Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[ocr errors]
[ocr errors]

premieres dans la compofition. Or comme "les quatre prétenduës humeurs ne fe trou"vent pas les dernieres dans la réfolution du corps humain, elles ne feront pas non plus les premieres dans fa compofition ; & c'eft Penvain qu'ils s'efforcent à le vérifier, en ≫difant qu'il fe trouve dans le corps humain Pune humeur aqueufe, tantôt infipide, & tantôt falée & acre, à laquelle ils donnent » le nom de Pituite ; tantôt une humeur jaune, verte & amere, à laquelle ils donnent le nom de Bile jaune & porrace, & plu»fieurs autres noms., felon la diverfité des couleurs ; & une autre qui eft noire, qu'ils appellent Melancholie ou Arrebile; car »ces humeurs de diverfes couleurs qui fe trouvent dans l'eftomach, dans les inteftins, ou dans le cerveau, font les excrémens de l'aliment qui y eft porté en plus grande quantité qu'aux autres parties, & c'eft de leur rétention que dépendent la plupart des maladies. Que fi le fang étoit bilieux dans la fiévre tierce, comme on le fuppofe, ne devroit-il pas être amer? car comme la dénomination fe prend du prédominant, le fang bilieux doit avoir les »qualités effentielles de la Bile, & par conféquent être amer; mais le fang qu'ils appellent bilieux, & qu'ils prétendent être la caufe de la fiévre tierce, eft doux,

❤comme

comme l'on peut connoître en le goûtant. Il eft donc vrai de dire que la maffe fanguinaire n'eft pas compofée de bile, ni autres prétendues humeurs. Cela étant, comme il n'eft que trop vrai, il ne faut » pas s'étonner fi tant de faignées & tant de » rafraîchiffemens donnés pour des fuppofées effervefcences d'un fang bilieux, produi » fent enfuite des maladies, tant d'hydropifies & autres Maladies chroniques, ce que je vous ferai remarquer en vous parlant de » la chaleur des Fébricitans. On n'entend → parler la plupart des Médecins que de chaleurs d'entrailles, d'effervefcences bilieufes, & de foyers dåns le bas-ventre, & tous ces grands mots, pour avoir lieu de faire la guerre avec quelque prétexte au fang humain, dont ils fe font déclarés les > ennemis capitaux. S'ils connoiffoient à »fond la caufe de la chaleur des Fébrici

[ocr errors]

20

tans, ou s'ils vouloient s'attacher à la » connoître, je fuis certain que les malades. >ne feroient pas tirannifés comme ils font, tant par des faignées que par des diettes qui conduifent fouvent au tombeau. Y at-il rien de plus ridicule que de dire qu'un aliment eft bilieux, l'autre pituiteux, & l'autre mélancolique, & partant qu'ils engendrent plus de bile, plus de pituite & de mélancolie que les prétendus alimens Tome I. Partie II.

Q

choifis des Médecins ; puifque ces humeurs de diverfes couleurs ne font pas dans nos alimens, & que ce font feulement des excrémens produits de la premiere coction; » & cette production ne dépend en aucune maniere des alimens dont nous fommes nourris, mais bien de la feule digeftion; de forte qu'un même aliment produira plus d'excrémens à un homme qu'à un autre, >> Et même l'on voit tous les jours qu'un mê me aliment profite à l'un & nuit à l'autre, & tout cela dépend & prend fon origine de la foible ou forte digeftion & coction » de cét aliment, qui fe fait par la chaleur naturelle, & ainfi l'on peut accorder toute forte d'alimens aux malades, pourvû qu'ils les puiffent bien cuire & digérer, & il n'y pa feulement qu'à confidérer la force de la chaleur naturelle, & à lui proportionner l'aliment.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Après vous avoir démontré clairement que la maffe du fang n'eft pas compofée de quatre humeurs, je veux vous faire toucher Pau doigt le pernicieux évenement qui réfulte de ce mauvais fondement, & à même >tems le bien que produit une pratique éta

[ocr errors]

blie fur un fondement folide, dont je fuis » pleinement convaincu par une longue expérience; & comme la fiéyre eft le mal le plus commun, & qui accompagne prefque

20

[ocr errors]

toute forte de maladies, c'eft de celui-là que je veux vous donner quelque idée, & vous faire remarquer de quelle importance »il eft de bien définir les choses; car la mau» vaise définition de la fiévre, fuivant l'E»cole, a donné lieu à une infinité d'erreurs. On la définit, une chaleur contre na»ture, allumée dans le cœur, & dispersée >par tout le corps. Or comme cette prétendue chaleur contre nature eft la qualité effentielle de la fiévre, il faut par la chaleur pouvoir connoître la fiévre, puifque toute définition doit expliquer la nature de la chofe définie ; mais il falloit dé» clarer plutôt ce que c'est que chaleur con>tre nature, comment elle eft produite, & comment elle s'allume dans le cœur, & »ne pas définir un obfcur par un plus obfcur; & pour juger fi un Médecin fuivant cette définition peut connoître la fiévre, fuppofons quelque incident. Un malade envoye chercher_un_Docteur - Régent » pour l'aller voir. Ce Docteur lui envoye »un jeune Médecin qui trouve le malade » accablé d'un grand friffon. Il va faire rap»port au Docteur que le malade n'a pas la fiévre, & n'a pas plutôt achevé de parler, que le Docteur l'envoye vifiter un autre » malade, qu'il trouve étendu fur un lit, >atteint d'une grande chaleur & altération

[ocr errors]
[ocr errors]

t

[ocr errors]

Il va dire au Docteur que ce malade a la fiévre. Le Docteur s'en va voir ces deux malades, & trouve le dernier fans fiévre, & le premier avec la fiévre. Etant de retour au logis, il reprend le jeune Médecin .00 du peu de connoiffance qu'il a de la fiévre. Le jeune Médecin fe défend, & dit que le premier ayant froid, ne pouvoit pas avoir la fiévre, puifque la chaleur est la qualité effentielle de la fièvre, mais que le → dernier avoit chaud & foif, & par conféquent la fiévre, de forte que le Docteur, » pour lui donner mieux à connoître la fié»vre, eft obligé de lui dire que la fiévre ne fe manifefte que par le battement extraordinaire & plus fréquent de l'artere, fans avoir égard ni au froid, ni au chaud. Car quoique la chaleur ne fe manifefte pas, & que le malade reffente un grand froid, pil eft fenfé qu'une chaleur extraordinaire eft dans l'interne, & que le fréquent battement de l'artere n'eft caufé que par l'effervefcence du fang.

» Vous êtes trop bon Philofophe, Monfieur, pour ne pas connoître la nullité de cette définition, auffi-bien que de leur hypothèse. Je ferois trop long, fi je voulois yous entretenir à fond de la fiévre; car comme mes fentimens, quoiqu'appuyés fur l'expérience & fur la raifon, font op

« AnteriorContinuar »