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De cette ennemie intraitable,

Bravant la rage impitoyable,
Méprifa-t-il autant fes coups,

Que lorfqu'aux campagnes d'Arbelle
Il fembla courir après elle,

Et fe rire de fon couroux?

V.

Pourquoi d'une fote vaillance
Emprunter le mafque trompeur?
L'homme eft Poltron dès fa naiffance,
Et fon orgueil fait fa valeur :
Efclave d'une vaine Idole,
C'eft fur fes Autels qu'il immole
Son repos aux fureurs de Mars;
Dépouillez l'affreuse Bellone
Du faux éclat qui l'environne,
Où trouverez-vous des Céfars?

V I.

C'eft toi, flateuse Renommée,
Qui les conduifant aux combats,
De ton éclatante fumée

Leur voiles l'horreur du trépas :
On te fuit; leur folle manie
Néglige le foin de leur vie,
Et s'en repofe fur le fort ;

Viens-tu foudain à difparoître,

L'homme eft tel que Dieu le fit naître,

Et la mort eft toujours la mort.

VI I.

Ceux que les Nymphes du Permesse
Comptent parmi leurs nourriffons,
De la véritable Sageffe

Suivent les charmantes leçons :
Leur grand cœur ennemi des feintes
Montre fes défirs & fes craintes;
Où s'il prétendoit les cacher,
La Nature qu'ils ont pour guide,
Du fond de leur ame timide

Iroit bien-tôt les arracher.

VIII.

O mort, plus douce

que

la vie ! t

O noble & glorieux deftin

De s'immoler pour fa Patrie !.

Crioit le Lyrique Latin.

Mais dans les champs de Macédoine,

Les vastes cohortes d'Antoine

Lui firent bien changer de ton;

+ Dulce & decorum eft pro Patriâ mori. Hor. L. 3. Od. 2.

Et fon bouclier † fur la place

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Cét Orateur †† qui dans Athenes
Réveillant les Grecs amollis,
Foudroyoit en phrases hautaines
Le destructeur d'Amphipolis, *
Dans le combat de Chéronée,
De la Tribune abandonnée
Regreta la fure fierté,

Lorsqu'une fuite promte & vive
De fa valeur spéculative

Eut découvert la fermeté,

X.

Ainfi fous ce toit pacifique
Où le deftin m'a confiné,
Mon courage plus qu'héroïque
M'a fouvent moi-même étonné:
Loin du moufquet & de la bale,

+ Tecum Philippos & celerem fugam

Senti, rejectâ non bene parmulâ, &c. Id. Lib. 27 Od. 7.

++ Démofthene.

* Philippe.

Mon éloquence martiale
Fait la leçon aux Généraux ;
Entens-je un fufil dans la rue,
Ma valeur s'enfuit éperdue,
Et laiffe trembler le Héros.

X I.

Mais que fert l'exemple des hommes, Quand nous avons pour nous les Dieux? Plus Poltrons que nous ne le fommes, Jadis ils quitterent les Cieux : Le Nil devenu leur azile,

Reçut, fur fa rive tranquile,

Leurs paisibles Divinités ;

Et Memphis, par fon humble hommage,

Répara l'infolent outrage

Des Titans contre eux révoltés.

ΧΙΙ.

Toutefois leur orgueil farouche
Contre le Ciel n'emploiia pas
Ces foudres d'airain dont la bouche
Vomit la flâme & le trépas :
O fi leurs cohortes altieres

De ces machines meurtrieres
Euffent inventé les refforts,

Le pauvre Maître du Tonnerre,
Sans fe confier à la Terre,

Auroit fui jufquès chez les morts.

XIII.

Avoir par une illuftre fuite
Déconcerté ces Criminels,
Ce fut pour les Dieux un mérite
Qui leur fit dreffer des Autels :
Leur vertu la plus révérée,
Et la premiere confacrée
Par les vœux de l'Antiquité;
Ce fut cette noble franchise
Que le peuple injuste baptise
Du trifte nom de Lâcheté.

XI V.

Cherchons fous l'écorce des Fables

Au moins quelques réalités;

Humains, nous naiffons tous femblables
A ces Dieux par nous inventés :
Si le Dieu même de la Guerre
Ne fit point un honteux mystère
De la peur dont il fut furpris,
Pourquoi le Sage, qui l'imite,
Se verra-t-il, comme Therfite,
L'objet public de vos mépris?

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