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Egyptus cependant, ce Roy dont à la fois,
L'Egypte prend le nom, & reconnoît les lois;
Ce Roy, qui dans les champs que le Nil rend fertiles,
Peut à peine nombrer fes Etats & fes Villes,
De nouvelles frayeurs commence à me remplir,
Et je vois que l'Oracle eft prêt à s'accomplir.
Les Dieux, également partageant nos familles
Luy donnerent des fils autant qu'à moy de filles,
Et par autant de noeuds il pretend les unir.
Nul détour, nul égard ne peut le retenir.
Un Envoyé fecret m'expliqua fa penfée;
Et fi fur fes deffeins mon ame balancée
Ne confent à fon choix, un monde de Soldats
Sur les traces bientôt innondant mes Etats,
Il viendra fe vanger d'une frivole excufe,
Et ravi dans mes bras ce que je luy refuse.
ARCAS.

Je l'avouray, Seigneur, interdit & glacé,
Je fremis du peril qui vous eft annoncé.
Egyptus voudroit-il expofer votre vie?
Avec luy de trop prés, Seigneur, le fang vous lie
De Neptune fortis, le plus pur fang des Dieux.
A coulé jufqu'à vous par les mêmes Ayeux.
La vive ardeur fi-tôt n'en fçauroit être éteinte.
Expofez à fes yeux l'Oracle & votre crainte ;
Marquez-luy...

DANAUS.

Je l'ay fait, & par mon ordre Iphis Eft allé le chercher dans les murs de Memphis. Va, luy dis-je en partant, & mets tout en ufage, Du fuperbe Egyptus defarme le courage, Parle, implore, flechy. Si tes efforts font vains Explique-luy du Ciel les decrets. fouverains; Fay-luy voir de ma mort l'Arrêt irrevocable Enfin, retire-moy de l'horreur qui m'accable.

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Dans ce moment,

'ignore le fuccés, mais dans ce même jour,
Arcas, tu vas voir fon retour.
Je l'attends, & mon cœur dans fon impatience,
Prés d'apprendre fon fort, en craint la connoiffance.

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Eh! que puis-je efperer?
De nouvelles frayeurs je me fens devorer.
Chaque inftant les redouble, & nul heureux prefage
De la faveur du Ciel ne vient m'offrir le gage.
Autour de nos Autels, vainement affemblez,
Nos Prêtres, fur mon fort, interdits & troublez
Attendent que des Dieux la voix fe faffe entendre;
Ils font muets. Le fang qu'on s'empreffe à répandre
Des Victimes forti fe glace fur leur flanc,
Et coulant à regret, n'annonce que
du fang.
Mais apprenons d'Iphis ce qu'aura fait fon zele,
Arcas, je l'apperçois.

SCENE IV.

DANAUS, ARCAS, IPHIS

..

DANAUS.

EH! bien quelle nouvelle,

Iphis? M'apportez-vous un barbare refus ?

Parlez.

IPHIS.

N'efperez pas de fléchir Egyptus,

Seigneur, dans les deffeins ce Prince impenetrable,

Toujours dans fes refus demeure inexorable;
Et fes fils dans Argos arrivant après moy,
A vos filles, Seigneur, viennent donner leur foy.

Juftes Dieux!

DANAUS.

IPHIS.

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J'ay parlé, mais fa bouche cruelle Condamne également votre crainte & mon zele. J'ay du grand Apollon revelé les avis, Et ce qu'unit le fort à l'hymen de fes fils. J'ay dit que de ces noeuds la fatale journée, Eft le terme preferit à votre destinée. Soit qu'en d'autres climats inftruit d'une autre loy A d'autres Dieux peut-être il donne plus de foy; Soit qu'à votre prudence il impute l'Oracle, Ses injuftes deffeins ne fouffrent point d'obstacle. Que Danaüs furmonte un fcrupule odieux, Dit-il, je luy répons de mes fils & des Dieux. Hypermneftre eft, dit-on, fa fille la plus chere, Et de tous mes enfans, le plus cher à fon pere, C'eft Lyncée: A jamais qu'ils foient unis tous deux. Je luy laiffe le foin de tous ces autres nœuds. Qu'au gré de fes defirs reglant ces hymenées, Il confulte les cœurs, & compte les années; Et dans le doux efpoir d'un bonheur infini Que le fang de Neptune ainfi foit réuni. Il dit, & fon oreille à ma plainte se bouche. Moy, conduit juqu'aux bords où par plus d'une bou

