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DISSERTATION

SUR LES CHEMINE'ES DES ANCIENS.

EROIT-CE parce que les Chemi

SE

Snées ne font qu'une des plus pe

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tites portions de nos Bâtimens qu'il paroît fi difficile d'indiquer le tems de leur invention, ou le lieu qui les a vû naître? L'Antiquité la plus reculée ne nous fournit aucune époque capable d'en fixer l'origine; les plus anciens Livres, je veux dire ceux de Moyfe, nous laiffent dans notre ignorance fur cela, & ne font pas même mention de ce qui pourroit être analogue à cette matiere.

Liv. de

Alberti (A) eft le premier qui (4) ose nous représenter dans la plus l'architect. haute Antiquité des feux publics, allumés au milieu d'une place, où

chacun fe chauffoit dans le befoin, & y faifoit cuire ce qu'il apprêtoit pour fa nourriture. Mais on ne voit là aucun veftige des cheminées, & de quel ufage auroient-elles été parmi des Peuples dont la plûpart étoient toujours errans où habitoient fous des Tentes? ce qui a duré fort long-tems, furtout en Palestine. Ces fortes d'habitations font encore aujourd'hui fort communes parmi des Peuples entiers. Les Arabes, voifins du Mont-Carmel, fans en excepter leurs Cheiks & leurs Emirs mêmes, logent dans des camps & fous des tentes tiffues de poils de chevres, que leurs femmes & filles, filent dans leurs momens de loifir. Les Arabes, voifins de Tunis, n'ont d'autres habitations que des Tentes placées aux environs de l'Etang de la Goulette où ils gagnent leur vie à pêcher. Les Scythes n'avoient pour demeu

res que des chariots couverts de peaux, qu'ils conduifoient d'un lieu à un autre lorfque les pâturages manquoient à leur bétail. D'autres Peuples, enfevelis dans le fond des forêts, n'avoient pour bâtimens que des huttes, compofées de branches d'arbres. D'autres enfin, plus fimples encore, logoient leur famille fur des arbres pour les défendre des bêtes carnacières. Ce n'eft affurément pas, parmi de telles gens; que les cheminées ont été en vogue.

Quant aux Peuples qui faifoient leurs demeures dans des Antres ou des Cavernes, il n'y a nulle difficulté à concevoir comment ils pouvoient y faire du feu en toute fûreté, fans être incommodés par la fumée, qui fortoit par l'entrée, & par les autres ouvertures faites par la nature; ainfi ils pouvoient fort bien fe paffer des cheminées. Ceci

ne doit point paroître un Paradoxe. On fçait combien de différens Peuples ont non-seulement habité dans des Cavernes, mais encore en ont fait des demeures commodes, & même agréables, principalement dans une partie de l'Afie fur les bords de la Mer rouge, & du Golphe Perfique; dans les Montagnes d'Arménie, dans les Ifles Baleares, & dans l'Ifle de Malte. On connoît certains Peuples, qui n'avoient d'autres demeures, que des trous qu'ils fe creufoient dans les Rochers, ce qui leur fit donner le nom de Troglodites, qui fignifie en Grec, ceux qui fe cachent dans des cavernes. La plûpart des montagnes de l'Arabie de la Judée & de la Phénicie, (A 6. cap. 29. étoient pleines de ces fortes d'antres. Strabon (B) affure qu'on en Lib. 16. voyoit dans l'lturée, de capables cap. 520. de contenir quatre mille hommes.

(A)

Plin. lib.

(B)

Jofeph

Jofeph (4) parle auffi de celles de Galilée. Paul Lucas, (B) de celles qu'il a vû dans la haute Egypte à deux lieues du Siouth, principalement d'une où il demeuroit une douzaine de familles de Chrétiens Coptes. Il dit qu'on en trouve un grand nombre dans la plupart des montagnes de la Thébaïde, furtout du côté du Levant, fans doute que cette pofition leur étoit plus favorable & plus faine. Il demande aux Sçavans, fi ce n'étoit pas l'habitation des premiers hommes qui s'étant retirés en Egypte peu après le Déluge, & ignorans encore l'Architecture, fe fervirent de ces fombres demeures, que la nature avoit apparemment commencé à leur ménager; & ne pourroit-on pas les regarder comme les premieres

(A) Lib. Antiquit. 14. Cap. 27. & Lib. 15. (B) Liv. 5. des Voyages de la haute Egypte, page 62,

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