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mandoient pour affembler le concile, lefquelles,

AN. 1561. fi on les accordoit, tendroient à la ruine entiere de la foi de l'églife. Et parce qu'entre les difficultés propofées par l'électeur, fa principale étoit de fçavoir, fi l'on accorderoit le droit de fuffrage aux Proteftans; le nonce répliqua qu'en accordant cette faveur à ceux de la confeffion d'Aufbourg, on ne pourroit la refuser aux partisans des autres fectes, qui font prefque fans nombre ; ce qui renouvelleroit la confufion de Babylone.

XXIII

Il va trouver le

debourg & l'ar

debourg.

4. n. 6.

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La converfation entre l'électeur & le nonce fut marquis de Biar- affez longue, & roula fur beaucoup de chofes que chevêque deMag- ce prince avoua n'avoir pas comprifes ni entendues jufqu'alors, & il parut fi fatisfait des réponses foliPallav. ibid. cap. des que le nonce fit à toutes fes difficultés, qu'il ne put s'empêcher de dire en foupirant. « En vérité révérendiffime feigneur, vous me donnez bien à penfer : » » Mais les engagemens où fe trouvoit cet électeur, les refpects humains, & fur-tout les biens d'églife qu'il avoit réuni à son domaine, comme les autres princes Proteftans, l'emporterent fur fes lumieres & fur fes bonnes inclinations, & il laissa partir le nonce fans changer de fentiment. Commendon fortit de Berlin, vint trouver Jean marquis de Brandebourg, frere de l'électeur, qui étoit à Brefca, en attendant la réponse que Joachim lui avoit promise à fon retour; mais en chemin il voulut voir l'archevêque de Magdebourg fils de cet électeur. Il en fut très-bien reçu, il y demeura quelques jours; il lui remit les lettres du pape & la bulle que le prélat lut avec respect : mais ayant demandé quelque tems pour confulter fon pere, Commen

que

don lui repartit, que dans la place qu'il occupoit il ne devoit point avoir d'autre confeiller fon de- AN. 1561. voir; qu'il ne devoit pas feulement envoyer ses suffragans au concile, mais qu'étant jeune & de bonne fanté, il étoit obligé de les prévenir. L'archevêque touché de ce difcours parut difpofé, non-feulement à aller à Trente, mais à Rome même pour conférer avec le pape.

y

XXIV. Réponse du mar

bourg au nonce. Pallav. n. 7.

ad

4.

In lit. Commend.

Borrom. card. Martii 1561

Commendon étant arrivé à Brefca, ville proche Berlin, donna les lettres du pape & la bulle à Jean quis de Brandemarquis de Brandebourg, qui, comme les autres, demanda quelque tems pour en délibérer, & deux heures après lui fit rendre par fon chancelier une réponse bien éloignée des fentimens qu'il lui avoit fait paroître d'abord. Le nonce jugea auffi-tôt qu'el le étoit l'ouvrage des confeillers du prince, qui affectoient de montrer beaucoup d'animofité contre l'autorité du pape & de l'églife Romaine. Cette réponfe portoit, que le marquis s'assembleroit au premier jour avec les autres princes, & prendroit avec eux les mesures convenables; que fon maître n'héfitoit pas à rendre une réponse appuyée sur la vérité contre toutes les chicanes & fupercheries; que d'inviter les Proteftans au concile, ce feroit vouloir concilier les liévres avec les lions. Le chancelier s'étendit encore fur les deux motifs marqués dans la bulpour affembler le concile, la deftruction des héréfies & la réformation des mœurs, & en parla avec tant de vivacité, qu'on eut dit que ce qui avoit été avancé par le pape, ou de fa part fur ce fujet, eut été autant de calomnies qu'il falloit repouffer avec chaleur : il ajouta que cette douceur & cette bonté

le

du

pape que Commendon cherchoit tant à faire vaAN. 1561. loir, n'étoient aujourd'hui qu'apparentes, parce que le tems & les circonftances où l'on fe trouvoit alors, demandoient cet extérieur impofant; mais que ces belles qualités feroient bien-tôt changées en cruauté en Italie & ailleurs, pour mettre en piéces des hommes pieux dont tout le crime confiftoit à fuivre la pure doctrine de l'Evangile, & à ne vouloir pas adopter les idolâtries que l'autorité tyrannique pape vouloit introduire.