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Le Nil porte à la Mer le tribut de fes eaux,
Sur les pas de fes fils j'entre dans fes vaisseaux.
Un feul manque à leur nombre, un feul, & c'est
Lyncée.

Il avoit pris, dit-on, une route oppofée ;.

Ses fieres aujourd'huy doivent le rencon.er

Et comme eux, dans Argos vous l'allez voir entrer, Ils viennent fur mes pas.

DANAUS.

Eh! que penfent-ils faire ?. Ofent-ils à ce point irriter ma colere?

Et du throne à leur gré, bravant ainfi les droits,
Jufques dans mon Palais m'apportent-ils des lois?
Non, j'attefte des Dieux la fuprême puiffance,
Ma main va dans leur fang expier cette offenfe.
Duffe-je des malheurs dont je fuis menacé,
Par mes propres efforts voir l'effet avancé',
Ils mourront. Trop fouvent, au gré de fon caprice,
Du Barbare Egyptus j'éprouve l'injuftice.
Ne m'a-t-il pas jadis indignement chaffé

D'un throne out, comme luy, les Dieux m'avoient placé ?

A tous deux, par le fang, également aquife,
L'Egypte, ainfi qu'à luy, devoit m'être foumife.
Le cruel m'en bannit. Ah! d'un tel souvenir,
Le vifreffentiment ne peut fe retenir;

Et lors qu'il m'ofe offrir une vangeance aifée,
Faudra-t-il, d'un œil ferme, & d'une ame appaifée,
Attendre que fes fils achevant fon deffein,
Me viennent enfoncer un poignard dans le fein?
Non, l'Oracle m'inftruit à punir leur audace.
Si leur pere joignant l'effet à la menace,
Pour attaquer Argos, abandonne Memphis,
Qu'il en parte du moins, affoibli de fes fils.
Donnons de mes tranfports un fanglant témoignage.
La vangeance fe doit égaler à l'outrage.

Aux yeux de l'Univers, dans mon propre Palais,
Par des forfaits nouveaux, repouffons les forfaits.

ARCAS.

Ah! pour fauver vos jours, ofons tout entreprendre. Allons tous...

DANAUS.

Non, plûtôt, cherchons à les furpréndre: Prêts, quand il fera temps, à les envelopper; Qu'aucun de ces cruels ne puiffe m'échapper. Si tout eft criminel, il faut que tout periffe. Pour les mieux accabler, employons l'artifice, Et par un feint accueil déguifant mes deffeins, En les diffimulant, rendons les plus certains. à Iphis.

Vous, faites qu'en ces lieux Hypermnestre fe rende.

**********************

SCENE V.

DANAUS, ARCAS.

DANAUS.

P Revenons, cher Arcas, les maux que j'apprehende,

Contre mes ennemis uniffons aujourd'huy
Tout ce dont ma fureur peut fe faire un appuy.
Je ne le cache point, leur abord m'épouvante.
Cours aprés l'Etranger. Ouy, fa main triomphante
M'a déja retiré d'un peril trop certain,

Et peut conrre eux encor foutenir mon deffein.
Fay que d'un jour au moins fon départ fe differe;
Dy-luy que fa prefence icy m'eft neceflaire,
Qu'une derniere fois je veux l'entretenir;
Enfin, pour mon repos, fonge à le retenir.
Bien-tôt de mesdeffeins l'entiere confidence
Tinftruira... Laiffe-nous, Hypermneftre s'avance.

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