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I DA S.

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Eh pourquoy la cacher ? Deux mois font écoulez
Depuis que
dans ces lieux en fecret vous brûlez.
Pour fuivre des grands coeurs la carriere ordinaire,
Vous voulûtes quitter l'Egypte, & votre Pere;
Et cachant votre fort fous un nom étranger
Vous cherchâtes par-tout la gloire & le danger.
Le hazard, prés d'Argos prit foin de vous conduire
Au moment que deux Rois ardens à fe détruire,
Balançant du combat le fuccés incertain,
Sembloient, pour decider, attendre votre main.
A Danaus uni par le fang qui vous lie,
Le premier de vos coups luy conferva la vie;
Et le Roy de Corinthe éloigné pour jamais,
En fuyant luy laiffa la victoire & la paix.
Quels honneurs, feurs témoins de fa reconnoiffance,
Danaus n'a-t-il point offert pour récompenfe
Par quels biens n'a-t-il point voulu vous attacher ?
Dans la Cour, cependant, foigneux de vous cacher,
Vous déguifez toujours quel fang vous a fait naître.
Vous n'aviez qu'à parler, qu'à vous faire connoître,
Et bien-tôt votre amour prevenu par le Roy,
Eût reçû...

LYNCE' E.

Danaus n'eft pas connu de toy, Un obftacle puiffant dont il cache la caufe, A l'hymen de fa fille inceffamment s'oppofe; Et le Roy de Corinthe a trop bien éprouvé, Que pour d'autres deffeins fon fang eft refervé. Sur des pretextes vains cette guerre entreprise, N'étoit que pour garder une fille promife. J'ignore les raifons qui dans un fi haut rang, Peuvent de Danaus profcrire ainfi le fang: Mais tels font fes deffeins: foit raifon, foit caprice, -Ses filles de fes lois éprouvent l'injuftice,

Et n'ofe fe flatter que jamais à leurs vœux;
Il accorde d'hymen les honorables nœuds.
Tu fçais comme Hypermneftre à mes yeux presentée,
Triompha, dés l'abord, de mon ame agitée;
Que mon cœur trop fenfible au plaifir de la voir,
Dés ce premier inftant reconnut fon pouvoir.
Inftruit des fentimens & des foins de fon Pere,
'Ay-je dû declarer une ardeur temeraire ?
Pour ne point effuyer un indigne refus,
Je voulus m'affurer le fecours d'Egyptus.
Dés long-temps à fes fils, pour unir nos familles
Idas, de Danais il deftinoit les filles.
Flatté de ce deffein, & pour l'y confirmer,
D'abord de mon amour j'eus foin de l'informer.
Mentor partit: par luy je luy faifois connoître
Tout ce que dans mon coeur Hypermnestre a fait
naître.

Mais, foit que d'Egyptus je ne fois plus cheri,
Soit enfin que Mentor dans les flots ait peri,
Vainement de Memphis j'attends une réponse;
Tu vois trop quels malheurs ce filence m'annonce.
D'autres deffeins peut-être occupent Egyptus,
Et moy-même je vais.... Mais je vois Danaus.

SCENE II.

DANAUS, LYNCE'E, ARCAS, IDAS.

DANAUS.

Enfin, jeune Guerrier, votre départ s'apprête

Mon foin eft inutile, & rien ne vous arrête.

Je ne veux point icy vous imposer de loy;
Mais comment m'acquiter de ce que je vous doy
Si de votre vertu craignant la recompenfe,
Vous futyez les effets de ma reconnoiffance?
LYNCE' E.

Seigneur, de trop d'honneur vos bontez m'ont comblé
Par quelques foins preffans loin d'Argos appelle,
Senfible à ces bontez qui font toute ma gloire,
Je vais en d'autres lieux en garder la memoire,
DANAUS..

Je ne vous retiens plus, & n'ofe penetrer

Un fecret qu'à mes yeux yous craignez de montrer. Allez, noble Etranger, appuy de ma Couronne, Seur des droits que fur moy votre vertu vous donne En tous temps, en tous lieux, employez le fecours D'un Roy dont votre main a confervé les jours.

