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Cette Déclaration fut reçûe avec joye de tous les Peuples. On remercia Sa Majesté par plufieurs Adreffes; & pour la rendre. encore plus fenfible, le Roy donna une amniftie générale aux particuliers qui s'étoient trouvés malheureusement engagés dans les dernieres féditions. Il n'y eut que les principaux chefs qui furent punis felon la rigueur des loix, tous les autres trouverent grace dans la clémence du Roy. Heureux fi fon Regne & leur foumiffion euffent duré plus long-tems! La Religion CathoHique s'augmentoit de jour en jour en Angleterre, on l'exerçoit librement : quelques Evêques voulurent s'opposer aux ordres de Sa Majefté qui s'irrita contr'eux, & leur fit publier auffi-tôt la Déclaration qu'il avoit donnée.

Le Seigneur répandit fes graces & fes bénédictions fur la Maison de ce grand Roy qui,comme un autre Efdras,ne fongeoit qu'à rétablir le Regne de Dieu dans un Royaume qui l'avoit autrefois fi fidelemént fervi. Le 20 de Juillet 1688 fur le foir, naquit à Londres le Prince de Galles, qui fut baptifé le 25 d'Octobre dans la Chapelle du Palais de Saint James, & tenu fur les Fonts de Baptême par l'Archevêque d'Amafie, Nonce du Pape, au nom de Sa Sainteté, & la Reine Doüairiere d'Angleterre.

par

II

Il fut nommé Jacque - François Edouard. La Reine Douairiere, plufieurs Dames de la premiere qualité, & quelques Confeillers d'Etat étoient dans la chambre de la Reine lorfqu'elle accoucha. Cette heureuse naiffance fut un fujet de joye pour tous les Peuples d'Angleterre, qui la firent paroître par de continuelles réjouiffances, & par des illuminations univerfelles que l'on vit des trois Royaumes d'Angleterre, d'Ecoffe & d'Irlande.

Mais tandis que les Anglais envifageoient dans le Prince de Galles un héritier de la fageffe & de la vertu de Jacque II. & qu'ils fe félicitoient eux-mêmes de l'affermiffement du Trône, par la naiffance d'un Prince qui préfageoit un bonheur futur, les Hollan dais levoient des Troupes, & préparoient une Armée confidérable pour détrôner Jacque II. & pour révolter toute l'Angleterre contre fon Roy. Quelques proteftations qu'ils euffent faites plufieurs fois au Marquis d'Albyville Envoyé d'Angleterre à la Haye, que les Troupes qu'ils affembloient n'étoient point destinées contre l'Angleterre, le Roy ne douta plus de leur deffein, & fe mit en état d'y réfifter. Il donna fes ordres pour empêcher le trouble qu'une invafion fubite auroit caufé à tous fes Sujets ; il affembla des Troupes, dont il donna le Commandement Tome I. Partie II.

X

à ceux qui lui paroiffoient les plus fideles, &.réfolut enfin de fe mettre lui-même à la tête de fon Armée, pour foutenir le bien, la vie, & la liberté de fes Sujets.

Le Prince d'Orange qui avoit époufé la Fille de Jacque II. vint avec une Flotte de quatre cens voiles débarquer en Angleterre. Ĉette Flotte étoit divifée en trois Efcadres, portant Pavillon blanc, avec les Armes du Prince d'Orange, & cette Devife: Pour la Religion & la Liberté. Le 15 de Novembre elle débarqua aux environs de Dartmouth, de Lime & de Torbay, fans aucune résistance, & peu de jours après le Prince d'Orange s'empara de la Ville d'Exceter. Le Roy qui s'étoit mis à la tête de fes Troupes pour combattre l'Armée ennemie, fut obligé de retourner à Londres par une maladie qui lui furvint. Le trouble s'augmenta dans l'Angleterre, & fa Majefté fut obligée de condefcendre à donner de part & d'autre des Commiffaires pour régler les différends. Les négociations furent inutiles, & les hoftilités continuées avec tant d'ardeur, qu'enfin le défavantage des armes, la défertion continuelle des Officiers, la retraite de plufieurs' Seigneurs qui, comblés des bienfaits du Roy, devoient avoir pour lui une fidélité finguliere, firent réfoudre Sa Majefté à pourvoir à la fureté de la Reine& du Prince de Galles.

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Cette illuftre Princefle, que l'adverfité n'abbatit jamais, & qui à l'exemple de fon Epoux, fçut foutenir cette rude épreuve avec toute la conftance & la fermeté poffible, partit secretement de Witheall la nuit du 19 au 20 de Décembre 1688, accompagnée du Duc de Lauzun, de quelques Gentilshommes Français, & d'un trèspetit nombre de Domeftiques. Son départ fut inconnu & caché aux Anglais : on fuppofa le lendemain que fa Majefté étant incommodée ne vouloit voir perfonne : Et le 5 de Janvier 1689, elle arriva à Beaumont, où elle fut complimentée de la part de toute la Cour de France, & fe rendit le 6 à Saint Germain en Laye. Le Roy de France qui avoit été au devant de fa Majesté jusqu'à Chatou, la conduifit, accompagné de Monfeigneur le Dauphin, de Monfieur, des Princes du Sang, & des principaux Seigneurs de fa Cour.

Le Roy d'Angleterre ne voyant plus de fureté pour fa perfonne, partit de Londres pour paffer en France. L'Yacht fur lequel il s'étoit embarqué n'étant pas affez lefté, il fallut retourner à bord pour prendre du lefte; dans cét intervalle, le Roy fut recon nu & conduit à Rochester, d'où il fe fauva la nuit, & revint s'embarquer avec le Duc de Berwik dans un batteau de Pêcheur, qui

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le porta heureufement à Ambletufe. Il arriva le 6 de Janvier à Amiens, & le 7 à SaintGermain, où le Roy de France le reçut à la Salle des Gardes, & le conduifit à l'Appartement de la Reine.

On ne peut affez loüer la grandeur du Roy de France dans les manieres nobles dont il fe fervit pour faire recevoir le Roy & la Reine d'Angleterre dans tout fon Royaume. Leurs Majeftés trouverent auprès du Roy tout le fecours qu'elles en pouvoient efpérer; une Cour nombreuse & digne d'un Roy; un grand nombre d'Officiers, & autant de Sujets qu'il y a d'hommes en France, tous préparés à donner leur vie pour rétablir leurs Majeftés fur le Trône, fi le Seigneur, dont la fageffe infinie conduit toutes chofes à l'exécution de fes deffeins, n'avoit voulu éloigner ce Prince vertueux d'un Trône temporel & paffager, pour l'élever à une gloire qui ne finira jamais. Auffi le Roy d'Angleterre donna-t-il dans ce cruel revers d'une fortune inconftante, toutes les marques d'une vertu héroïque, & d'une conftance que rien ne peut ébranler. Il leva les yeux au Ciel, & adora la main qui vouloit éprouver fon cœur: plus glorieux d'être Chrétien & de vivre dans l'Eglife, que de regner fur trois Royaumes, ne fongea plus qu'à régner fur foi-même, en s'humiliant devant Dieu.

il

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