XXV. Réplique deCom

Pallav, ibid. ut fup. cap. 4. n. 9.

du

du

pa

Le nonce fe fentit ému en entendant ce difcours ; mendon au chan- mais fans rien faire paroître de fon émotion, il se celier du marquis. tourna du côté du marquis, & lui dit que fon chancelier avoit fort mal interprété les intentions du pe, & qu'il ne convenoit pas au miniftre d'un prince qu'on n'avoit point offenfé, & qu'on avoit au contraire comblé d'honneurs, de fe fervir de termes auffi injurieux. Prenant enfuite tous les chefs d'accufations du chancelier, il dit que l'intention étoit d'accorder toutes les sûretés convepape nables, & d'écouter chacun avec beaucoup de bonté, en forte qu'on fe trouvât au concile, non comme des liévres au milieu des lions, mais comme des agneaux avec leurs pafteurs qu'il espéroit, qu'au lieu de répondre aux prétendues fupercheries qu'on imputoit au pape, il prendroit toutes les mefures néceffaires pour mettre la paix dans l'église ; ce que le pape fouhaitoit uniquement. Qu'on ne pouvoit nier que l'Allemagne ne fût partagée en différentes fectes, puifque les princes s'en plaigroient eux-mêmes dans leurs affemblées, & ne demandoient un concile que pour y remédier. Que

les fupplices dont on avoit puni quelques hérétiques en Italie & ailleurs par l'autorité du pape, n'étoient AN. 1561. point contraires à cette bonté qu'on lui connoiffoit pour offrir le pardon à ceux qui vouloient quitter leurs erreurs; que ces fupplices étoient autorifés par les loix de l'empire, conformes à la discipline de l'ancienne églife, & tendoient à conferver la religion fans tache & à épargner le fang des peu ples que l'héréfie répandroit avec fureur, fi elle étoit impunie. Que l'idolâtrie qu'on reprochoit à l'églife Romaine, n'étoit autre que le culte qu'elle rend aux chofes facrées, qu'elle a pratiqué depuis les premiers fiécles, & qui a été obfervé en Allemagne auffi-tôt qu'on commença à y connoître JefusChrist. Qu'enfin la puiffance du pape n'étoit point tyrannique, puifqu'elle n'étoit point fondée fur la violence, mais fur la parole de Dieu & le refpect des fidéles; en forte qu'ils jouiffoient d'une paix profonde & d'un repos parfait, pendant que les troubles & les malheurs regnoient parmi ceux qui s'étoient féparés de fon unité.

XXVI.

nonce.

és que

Pallav. ut fuprà

m. 10.

Après ce difcours, le nonce fe leva & prit congé de la compagnie : mais le marquis de Brandebourg ce prince fait au l'arrêta pour dîner avec lui, & le traita avec beaucoup de douceur & d'humanité; il le fit affeoir à table dans la place la plus honorable, se tint toujours découvert, & lui marqua dans fa paroles, dans ses manieres, & dans les chofes qu'il lui préfentoit, tous les témoignages du plus profond respect. Il or donna même à fes confeillers de le conduire juf qu'à fon logis: le chancelier s'y trouva avec les autres, & fit beaucoup d'excufes à Commendon de

ce qu'il avoit dit dans fa réponse. Le nonce lui réAN. 1561. partit, que tout le reproche qu'on pouvoit lui faire étoit d'être animé d'un zéle ardent pour leur falut; que s'ils ne vouloient pas y répondre, il leur demandoit en grace, que malgré leur obstination à fomenter la difcorde & la divifion, ils rendiffent au moins justice aux bonnes intentions du pape, & qu'ils reconnuffent fa charité & fa bonté paternelle. Le chancelier répliqua qu'il falloit rejetter la plus grande partie du mal fur les moines. Commendon étant parti de Brefca, retourna à Berlin le dernier jour de Février. Le lendemain de fon arrivée l'archevêque de Magdebourg alla le voir, & lui fit remettre la réponse par un de fes confeillers; elle étoit remplie de louanges & d'actions de graces envers le pape, & il y promettoit de fe rendre au concile, & d'y mener beaucoup d'évêques. Il chargea auffi le nonce d'une lettre qu'il écrivoit lui-même au pape en réponse à celle dont il l'avoit honoré; il lui marquoit qu'en reconnoissance du bref & de la bulle qu'il venoit de recevoir, il feroit plus hardi à mettre toute fa confiance en fa fainteté, & à le prier de l'honorer de fes bons avis pour l'adminiftration de fon églife. Commendon fut d'autant plus charmé des fentimens & de la conduite de cet archevêque, qu'il n'attendoit rien de semblable d'un jeune homme de vingt-deux ans, obfédé par un grand nombre de ministres qui favorifoient l'héréfie, & gouverné par un pere hérétique. Il remit auffi les lettres du pape à l'électrice de Brandebourg qui étoit catholique, & qui prîa le nonce de baifer pour elle les pieds du pape, & de l'affurer qu'elle vouloit

vivre

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