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I Left

SCENE III.

DANAUS, ARCAS.

DANAUS.

Left temps de t'ouvrir mon ame toute entiere. D'un fidele confeil prête-moy la lumiere

Arcas, & dans les maux dont j'éprouve l'horreur, Eclaire mon efprit, & raffure mon cœur.

ARCAS.

Pouvez-vous du deftin craindre quelque difgrace? DANAUS.

"

Dieux puiffans, détournez le coup qui nous menace,

Terminez mes frayeurs par un heureux fecours,
Et daignez aujourd'huy prendre foin de mes jours.
ARCAS.

De vos jours! Qupy Seigneur, douteriez-vous encore
Du fecours de ces Dieux que votre bouche implore?
Vous l'avez éprouvé dans ce dernier combat,
Qui du Roy de Corinthe a puni l'attentat.
L'Etranger en partant, caufe-t-il ces allarmes ?
Incertain en quels lieux il va porter fes armes..
DANAUS.

Non, d'un foin plus preffant mon efprit occupé,
Se livre entier au coup dont il fe fent frappé.

ARCAS.

Eh quoy, fe pourroit-il qu'une main inhumaine?. ¿

DANAUS.

Ecoute, & juge aprés fi ma frayeur est vaine.
Sur le Throne d'Argos appellé par les Dieux,
Je fixe de mon Peuple & le cœur & les yeux.
Tout m'aime, tout me craint. Glorieux & tranquille
Dans mes vaftes projets j'ay trouvé tont facile;
Le fort toûjours conftant à fuivre mon parti,
Sur mes profperitez ne s'eft point démenti.
Des Dieux même, des Dieux la favear liberale,
M'offre dans mes enfans une fortune égale,
Mes filles, riche don de leurs foins bienfaifans,
En flatant mon amour honorent mes vieux ans.
Quel efpoir! ru connois leur vertu & leur nombre
Et fade l'avenir perçant le voile fombre,
Ses fecrets jufqu'à moy n'étoient point parvenus,
Nuls troubles, nuls chagrins ne me feroient connus.
Fatale erreur, toûjours de mille maux fuivie!
Peu contens de jouir d'un fort digne d'envie,
Du foin de l'avenir nos vœux accompagnez,
S'attachent à prevoir des malheurs éloignez;
Et d'un deftin obfcur cherchant la connoiffance,
A j

Au fort qui nous attend nous livrent par avance.
Je l'éprouve. Enyvré de mon heureux destin,
Je voulus que les Dieux en marquaffent la fin.
J'interroge Apollon, je reçois fa réponse.
Prête l'oreille, Arcas, entens ce qu'il m'annonce
Il faut du fang pour contenier le fort.

Tes filles dans leurs mains tiennent ta destinée.
De tes Gendres previen l'effort.

Si leur trepas de prés ne fuit leur hymenée
Tu ne peux éviter la mort.

Quel Oracle!

ARCAS..

DANAU S.

pas.

D'abord mon ame en fut faifie Tout me parut s'armer pour m'arracher la vie. A toute heure, en tous lieux je croyois rencontrer Une invifible main prête à me maffacrer. Je mourois mais joignant l'artifice au filence, Mon cœur de fon effroy cachoit la violence, Et laiffoit imputer fon trouble & fes combats,. A des chagrins communs qu'il ne reffentoit Que ne peut point enfin une longue habitude? Ma crainte fut plus foible, & ma peine moins rude. J'examine du Ciel les decrets fouverains, Et je vois que ma vie eft remife en mes mains.. Je reprens mes efprits, & mon ail fe deffille. Profcrivons pour jamais l'hymen de ma famille,. M'écriay-je; les Dieux m'offrent par ce fecours, Un moyen éternel de prolonger mes jours. Depuis, & tu l'as veu, toujours avec adreffe, J'ay rejetté les voeux des Princes de la Grece.. Par de fauffes raifons, par des pretextes vains J'ay trompé leur amour, & détruit leurs deffeins.. Je les éloigne tous, & ma jufte prudence Del'hymen à mon fang interdit l'efperance

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