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La ferveur fe relâche, les forces fpirituel les s'ufent, l'homme prend peu à peu le deffus fur le Miniftre: c'est ici où vous ve-nez ranimer ce qui commençoit à languir, & vous renouveller dans le premier efprit de votre ministère; feconde Réflexion.. Enfin, le Clergé de ce grand Diocèfe a befoin d'exemples; vous le leur donnez, en leur montrant par votre exactitude édifiante à venir vous recueillir dans cette maifon fainte, les précautions qu'ils doivent prendre pour remplir dignement leur mini-ftère; dernière Réflexion.

Voilà, mes Frères, quels font les avantages inféparables de la retraite dans cette: maifon fainte, où je vous vois avec tant de confolation affemblés.

Nos fonctions font fi faintes, mes Frè-REFLE

res, vous le favez, elles demandent des difpofitions fi pures, fi dignes des mystères que nous traitons! il eft difficile aux Miniftres les plus fidèles de s'y préfenter tou-jours avec cette foi, ce zèle, cette pureté d'ame, fans quoi Dieu nous vomit, & ne nous fouffre qu'avec dégoût aux pieds des: autels fous les yeux de fa majefté fainte &c. terrible. Ce font-là de ces fautes qui ne réveillent pas la confcience: elles nous ôtent une certaine bienveillance tendre de Dieu, & nous laiffent pourtant toute notre tranquillité: elles nous dépouillent peu à peu de ces dons parfaits qui font les faintss

Miniftres, & nous rendent pourtant infenfibles à nos pertes. Je ne parle pas de la patience, de la douceur, de la charité que nos fonctions mettent fouvent à l'épreuve, & où il eft difficile d'être toujours en garde contre foi-même. Que de momens où l'humeur, la rudeffe, l'impatience prennentla place du zèle & de la charité ! que d'occafions, où le dégoût, la pareffe, peut-être des antipathies fecrettes, que fai-je ? quelques mécontentemens perfonnels, nous font refufer, ou rendre de mauvaife grace, & comme malgré nous, des fervices à nos peuples, que leurs befoins & nos fonctions exigent de nous! combien d'autres, où la mauvaise honte, la crainte de paffer pour ridicule & pour être de mauvaife compagnie, nous font approuver, imiter peut-être des abus que nous condam nons, & oublier jufqu'à un certain point la décence & la fainte gravité de notre miniftère.

Cependant les occupations extérieures & continuelles de nos fonctions, nous ca- . chent à nous-mêmes cet état d'infidélité, ou ne nous laiffent pas le loifir d'en appro fondir la difformité, & l'obftacle qu'elles mettent aux bontés de Dieu pour nous, & au fuccès de notre ministère. Nous amaffons peu à peu un tréfor de colère que nous ne connoiffons pas, un fonds opposé aux deffeins de Dieu fur nous, qui n'offrant rien de marqué par les crimes, ne trouble pas

notre fauffe paix ; & comme les ténébres font toujours la jufte peine de nos infidélités, plus nous les multiplions, plus nous nous calmons; parceque plus les lumières qui devroient nous avertir, & nous ouvrir les yeux, s'éteignent. Voilà, mes Frères, la fource la plus commune du déréglement & de la défection entière de ceux que Dieu appeile au faint ministère; il n'eft presque point pour nous de faute légère; plus Dieu demande & attend de nous, plus il fe refroidit & s'irrite, quand nous lui manquons; plus nous lui fommes confacrés, plus la moindre tache nous fouille & nous rend difformes à fes yeux. Nous fommes la lumière des peuples: le plus léger nuage obfcurcit cet éclat, & nous rend comme ténébreux aux yeux de celui qui nous avoir établis comme des lampes ardentes & toujours luifantes nos fautes deviennent comme des éclipfes, qui renverfent l'ordre de la grace fur les Fidèles, & laiffent dans les ténébres cette portion de l'Eglife que nous étions chargés d'éclairer.

Or c'est ici, mes Frères, où ces infidélités qui avoient comme difparu au milieu du tumulte de nos fonctions, reparoiffent à nos yeux. C'eft dans ce faint loifir, que repaffant dans la lumière de la foi, fur tout le cours de notre ministère, nous découvrons les lieux, les occafions, les circonftances, où notre fidélité s'eft démenzie; nous fentons que malgré l'opinion des

hommes, & les fauffes louanges qu'ils don nent à quelque extérieur de régularité qu'ils voyent en nous, il s'en faut bien que nous foyons de ces Miniftres faints & fidèles, dignes de difpenfer les myitères de Dieu. L'éloignement que nous trouvons de ce que nous fommes à ce que nous devrions être; de la fainteté fublime de notre état, aux foibleffes, aux misères, à la pefanteur de toute notre vie; nous frappe, nous hu milie, nous effraye. Nous gémiffons fur nos infidélités paffées; nous formons mille faintes réfolutions, mille projets d'une vie plus féricafe, plus occupée, plus facerdotale : nous entrons dans les détails qui regar-> dent toute notre conduite extérieure: nous examinons les lieux, les tems, les occafions où notre fragilité s'eft laiffé furprendre nous rentrons en nous-mêmes pour aller jufqu'à la fource du mal, & découvrir quels font en nous les panchans qui ont aidé aux occafions & facilité nos chûtes: nous préparons de loin les remédes & les pré-cautions néceffaires pour ne pas être de nou veau furpris: ainfi, nous rentrons dans nos: fonctions, dans cette fainte milice, munis: de nouvelles armes; nous y rentrons avec: `moins de cette confiance qui précéde tou-jours les chûtes, mais auffi avec plus de sûreté. Un Pilote échappé du naufrage, eft moins téméraire ; mais inftruit par fes propres malheurs, des écueils où il s'eft brifé, il prend des mefures plus folides & plus sûress

sures pour les éviter. Et ce qui doit enco re plus vous confoler mes Frères, dans ce faint exercice, & vous faire mieux fen. tir la prédilection de miféricorde de Dieu fur vous, c'eft que les infidélités font com munes parmi ceux qui font appellés au faint ministère, & que ces regrets & ces changemens, que forme en nous une piété tendre & touchée, font fort rares. La plupart vivent jufques à la fin de leur courfe comme ils avoient vécu en la commençant ; s'ils y changent quelque chofe, c'eft en empirant; c'est qu'ayant commencé avec quelque apparence de régularité & de zèle, ils continuent bientôt en découvrant toutes les inclinations vicieufes que ces commencemens fpécieux avoient cachées, & qui, laffées pour ainfi d re, de fe contraindre, s'échappent enfuite avec moins de retenue & plus de fcandale. Nous voyons tous les jours dans le monde de fimples Fidèles, qui touchés de Dieu, changent de vie, & de' grands pécheurs qu'ils étoient, deviennent Pexemple & l'édification d'une ville: mais Rous ne voyons point de ces changemens parmi les Prêtres; ce qu'ils font une fois, ils le font toujours: il femble qu'élevés audeffus des Anges par nos fonctions, nos premières chutes capitales, comme les leurs, font fans retour. D'où vient, mes Frères? c'eft que l'abus des chofes faintes étant prefque toujours une fuite infaillible de nos égaremens, nous attire cet anathe Conf. Tom. II.

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