle de la diffolution du premier monde par le déluge, imaginée par Wooward, & adoptée par Jean Scheuchzer, Monti & Bourget, &c. Enfin la quatrième & dernière conjecture eft de M. Sulzer.

Ce Naturalifte prétend que la caufe du bouleversement de la terre, provient du changement continuel du centre de gravité de ce globe; car on voit avec le temps, une partie confidérable de la terre fe détacher d'un

(a) Differtat. Paradox. de duplici viventium terra.

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