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nal fecret de Weftphalie, Jurifdiction de fang, qui fait horreur, & à laquelle préfidoient des Bourreaux, plutôt que des Juges. Sur quelle autorité peut-il fe fonder,

fait poignarder les Saxons par des efpions). Voltaire continue ainfi «il inftitua une Jurifdi&tion plus abomi»nable que l'Inquifition ne le fut depuis c'étoit la » Cour Veimique, ou la Cour de Weftphalie, dont le » Siége subsista long-temps dans le Bourg de Dortmund. » Les Juges prononçoient peine de mort fur des déla» tions secrettes, fans appeler les accufés. On dénonçoit » un Saxon, poffeffeur de quelques bestiaux, de n'avoir » pas jeûné en Carême; les Juges le condamnoient, ET » ON ENVOYOIT DES ASSASSINS qui l'exécu» toient & faififfoient fes vaches. Cette Cour étendit » bientôt fon pouvoir fur toute l'Allemagne. Il n'y a » pas d'exemple d'une telle tyrannie ; & elle étoit exer»cée fur des Peuples libres. Daniel ne dit pas, un mot » de cette Cour Veimique; & Vély, qui a écrit sa séche » Hiftoire, n'a pas été inftruit de ce fait fi public : & il » appele Charlemagne, religieux Monarque, ornement de » l'humanité. C'est ainfi parmi nous, que des Auteurs, »gagés par des Libraires, écrivent l'Hiftoire ». Peut-on, en fi peu de lignes, entaffer plus de faussetés, d'impoftures & de mensonges qui ne font foutenus par aucune autorité? Mais Voltaire ne cite jamais.

Voici la note des Éditeurs fur cet article: c'est la 25e. « On peut voir, dans les Capitulaires, la Loi » (c'est le fameux Capitulaire de Partibus Saxoniæ ) « par laquelle » Charles établit la peine de mort contre les Saxons qui

pour foutenir fon affertion, quand tous les Hiftoriens, depuis le VIII jufques vers le milieu du XIVe fiécle, gardent le plus profond filence fur l'origine &

>> fe cacheront pour ne point venir au Baptême, ou qui » mangeront de la chair en Carême. DES FANATIQUES » IGNORANS ont nié l'existence de cette Loi, que » Fleury a eu la bonne foi de rapporter. Quant au Tri»bunal Veimique, établi par Charlemagne, on peut con » fulter l'Article Tribunal fecret de Weftphalie, dans » l'Encyclopédie, Tom. XVI, (les Éditeurs fe trompent, » c'est le Tom. XXXIV ). » On a eu foin d'y citer les » Historiens & les Publicistes Allemands qui ont parlé » de CETTE PIEUSE INSTITUTION DE SAINT » CHARLEMAGNE ». Le Rédacteur de l'Article Tribunal fecret de Weftphalie dans l'Encyclopédie, Tom. XXXIV, Édition in-4o, Genève, 1778, pag. 164, feconde colonne, n'est pas auffi hardi que Meffieurs les Éditeurs des Œuvres de Voltaire; car voici comme il s'exprime: Tribunal fecret de Weftphalie (hift. m.) C'est le nom d'un Tribunal assez semblable à celui de l'Inquifition, qui fut, DIT ON, établi par Charlemagne & Léon III, pour forcer les Saxons à fe convertir au Chriftianisme. ▲ lire la note des Éditeurs, on croit trouver une foule de citations & d'autorités, pour prouver que Charlemagne eft le créateur du Tribunal fecret de Weftphalie, & le tout se réduit à un DIT-ON, & à deux Auteurs, cités, favoir: Eneas Sylvius'. qui donne la description de ce Tribunal, tel qu'il étoit de fon temps, & ne dit pas un mot de Charlemagne ; & Léibnitz, qui rapporte l'établissement

l'établiffement de cette Jurifdiction infernale? Quand les quatre plus excellens Auteurs, qui ont traité de l'Hiftoire de Saxe des X, XI & XIIe fiécles, Witechind de Corbie (1), Dithmar, Évêque (2) de Merfebourg, Lambert d'Afchaffembourg

comme un conte (UT FERTUR ) la manière dont Charlemagne établit ce Tribunal, l'ambaffade & la réponse muette du Pape Léon III à l'Envoyé de Charlemagne : « puifqu'il fe leva fans proférer une parole, & alla dans » fon jardin, où ayant ramaffé des ronces & de mau» vaises herbes, les fufpendit à un gibet qu'il avoit » formé avec de petits bâtons. L'Envoyé, à fon retour, » rapporte à Charles ce qu'il avoit vu, & celui-ci inftitua » le Tribunal, qui s'appele jusqu'à ce jour Venia ou » Vemia ». Aft fanctus Vir auditâ legatione, nihil prorfus refpondit; fed furgens, ad hortulum ivit ; & zizania cum tribulis colligens, fupra patibulum quod de virgulis fecerat, fufpendit. Rediens autem legatus hæc Carolo nuntiavit, qui mox jus vetitum inftituit, quod ufque in præfens. Veniæ vel Vemiæ vocatur. Rapportez-vous- en maintenant à l'affirmation, à la bonne foi de Meffieurs les Philofophes, quand ils ont l'air de vouloir appuyer leur opinion par quelques autorités?

(1) Voyez Annales Saxonia, Tom. I, des Scriptores Rerum Germanicarum de MEIBOMIUS.

(2) Voyez Tom. I, des Scriptores Rerum Brunfwicenfium de LEIBNITZ.

(1), & l'Annaliste Saxon (2) n'en difent pas un mot ; & qu'on ne trouve pas même dans leurs vaftes Hiftoires, la moindre trace d'une Cour de Juftice particulière à la Saxe, qui reffemble à l'Inquifition, & qui fe foit jamais occupée des délits religieux ou eccléfiaftiques? Quand on ne trouve également aucun veftige de cette abominable Jurifdiction criminelle, dans les Chartres & les Titres publics de ces fiécles reculés, qui font parvenus jufqu'à nous en affez grand nombre; tandis que les Diplômes, poftérieurs à l'époque du XIVe fiécle, en font très-fouvent mention?

Pour peu que l'on ait quelque teinture de l'Hiftoire, on fait que le commencement des guerres, entre nos Rois des deux premières Races, & les Saxons,

des

(1) Voyez Hiftoria de Rebus German. Tom. I, Scriptores Rerum German. de PISTORIUS. (2) Voyez Tom. I, des Scriptores Rerum German. d'EKARLUS.

remonte jufqu'au VIe fiécle : qu'elles furent foutenues avec des fuccès différens, jufqu'au temps de Charlemagne, qui parvint à foumettre entièrement ces Barbares à la Nation Françoife, après avoir effuyé de leur part fept révoltes confécutives. Qui ne fait qu'un des moyens dont ce Prince fe fervit pour dompter leur naturel féroce, fut d'introduire chez eux la Religion Chrétienne; & que le premier fignal de leurs rebellions habituelles, fut toujours de maffacrer les Prêtres & les Chrétiens qui fe trouvoient parmi eux, & de retourner enfuite au culte de leurs Idoles? Ce ne fut donc qu'après avoir reconnu l'infuffifance des moyens qu'il avoit employés d'abord, pour contenir dans le devoir cette Nation très-indocile au joug, que Charlemagne publia, en 789, le fameux Capitulaire, de Partibus Saxonia, rapporté par Baluze (Capitul. Tom. I, pag. 251), par lequel il prononce la peine de mort contre tous les Saxons qui apoftafie

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