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pour nous avoir obligés à conftruire un affez grand nombre de cheminées. Mais quelle utilité pouroit-il réfulter de l'ufage du feu dans nos appartemens, s'il n'y avoit pas des moyens d'empêcher les cruels effets de la fumée qui l'accompagne? C'est pour prévenir ou pour rémédier aux inconvéniens de cette vapeur funeste à la fanté du corps & à la liberté de l'efprit, que l'on a formé le projet de raffembler ici les meilleurs moyens de s'en garantir. Mais avant que de les indiquer, ces moyens, il paroît à propos d'examiner d'abord; quelle eft la nature de la fumée en elle-même, & quelles font les principales caufes qui la font refouler dans nos appartemens : c'eft ce

que l'on va tâcher de faire dans la premiere partie de cet Ouvrage,

CHAPITRE PREMIER.

De la nature & de l'origine de la
Fumée.

L'Ufage du feu ne nous apprend que

trop qu'il y a de la fumée, & que c'eft lui qui l'occafionne; mais pour donner une idée claire de la nature de cette vapeur nuifible, & de la maniere dont le feu la produit; on peut dire en général que c'est un amas de petits corps hétérogénes, compofés d'huile, de terre & d'eau, que l'action du feu détache d'un corps combustible, & fait élever en les mettant dans une grande agitation, fans pourtant les enflammer, à caufe de la trop grande quantité d'eau & de terre, dont les parties huileufes & fulphureuses font embarraffées.

Cardan, (A) après avoir dit que la fumée tient le milieu entre la flamme & l'air, en remarque de deux fortes:

(A)

Liv. de l'Architect

1o. Celle qui eft la plus légere, qui fuccéde néceffairement à la flamme & qui étant d'elle-même très raréfiée, se diffipe facilement dans l'air, ce qui fait qu'elle ne fuffoque pas, & qu'elle n'eft pas nuisible à la vuë. 2°. L'autre forte de fumée, dont il fera queftion dans cet Ouvrage, est celle qui précéde la flamme : elle provient ou de l'ufage du charbon de mauvaife qualité, ou de celui d'un bois verd, c'est pourquoi cette fumée eft plus humide que celle de la premiere espèce. On comprend d'abord qu'il faut qu'elle contienne quantité de fels, 'non-feulement parce qu'elle caufe des picotemens dans les yeux, mais encore parce qu'elle préferve de corruption les viandes qu'on y fait fécher. Les parties terreftres & huileufes de la fumée, forment la fuie. L'odeur de la fumée qui s'exhale de la tourbe & du bois, indique affés qu'elle contient des corpufcules fulphureux, & l'on juge avec vraisemblance qu'ils font accom

pagnés de parties flegmatiques qui lient les diverfes parties de la fumée & la rendent fluide. Lorfque ces particules fulphureufes s'exhalent peu à peu du mixte où elles étoient réunies, avec quantité d'autres particules aqueuses, terreftres, huileufes & falées, ce n'eft encore que de la fumée; mais lorfque ces particules fulphureufes s'attachent en plus grand nombre aux parois extérieurs du mixte, il devient alors un charbon ardent. Enfin lorfque ces mêmes particules de fouffre, ayant acquis affez de force pour brifer les obftacles qui les tenoient enfermées, en s'exhalant, elles entraînent ces particules aqueufes & terreftres, justement combinées : la fumée devient alors de la flamme. La fumée s'enflammeroit plus facilement fi les particules de foufre pouvoient dominer fur les particules acqueufes & terreftres. On a fait envain plufieurs opérations chimiques pour féparer ces parties, & rendre par ce moyen

la fumée combustible; mais ce que l'Art n'a pû trouver jufqu'ici, la nature semble nous l'offrir dans un endroit du Dauphiné, qu'on rapporte à ce fujet. Voici le fait.

A quatre lieuës de Grenoble, près du Monetier du Clermont, au pied d'une colline, on apperçoit de la fumée qui s'éleve inceffament d'une terre rougeâtre & chaude au toucher; cette fumée s'enflamme quelquefois d'elle-même, lorfque l'air eft fort chargé de nuages; mais ordinairement pour l'aider à s'enflammer, on en approche de la paille allumée, la fumée prend feu à l'inftant, & demeure très long-tems dans cet état, fans qu'aucune autre matiere combustible entretienne la flamme. La feule odeur de la terrevoifine apprend que quelques mines de foufre, de bitume, excitée par un feu fouterrain, doit être le principe de cette vapeur. On voit par ce phénomène, que plus il y a de foufre dans le mixte, &

plûtôt

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