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de la fource fait que les branches les plus écartées languiffent fouvent dans la féchereffe le mal gagne infenfiblement, & avec d'autant plus de danger, qu'il gagne en fecret, qu'il gagne loin de nos yeux, & qu'il faut qu'il foit pouffé jufqu'à des fcandales & à des imprudences d'éclat, pour nous en inftruire. Quel reméde à un malheur qui peut devenir général, & infecter peu à peu toute la maffe? c'eft que Dieu qui veille fur ce vafte Diocèfe, fur cette ancienne & illuftre portion de fon Eglife, fur laquelle il ne faut pas douter que les prières de tant de faints Evêques nos prédéceffeurs, profrernés devant le trône de fa gloire, & fans ceffe occupés des befoins du troupeau qui leur a été fi cher, n'attirent des regards particuliers de la protection & de la miféricorde divine; c'eft que Dieu, dis-je, y conferve toujours un certain nombre de Pafteurs fidèles, refpectables par leur âge & par leur piété ; fidèles à venir fe recueillir ici, & à s'y renouveller dans l'efprit de leur vocation: c'eft leur exemple qui anime les nouveaux Miniftres, & qui leur montre le modèle & la régle de conduite, à laquelle ils doivent fe conformer. Vous êtes donc, mes Frères, ce précieux levain que Dieu conferve dans ce vafte Diocèfe, non-feulement pour empêcher toute la maffe d'aigrir & de fe corrompre, mais pour la fanctifier peu à peu, pour l'étendre, l'augmenter & en multiplier la bé

nédiction; c'est de vous que l'efprit facerdotal coule fur les nouveaux Miniftres. Ils trouvent, entrant dans le ministère, ce défaveu public & refpectable de la conduite peu édifiante de beaucoup de Miniftres dont l'exemple auroit pu les féduire : c'eft une barrière inébranlable que la bonté de Dieu nous conferve, & qui ne permet jamais à la contagion de devenir générale. Difperfés par l'ordre fecret de la Providence dans les différens lieux de ce grand Diocèfe, vous êtes comme placés-là de la main de Dieu pour préferver votre voifinage, & contenir par votre exemple ceux de vos confrères qui vous environnent. S'ils ne vous imitent, ils ont du moins fans ceffe devant les yeux ce qu'ils devroient imiter; fi votre exemple ne les convie pas à remplir les devoirs de leur ministère, du moins il ne leur permet pas de les ignorer. La honte d'une conduite fi diffemblable à la vôtre; la grace de leur ordination, qui peut-être n'eft pas encore tout-à-fait éteinte; leur éducation dans ces maisons faintes, & les vérités dont on les a nourris: tout cela fe réveille tôt ou tard, & ils commen cent à fuivre de loin vos traces; par-là T'efprit du facerdoce fe conferve, & fe perpétue dans ce Diocèfe. Oui, mes Frères il en eft de la milice fainte comme de celle du fiécle: dans celle-ci il ne faut qu'un petit nombre de foldats aguerris dans certains Corps fameux , pour communiquer aux

nouveaux venus, & y perpétuer ce premier efprit de valeur & cette réputation militaire qui les diftingue des autres troupes; en y entrant il femble qu'on fe fent d'abord faifi du même efprit qui anime les anciens : il en eft de mêine dans un Diocèfe; un petit nombre d'anciens & de vénérables Pafteurs y conferve & y perpétue ce premier efprit facerdotal, & cette réputation de régularité & de difcipline qui le diftingue; il femble que les nouveaux venus font faifis & animés de cet efprit en y entrant ils craindroient de dégénérer & d'être regardés comme l'opprobre de la milice fainte, s'ils s'écartoient de l'efprit général qui paroît dominer dans leur corps. Nous vous regardons donc, mes Frères, comme chargés du précieux dépôt de l'efprit facerdotal qui fe conferve entre vos mains dans ce Diocèfe, & qui de-là doit paffer à ceux que nous affocions tous les jours au faint ministère. Continuez donc mes chers Frères, & ne vous laffez point dans cette carrière apoftolique, où vous avez paru jufqu'ici à la tête des Miniftres qui devoient la remplir comme vous: fouvenez-vous que vous êtes les principales colomnes de ce grand édifice qui nous eft confié ; & que pour peu qu'on vous, voye mollir ou chanceler, votre affoibliffement feul ébranleroit tout le refte. Nous vous parlons ici, comme difoit faint Cyprien à la plus illuftre portion de fon troupeau,

aux vierges faintes, nous vous parlons plus avec la tendreffe d'un père qu'avec l'autorité d'un fupérieur: Plus affectione quàm po- 3. Cypv. teftate. Vos infidélités paroîtroient un modèle sûr à ceux de vos Confrères qui ne cherchent qu'à fe juftifier de leur défection: plus votre réputation annonce la régle, plus votre conduite doit l'exprimer & la manifefter: on rabat pour toujours des devoirs, ce qu'on vous en a vû négli ger une feule fois. Aidez-nous donc, mes Frères, à foutenir le poids de la follicitude paftorale, fous lequel nous fuccomberions, fi vous, qui êtes nos coopérateurs, ne portiez avec nous une partie du fardeau : retournez dans vos Eglifes remplis de cet efprit qui vous anime depuis long-tems, & dans lequel vous venez encore de vous renouveller: répandez-y encore avec plus d'abondance les dons de grace & de piété dont vous êtes remplis. Ne bornez pas à vos peuples feuls le zèle de la maifon de Dieu; animez vos Confrères par vos exemples, & par ces douces infinuations de la charité qui gagnent les cœurs: qu'ils ne vous regardent plus comme leurs cenfeurs, mais comme leurs amis & leurs frères: ne vous prévalez au-deffus d'eux de votre régularité, que pour être plus doux, plus Charitables à leur égard, plus prêts à excufer leurs foibleffes, & à louer tout ce qu'ils peuvent avoir encore de louable: c'eft ainfi qu'on rend la vertu aimable à

ceux-mêmes qui en paroiffent les plus éloignés. Attirez-vous par les douceurs de l'amitié & d'un fupport charitable, la confiance des Miniftres dont la conduite ne répond pas à la fainteté de leur ministère : qu'ils vous deviennent plus chers, à mefure que vous voyez qu'ils s'égarent: ne vous rebutez pas, quoiqu'ils paroiffent rebuter eux-mêmes vos douces remontrances; la charité eft patiente, & fouffre tout: forcez-les, pour ainfi dire, de vous aimer, s'ils ne peuvent encore vous imiter: fongez qu'en ramenant un feul de vos Confrères vous fauvez tout un peuple. On fe fait quelquefois une espéce de devoir de rompre tout commerce avec certains Miniftres moins édifians; on les fuit comme des anathêmes; on évite avec une manière de hauteur, tout ce qui pourroit nous obliger de communiquer avec eux: il femble qu'on veut leur faire fentir avec oftentation la dif férence qu'il y a d'eux à nous: ce n'eft pas là l'Esprit de Jefus-Chrift; c'est l'efprit de ces deux difciples peu inftruits, qui vouloient faire defcendre le feu du Ciel fur une ville infidèle. Je fai qu'il ne faut pas autorifer les égaremens de nos Confrères par une affiduité de fociété qui femble les approuver: mais il y a de l'orgueil & de l'inhumanité à les abandonner, parcequ'on voit qu'ils fe perdent; notre tendreffe pour eux doit, pour ainfi dire, redoubler à mefure que leurs maux empirent; il faut leur

faire

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