Hor.
Бег.

4.1.6.

§. XIII,

Es louanges outrées & les faux éloges que Virgile a fait d'Augufte en certains endroits, font auffi des défauts qu'on doit blâmer dans ce Poëte. Augufte même le mortifia rudement fur ce fujet, par une fanglante raillerie qu'il lui fit, lorfqu'il luy demanda fa penfion. Ce grand Prince, comme dit Horace› haïffoit la flaterie, &· ne pouvoit fouffrir les fauffes louanges, Cuimale fi palpêre, recalcritat undique tutus.

Ainfi pour faire fentir à Virgile combien il étoit ridicule d'étendre fes Conquêtes & fon Empire audelà des Garamantes & des Indiens, audelà des Païs que le Soleil décrit par la Ligne, & qui font dans une éternelle nuit fans aucune diftinction des faifons, il affigna la Penfion de ce Poëte fur les prétendus revenus qu'il devoit tirer de ces Peuples-là en qualité de leur Souverain & de leur Empereur,

Ultra Garamantas & Indos
Proferet Imperium. Jacet extra Sydera tellus,
Etra anni, Solifque vias, ubi Califer Altas
Axem humero torquer ftellis ardentibus aptum.
Receveurs Generaux de toute la Finance
Que jelev au Pais de mon obeissance,
Dans ces lieux inconnas, où le jour ne luik.

pas >

Et qui font audelà de l'Ourfe & de

l'Atlas,

Payezla Penfion que Virgile demande : AUGUSTE vôtre Roy, l'ordonne & le com mande.

§. XIV.

E ne trouve pas non plus qu'il y ait du

lant à Augufte, que quand il luy plairoit,
de mourir, fa place étoit toute prête &
marquée au Ciel, & que le Scorpion qui
eft un des Signes du Zodiaque, lui cedoit
fa place & baiffoit les cornes devant luy
& qu'il rentroit dans fa coquille, afin de
donner à Augufte toute l'efpace du Ciel
qu'il y occupoit,

Ipfe Tibi jam brachia contrahit ardens
Scorpius, & Cæli jufta plus parte relinquit.

Il y a parmi les Signes du Zodiaque d'autres animaux plus nobles que le Scorpion.. Il y a un Lion, un Taureau, une Vierge, un Sagittaire: & quoique je fçache bien qu'on auroit auffi bien pû les appeller un Cochon, un Coucou, un Chat & un Rat que de leur donner les noms ci- deffus; néanmoins puifqu'il a plû à Meffieurs les Aftronomes de leurs impofer le nom de Lion & de Taureau, de Belier & de la

Georg. lib. I fub.init

Vierge & de l'Altrée, tenant les Balances de la Justice, il étoit ce semble du bon sens, de placer plutôt prés de la Justice, & au milieu de ces autres nobles animaux, le grand Au-guste, que de luy donner place entre les cornes d'un Limaçon fale & baveux.

M

§. X V.

Ars ce qu'il y a de plus blâmable & de plus reprochable à Virgile est qu'ayant parlé de Dieu en quelques endroits en veritable. Platonicien, il en ait parlé enfuite partout ailleurs en Difciple d'Homere & d'Epicure, & qu'il nous ait representé des Dieux ridicules & pleins de vices, Pour corriger ce défaut, & éfacer les impreffions que la Lecture de ce Poëte auroit pu laiffer dans l'efprit, je vas donner un nouveau Livre au jour fur la Nature & les Attributs de Dieu, intitulé, Systême du. Monde intelligible. En voici l'Abregé.

,

On peut confiderer Dieu en trois manieres; ou en lui-même comme Verité Juftice, Sageffe & Beauté Originale & Subfiftante; ou par rapport à la Matiere; ou par rapport à l'Efprit cree.

Platon eft le premier qui a dit, qu'il falloit faire une grande difference entre être Sage & être la Sageffe même, entre la Beauté par Effence & Accidentelle. Un Homme qui étoit fou devient fage: Une Femme qui

étoit

étoit belle devient laide: un Homme qui étoit jufte, fait un crime énorme & devient injufte: la Sageffe, la Beauté, la Juftice, ne font donc qu'accidentelles en eux, cela eft clair. Mais la Sageffe en elle-même, la, Beauté par Effence la Juftice fubfiftante, font toujours invariablement & effentiellement fages, belles & juftes. Ce font des Formes vivantes. Ce font des Natures fubfiftantes. Ce font des Perfonnes réelles. Forma in abstracto funt fuppofita, dit l'Angelique S. Thomas. Le même faint Docteur dit, Forme individuantur fe ipfis. Pourquoi donc, ajoûte-t-il, Forme in abstracto non generant, les Formes abftraites ne font pas capables d'engendrer & de produire un Fils? Pourquoi trouve-t-il mauvais que Saint Auguftin dife le contraire en mille endroit ? Sapientia generat Sapientiam Sapientia de Sapientia, Effentia de Effentia: C'est le langage ordinaire de tous les anciens Peres Grecs & Latins.

Saint Thomas femble avoir cru par une prévention generale aux Ariftoteliciens que ces fortes de Formes Aftraites, La Sageffe même la Verité même, la Beauté meme, font de la nature de ces fortes de Formes abftraites que les Philofophes appellent des Univerfaux, à parte rei, comme Albedo ut fic, Nigredo ut fic, Maluia m fic. Or je ne craindrois pas de dire, fi cela étoit

A a

Conf. lib. 7.C.

que S. Thomas s'eft bien trompé, ou que tout au moins il eft entierement oppofé au fentiment de S. Auguftin & de tous les anciens Docteurs de l'Eglife Greque & Latine. Ils enfeignent tous, que par ce mot de Sageffe même, de Verité méme, de Beauté & de Justice même, il faut entendre une Nature & une Perfonne vivante & fubfifAuguft. tante qui eft Dieu même. O veritas, Charitas, Eternitas, Tues Deus meus. C'est ce que le R. P. André Martin Prêtre de l'Oratoire, a fait voir invinciblement dans fon Traité De Veritate & Exiftentia Dei, par des millions de paffages trés-clairs & trés-formels de S. Auguftin; & je fuis prêt à en apporter autant, tirez de S. Athanase, de S. Gregoire de Nazianze, de Samt Epiphane, de Saint Hilaire, & fur tout d'Origene, qui le repete en plus de vingt endroits contre Ĉelfe.

10.

De-là il s'enfuit évidemment qu'il n'y a rien de fi faux que cette Maxime, Forma in abstracto non generant : car il n'y a pas plus de danger de dire, que la Sageffe engendre la Sageffe, & que la Lumiere procede de la Lumiere, comme dit le Concile de Nicée, que de dire que Dieu engendre fon F's: Sempiternam generationem Virtutis & Sapientia Dei, que eft Unigenitus Filius, fides finceriffima & Catholica predicat, dit Saint Auguftin: Enar, in Pfal. 2. Num. 6. Col.