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avoit nommé Claude Rhynfault, Allemand, gouverneur de la capitale de la Gueldre. Rhynfault fut à peine arrivé dans fon gouvernement qu'il devint éperduement amou-, reux de Saphira, femme d'une rare beauté. Il mit tout en ufage pour s'introduire chez cette femme; mais inftruite de fes vues, elle n'oublia rien pour éviter le piége qu'il lui tendoit. Le gouverneur voyant qu'il ne réuffiroit jamais s'il n'employoit la violence, fit emprifonner le mari, qui étoit un riche marchand, fous prétexte qu'il entretenoit une correfpondance criminelle avec les ennemis du prince, & ordonna qu'on lui fît fon procès. Saphira courut auffi tôt pour implorer la clémence du gouverneur cet homme barbare lui déclara qu'elle ne pouvoit fauver la vie de fon mari qu'en confentant à ses defirs.

Saphira éperdue fe tranfporte à la prifon, & rend compte à fon mari de la propofition que le gouverneur lui a faite. L'époux honteux de paroître craindre la mort, ne laiffa entendre que d'une maniere indirecte qu'il ne la croiroit point déshonorée par une action à laquelle fa volonté n'auroit aucune part; mais sa réponse mon

troit d'une maniere non équivoque le defir que l'époux avoit de conferver fa vie. Saphira le quitta donc, & courut à l'hôtel

du

gouverneur pour obtenir la grace de fon mari. Rhynfault loua fes charmes, fe flatta d'avoir avec elle un commerce libre par la fuite, & lui dit avec une gaieté barbare,

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allez à préfent retirer votre mari de la prifon; ne foyez pas cependant fâchée (ajouta ce monftre) fi j'ai pris des mesures pour l'empêcher de mettre obftacle par la fuite à nos rendez-vous. Ces dernieres paroles préfagerent à Saphira le trifte fort de fon mari: elle le trouva en effet mort dans fa prifon. Accablée de douleur elle s'échappa fecrettement de la ville & courut fe jetter aux pieds du duc de Bourgogne, à qui elle préfenta un mémoire qui contenoit l'hiftoire de fes malheurs & de la barbarie de Rhynfault. Le prince manda fur le champ le gouverneur ; ce dernier étant arrivé fut confronté auffi-tôt avec Saphira. Connoiffez-vous cette femme, lui dit le duc?

- lorfque Rhynfault fut revenu de fa premiere furprise,il propofa au prince d'époufer Saphira, & le fupplia de vouloir bien regarder cette démarche comme une répara

A

tion de fon crime. Le duc parut fatisfait de cette propofition & fit d'abord célébrer le mariage. Il dit enfuite au nouvel époux ;

Vous n'avez fait ce facrifice que par la crainte de mon autorité, ainfi je ne croirai point que vous aimiez votre femme,à moins que vous ne lui faffiez une donation de tout votre bien pour en jouir après votre mort. -Rhynfault, pour plaire au duc, fit auffitôt une donation univerfelle de fes biens à fa nouvelle époufe. L'acte qui contenoit cette donation ayant été remis à Saphira, le duc lui dit: Il ne vous refte plus qu'à jouir du bien que votre époux vous a donné, & fur le champ il fit arrêter Rhynfault & le condamna à perdre la tête ».

ROBERT, roi de France.

(Trait de clémence de)

Robert, roi de France, fut averti, étant à Compiegne, que douze fcélérats avoient formé le deffein de l'affaffiner; on les arrêta fur le champ & leur procès fut inftruit, Pendant que la juftice étoit occupée à venger le monarque, ce prince fit donner la communion aux criminels, après les y avoir

fait préparer par la pénitence ; il leur accorda enfuite l'honneur de manger avec lui, leur pardonna, & envoya dire aux juges qui les avoient condamnés d'une voix unanime, << qu'il ne pouvoit fe réfoudre à fe venger » de ceux que fon maître avoit reçus à fa » table ».

RODOLPHE Ier,

ufe d'adreffe pour découvrir un vol.

Un riche marchand de Nuremberg vint un jour fe plaindre à l'empereur Rodolphe, qu'ayant remis à son hôte sa bourse qui contenoit 100 florins, & que l'ayant voulu retirer l'hôte avoit nié le dépôt, dont il n'avoit pas de témoins. Cet hôte qui étoit riche & un des premiers de la ville, ne pouvoit être facilement convaincu. Les députés de Nuremberg s'étant préfentés à l'audience de l'empereur, ce prince reconnut dans leur nombre l'hôte contre lequel on lui avoit fait des plaintes. Il s'approcha de lui, & examinant sa parure : « vous avez » lui dit-il, unaffez beau chapeau,troquons ». L'hôte présente auffi-tôt avec joie fon chapeau, & reçoit celui de l'empereur. Dans

l'inftant Rodolphe fort de la falle & ordonne à un bourgeois qu'il rencontre d'aller de la part de l'hôte demander à fa femme la bourse où étoit le dépôt que le marchand avoit défignée, & de lui montrer le chapeau pour preuve de fa miffion. L'hôteffe à ce figne remit l'argent au bourgeois, qui le rapporta à l'empereur ce prince rentra dans la falle avec le marchand qui avoit fait des plaintes contre l'hôte; ce dernier affirma avec ferment qu'il n'avoit point la bourfe: Rodolphe indigné la lui présenta, la remit au marchand & condamna l'hôte à une amende confidérable.

ROI qui juge en pere.

Philippe V, roi d'Efpagne, voulant dé: truire une foule d'abus qui fe commettoient à Madrid dans la perception des droits d'entrée, fit un édit par lequel il ordonna aux commis de faire des vifites exactes. Le fils d'un des feigneurs les plus illuftres de la cour de Madrid, méprifant la loi nouvelle, voulut faire paffer quelques ballots fans permettre aux commis de les vifiter. Un commis ayant eu recours à la force pour exécuter la loi, fut tué par le jeune homme

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