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froid dangereux de votre ame; Dieu vous parlera, & ces os arides fe ranimeront comme ceux que vit le Prophéte, à fa feule parole: Offa arida, audite verbum Domi- Ezech. ni. Vous deviendrez comme des hommes 37.4. nouvellement créés; vous fortirez de ce licu faint', de ce nouveau cénacle, embrafés d'un feu tout nouveau: une fainte ivreffe, une plénitude de l'Efprit de Dieu vous fera mépriser tous les refpects humains, qui avoient comme enchaîné votre zèle & retenu la vérité captive; vous fera rompre toutes les liaisons inutiles qui vous déroboient à vos devoirs; vous affermira contre tous les exemples & les occafions qui avoient affoibli vorre piété : le fuccès de vos fonctions répondra à la nouvelle ferveur avec laquelle vous les remplirez: vous verrez votre troupeau fe réveiller, pour ainsi dire, & fe renouveller avec vous; & l'Efprit de Dieu répandu fur le Pafteur & fur fon peuple pourra dire encore: Ecce nova Apec 21. facio omnia. Quelle confolation, mes Frè- 5. res, pour un bon Prêtre, de voir fructifier la parole de l'Evangile dans cette portion du champ de Jefus-Chrift qui lui eft confiée d'y voir chaque jour quelques armes délivrées de la fervitude du démon & du péché, & rendues à Jefus-Chrift! & au contraire quels retours effrayans pour un Miniftre à qui il reste encore quelque foi, de voir, que pendant le cours d'un long miniftère, il n'a pas retiré une feule ame des

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voies de la perdition; il n'a corrigé aucun défordre ni public ni particulier dans fa Paroiffe; il n'y a opéré aucun changement! Sa vie irréprochable d'ailleurs aux yeux des hommes, peut-elle le raffurer fur la longue inutilité de fes fonctions? & ne doit-il pas en chercher la caufe plus dans fa tiédeur, dans le relâchement de fa piété, dans le vuide de l'Esprit de Dieu, qu'il a laiffé éteindre en lui, faute de venir l'y renouveller ici, que dans l'endurciffement de fon peuple? C'est au fortir de la fainte retraite. du cénacle, que les Apôtres auparavant foibles, timides, jaloux des premières places, encore à demi charnels, parurent de nouveaux hommes ; & que fe répandant parmi les peuples, comme des lampes ardentes & luifantes, ils embrâsèrent tout l'univers de ce feu divin que Jefus-Chrift étoit venu porter fur la terre. C'est en defcendant de fa retraite fur la montagne, qu'Elie alloit reprocher avec une fainte fermeté aux Rois d'Ifrael l'abomination de leurs veaux d'or; qu'il purgeoit le peuple de la multitude des faux Prophétes; qu'il faifoit defcendre à fon gré la pluie du ciel fur la terre; qu'il rendoit la vie aux morts, & qu'il mérita d'être tranfporté dans un char de lumière, & réfervé pour venir encore s'oppofer à la fin des tems aux preftiges de l'homme de péché. C'eft au fortir du défert & de la retraite que Jefus-Chrift luimême commença fon ministère; c'eft en fe:

retirant de tems en tems feul pour prier fur la montagne, qu'il le continua, & qu'il fit des œuvres que perfonne avant lui n'avoit faites. Il n'avoit pas befoin fans doute de ces précautions; mais il vouloit nous laiffer des modèles de conduite, & pouvoir dire à tous fes Miniftres, en la perfonne des Apôtres: Je vous ai laiffé l'exemple, afin que vous faffiez un jour ce que vous m'avez vû pratiquer à moi-même..

Et certes, mes Frères, tous les faints: Fondateurs des Ordres réguliers; dans ces régles fages & faintes qu'ils ont laiffées à leurs Difciples de l'un & de l'autre fexe, ont tous ordonné, comme un article effentiel de leur régle, un certain tems chaque année de recueillement & de retraite, pour ranimer leur ferveur & fe renouveller dans l'efprit de leur état. Hélas, mes Frères,. ces hommes infpirés de Dieu, ces faints Patriarches des Ordres monaftiques, ont cru que des hommes affujettis à une régle auftère, féparés du monde, confacrés à la prière & à la pénitence; dépouillés de rout, de leurs biens, de leurs efpérances mondaines, & de leur liberté même par le facrifice de l'obéiffance; ils ont cru, que ces hommes dans le fond de leurs retraites, au milieu de tous les fecours dont ils étoient environnés, couroient rifque de fe relâ-cher, de décheoir de leur première ferveur, de languir dans la carrière fainte où ils étoient entrés, fi on ne leur prefcrivoit

chaque année un tems d'une retraite & d'une féparation encore plus entière pour rentrer en eux-mêmes, pour réveiller leur langueur, pour prévenir des chûtes plusdangereufes, & renaître, pour ainfi dire, dans le premier efprit de leur faint Inftitut. Et nous, mes Frères, expofés fans cesse à la contagion du fiécle: nous, environnés de mille périls: nous, obligés de vivre au milieu de tant de fcandales, de tant d'exemples qui nous affoibliffent ou qui nous féduifent ; nous, fouvent au milieu des campagnes livrés à nous-mêmes; feuls, fans fecours, fans aucune fociété fainte qui nous foutienne, n'ayant pour tout appui que nous-mêmes, nos langueurs, notre indolence, nos panchans de chair & de fang, ne voyant rien autour de nous qui nous rappelle à nous-mêmes; nous, mes Frères nous pafferions toute notre vie fans rien craindre dans cet état ? nous croirions que la précaution d'un certain tems de recueillement jugée fi néceffaire aux ames les plus retirées, nous eft inutile? & nous la regarderions comme une de ces pratiques indifférentes, où il entre plus de zèle que de néceffité? Nous, mes Frères, occupés à des fonctions dont la fainteté fouvent nous touche peu, & dont le tumulte & la variété nous diffipe; nous, fans ceffe obligés de fonder les plaies & la corruption des confciences, & de nous prêter à des récits honteux qui laiffent ea nous mille images

dangereuses; nous, en un mot, chargés de ministères dont les Anges trembleroient, & nous trouvant tous les jours par leur long ufage même, moins touchés de ce qu'ils ont de faint & de terrible, & par conféquent nous en acquittant avec moins de Becueillement & de piété; nous laifferions les remédes de la retraite à des Solitaires qui devroient n'en avoir pas befoin; & au milieu des périls infinis de notre état, nous nous croirions en sûreté, fans prendre du moins quelque tems, ou pour les connoître, ou pour examiner fi notre fidélité ne s'y eft jamais démentie ? nous, mes Frères, établis pour être les Pafteurs & les modèles des Réguliers; nous, élevés par notre miniftère à un dégré fupérieur de grace & d'autorité, qui exige de nous plus de perfection & de fainteté ; nous enfin, les Pasteurs & les chefs du troupeau dont ils ne font que les membres & les ouailles.

III.

ET enfin, mes Frères, à des motifs fi RI!!

intéreffans, & fi capables de toucher tous les Miniftres confacrés aux fonctions faintes, permettez-moi d'ajoûter encore une nouvelle Réflexion qui vous regarde en particulier. Plus ce Diocèfe eft valte, plus il eft à craindre que cet ancien efprit facerdotal ne s'y éteigne peu à peu. La distance des lieux nous ôte la connoiffance de beaucoup de maux, & fufpend les remédes que nous y pourrions apporter ; l'éloignement

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