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roient, ou qui se rendroient coupables de quelque crime ou délit contre la Religion, la paix publique, & la fidélité due au Souverain. Qu'on examine toutes les Loix contenues dans ce Capitulaire, entr'autres celles dont Voltaire abuse pour flétrir la mémoire de Charlemagne, & qu'on juge d'après les moeurs du VIII fiécle, & les événemens qui ont dicté cette légiflation rigoureufe, fi ces Loix ont rien de cruel & de tyrannique ? Qu'auroient-ils fait en pareil cas ces Philofophes fi amis de l'humanité, fi ennemis des Rois, fi tolérans, criant à tous les habitans de l'Univers : vous êtes libres? Qui ne daignent pas fe placer dans le fiécle, & fe transporter dans les pays dont ils prétendent écrire l'Hiftoire; qui jugent des moeurs & des ufages des anciens Peuples fur les nôtres; des vues des plus grands Princes du moyen âge, d'après les fyftêmes de politique qu'ils fe forment eux-mêmes : qui fuppofent des causes, pour apprécier des effets

à peine connus: dont l'imagination enfin fait les frais des tableaux chimériques qu'ils mettent fous nos yeux, & fur lef quels ils s'épuifent en faux raifonnemens & en réflexions inutiles? Qu'auroient-ils fait ces Pédagogues ennuyeux du genre humain, s'il eût été poffible que l'un d'eux fe fût trouvé à la place de Charlemagne ? Heureufement ils n'exiftoient pas.

Au refte on voit par le Capitulaire de 789, que les Saxons qui s'étoient rendus coupables de quelques délits graves contre la Religion, évitoient la peine de mort, en avouant leurs fautes à un Prêtre. Il leur étoit libre d'ailleurs de fe fouftraire à la rigueur de la Loi, en s'expatriant, à l'exemple des Nordalbingiens, & d'une infinité d'autres, qui fe retirèrent dans les marais du pays de Brême, où l'Histoire (1) nous apprend, qu'au commencement du XIe fiécle, il

(1) Voyez ADAMI BREMENSIS Hiftoria Ecclefiaftica, pag. 30 de la Collection de LINDENBROG.

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fubfiftoit encore des Peuplades païennes.

Charlemagne confia l'exécution de ces Loix aux Comtes qu'il établit en Saxe. Un heureux hafard nous a confervé l'original de la Commiffion que ce Prince fit expédier au Comte Truttmann (1), en 789, elle ne diffère en rien des ordres & des inftructions répandues dans les Capitulaires, pour l'ufage des autres Comtes (2). Qu'on ouvre le premier volume des Scriptores Rerum Brunswicenfium, de l'illuftre Leibnitz, on y trouvera un recueil d'autres Loix civiles & criminelles des Saxons, qui renferme des Réglemens infiniment plus rigoureux que ceux qui

(1) Voyez les Notes de Meibomius, fur les Annales du Moine Witekind de Corvey ou Corbie l'Allemande ; Tom. I, des Scriptores Rerum Germanicarum, pag. 689.. Meibomius y rapporte en entier la Commiffion du Comte TRUTTMANN.

(2) La Commiffion du Comte Truttmann est également rapportée par BALUZE, dans l'Édition qu'il a donnée des Capitulaires, & inférée à la tête du Capitulaire de 789, pag. 250.

compofent les Loix Saliques, ou celles des Bavarois & des Suabes Allemands ou enfin celles qu'on lit dans les Capitulaires. Il eft conftant, & tous les Jurifconfultes en conviennent, que les formes judiciaires étoient infiniment fimples chez les anciens Peuples de l'Allemagne, fpécialement chez les Saxons,

& que les crimes y étoient punis avec

la plus grande célérité. Un coupable furpris en flagrant délit, étoit accufé jugé, exécuté en moins de deux heures. On s'attachoit principalement à la fame publique, & elle fuffifoit pour faire or donner des informations, & pour réduire la perfonne famée, à la néceffité de prouver fon innocence, par témoins. On ne peut guères douter que ces formes n'aient été auffi employées dans l'exécution des Loix pénales, portées par le Capitulaire de Partibus Saxoniæ.

Enfin, les Saxons fe foumirent entièrement, par la paix de Salza, en 803. Ils embraffèrent de bonne foi la Reli

gion Chrétienne. A ce prix, Charlemagne leur conferva l'ufage de leurs anciennes Loix :

« Permiffi Legibus uti

<< Saxones Patriis & libertatis honore » (1).

Comme un peuple libre, admis au Confortium de la Nation Franque,& gouverné comme elle, par des Comtes, fous la fouveraineté de ce Prince & de fes fucceffeurs. Toute la Nation Saxonne ayant alors embraffé le Christianisme il est évident & fenfible que les Loix de 789, devenues inutiles, tombèrent en défuétude, & qu'elles finirent par ne plus avoir d'objet, à l'époque de 803.

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Les Comtes continuèrent, fous les Empereurs Carlovingiens, & après eux, fous les Empereurs d'Allemagne de la race des Ducs de Saxe, à être les premiers Officiers de leurs Diftricts. Ces Jurifdictions étant devenues bientôt hé

(1) Voyez Antiquus Poëta Saxo, que Leibnitz a publié au premier Volumé des Șcriptores Rerum Brunswicenfium, pag. 153.

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