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Je

de cacher au Public des qualitez qu'il ne peut trop connoître, m'a long-tems retenu. me fuis dit plus d'une fois, qu'un homme qui écrit de L'Amitié, devoit plus qu'un autre respecter le goût de fes amis. D'ailleurs, je me fouviens de vous avoir fouvent oui dire, que la Renommée n'eft point faite pour les femmes & que les plus eftimables font celles, dont le merite eft le moins connu. Enfin je n'ignore pas qu'on expofe une Dame à l'envie à la malignité, pour peu qu'on faffe entrevoir qu'elle aime les Livres, & qu'elle cultive fon

efprit. Mais des raifons plus fortes m'ont déterminé. Lamodeftie n'engage au filence que ceux qui la pratiquent, & non ceux qui l'admirent. Plus vous vous obstinez à éviter les yeux du monde, plus nous devons fonger à les attirer fur vous. Que les femmes qui affectent un air fçavant; qui à tous propos font un vain étalage d'érudition; & qui négligeant les vertus de leur état, courent fans ceffe après les vertus qui n'en font pas, foient en butte aux traits de La fatyre, elles le méritent bien. Mais pouvons-nous trop honorer les femmes, qui fidel

les à leurs obligations, préferent dans le choix des amufements, ceux qui fortifient &qui perfectionnent la rai

fon, aux frivoles plaifirs qui

qui la cor

L'affoibliffent rompent? Je ne crains donc pas MADAME, de reconnoître publiquement le droit que vous avez fur cet Ouvrage. C'est à vous que j'en dois les principales idées. F'ai bien trouvé autant de Philofophie dans vos converfations, que dans les meilleurs Livres. Vous vous êtes approprié ce qu'ils ont de plus folide & de plus déli_ cat ; & ce que vous y lez du votre n'en dimi

nuë ni la beauté, ni la force. A vous entendre parler au mi lieu d'un petit nombre d'amis

choifis

,

avec qui vous don

nez un peu plus de liberté à votre esprit, on ne peut douter que vous n'ayez fçu vous enrichir des plus eftimables trefors de l'antiquité. J'écris donc ce que fouvent je vous ai oui dire; ce que plus fouvent je vous ai vû pratiquer. Je laiffe aux autres à vanter en vous les prefens de la fortune; pour moi qu'elle n'ébloüit point, je n'attache les yeux que fur les qualitez de l'ame. Fe referve mon admiration pour une femme, dont l'esprit sçait goûá iiij

ter les plus grandes chofes, fans dédaigner les plus petites, dont la faine raifon ne trouve dans la poffeffion des faux biens que des motifs

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,

d'eftimer davantage les veritables. Je refpecte en vous une perfonne, qui n'employe point fon difcernement à trouver le ridicule des autres & à le montrer; mais à découvrir ce qu'ils ont de bon, & à le faire valoir; qui compte entre fes plus doux plaifirs, fes plus grandes richeffes, les offices qu'elle peut rendre; qui enfin ne voudroit de la fortune, que le pouvoir & les occafions de placer des bien

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