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dira-t-on) les

entendre, & fe font obéïr, la reprefaille devient un attentat & un crime. Mais quoi Loix n'exercent point leur pou voir contre les perfides, qui trahiffent la confiance; & par confequent il est juste d'ufer contr'eux de reprefaille, la feule voye qui refte pour les punir. Si ce principe eft vrai, toutes les actions honteufes deviennent legitimes & permises. Dès qu'un homme me trompe par un mensonge, je puis le tromper par un autre. S'il me caufe du dommage par un parjure, je puis à mon tour me parju¬ rer pour lui nuire; & ainfi des autres infamies de cette efpece. Il n'y aura perfonne qui ne découvre fans peine, tout ce que cette morale a de faux & de pernicieux. Quoique les Dd

re

Loix ne déployent point leur rigueur, contre ceux qui ne bleffent que l'honneur & la probi té, il ne faut pas conclure de là, que ces malheureux ne foient ni jugez ni punis. Il y a un au tre Tribunal, devant lequel ils doivent comparoître, & qui n'eft ni moins fevere, ni moins redoutable que les Tribunaux où les Magiftrats font affis. Ce Tribunal c'est le monde; là fans égard ni pour les perfon. nes, ni pour la fortune pour les rangs, on prononce fur tout ce qui n'est du reffort pas des Loix. Veritablement on n'y connoît point l'ufage des tortu. res & des fupplices; mais on y condamne à ce qui eft mille fois plus à craindre pour un honnête homme, je veux dire, à l'opprobre, & à l'infamie. Eftce affez fçavoir tout le prix de

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ni

l'honneur, que de s'imaginer qu'un perfide qui nous trahit ou qui nous trompe, n'eft pas affez puni, quand il eft des

honoré? Et merite-t-on d'être vengé quand on ne se contente pas d'une telle vengeance? Renvoyez donc & au mon de, & à fa propre confcience votre indigne ami; livrez-le à fes remords; & n'oubliez jamais qu'il ne vous eft point permis d'être fourbe & méchant, par ce qu'il l'a été.

que

Entre les amis qu'il eft permis de quitter, je compte ceux, qui ardens & empreffez, tant la fortune vous accompa gne, fe refroidiffent dès qu'elle s'éloigne. Comme je traite ici de la veritable amitié, qui ne peut être qu'entre les hommes vertueux il est évident les que amis dont je parle, ne feront

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point capables de cette lâcheté Mais fi fur de belles apparences fi fur la foi d'une reputation mal meritée, on avoit été furpris, je croi qu'il ne faut avertir per fonne de l'interêt que l'on a de s'en détacher. Je suis même per. fuadé que ce feroit une précau tion inutile, que de les caracte rifer. Ils fçauront affez le faire connoître ; & le fage aura peine à regarder comme une difgrace, l'accident qui lui vaudra unę telle découverte.

Les veritables amis peuvent quelquefois s'oublier, & même s'endormir, lorsque leur ami eft dans la profperité; mais il n'y a que les faux amis qui fe negli gent, ou qui le perdent de vûë, lorfqu'il eft dans l'infortune. On peut fans reproche être moins empreffé dans l'état floriffant d'un heureux ami; mais on ne

peat fans infamie, abandonner un ami malheureux. Nos devoirs fe multiplient, à mesure que fes malheurs s'augmentent. Ne croyons pas avoir tout fait & être parvenus au plus haut degré de l'amitié, quand nous lui aurons fait part de nos biens. Il est vrai qu'aujourd'hui l'on paffe pour un parfait ami, lorf qu'on a pu faire un femblable effort; mais gardons-nous bien de penfer ainfi. J'ai oui dire à une perfonne qui ne fait pas moins d'honneur à son fexe par fa grandeur d'ame, que par la force & par la beauté de fon efprit, que rien ne deshono roit tant nôtre fiécle, que cette admiration qu'on prodigue à ceux qui ne font point avares de leur bien pour leurs amis.. He quoi difoit-elle un jour? Si faire part de fes biens à fes

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