DES SATIRES DE PERSE, ET DE JUVENAL, Par le Reverend Pere TARTERON, Augmentée d' Argumens à chaque Satire, & d'une A PARIS, Chez SAUGRAIN fils, Grand'Salle du Palais, à la Providence M DCC XXXVL AVEC PRIVILEGE DU ROI : Ous voulûtes absolument, Monsieur, que la Lettre que j'eus l'honneur de vous écrire en 1689. devînt publique: on me la redemande aujourd'hui, & bien des gens se font plaints à moi, de ce qu'ils ne l'ont pas retrouvée à la tête du Juvénal dans la derniere édition de 1706. Croïez-vous qu'ils aïent raison ? Pour moi j'en doute fort; car j'y découvre quelques traits de jeunesse qui ne me conviennent plus. Non eadem est atas, non mens. J'y avois peut-être trop efficacement remedié dans la fuite, en la fupprimant presque toute. Je trouve aujourd'hui un expedient, qu'apparemment vous ne désapprouve a iij rez pas. C'est de remettre au jour ce qu'on y remarqué de passable, & qui pourroit être de quelque utilité. L'occasion en est favorable. Voici une nouvelle édition; elle me paroît plus litterale & plus éxacte que celles qui ont précédé; peut-être qu'on la lira plus volontiers, quand on la verra égaïée de nouveau par les trois caracteres que je vous ai faits autrefois des trois anciens Poëtes fatiriques tous differens, chacun selon fon humeur. Je les ai étudiés tous trois, & je les ai examinés de plus près, que je n'avois fait, afin de vous les mieux peindre. Généralement parlant, Horace est un Epicurien délicat, des plus déliés, folide néanmoins dans de louables & bonnes maximes prises absolument & en elles-mêmes : il est du reste fort plaisant & fort enjoué. Perse est obscur, sérieux & poli, d'un stile vif & presse, il dit beaucoup en peu de mots, il eft d'une fevere morale, & prétend néanmoins être grand rieur; je ne vois pas pourquoi. Pour Juvénal, il m'a paru depuis vingt ans s'humaniser un peu: je ne sçai d'où cela vient: peut-être que, comme il y a long-tems que je le connois, & que je me fuis, pour ainsi dire, familiarife avec lui, à force de retoucher cette traduction, il est devenu insensiblement d'un plus facile accès à mon égard. Dans le fond, quand je l'éxamine, fon humeur n'a guére change; il a toujours l'air chagrin, & fon portrait gravé au commencement de ce Livre, & animé de ce joli mot qui vient de lui. |