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ceux qui, jaloux de la véritable gloire, que la postérité feule difpenfe, fuivront la voie que vous leur avez tracée leur avez tracée pour l'obtenir.

Plût au Ciel, en effet, que le Barreau pût reproduire des d'Agueffeau & des Cochin, des le Normand, des Aubry & des de Gênes! La pureté du goût, la délicateffe du langage, la correction & l'élégance du ftyle, la fageffe des idées, la véritable éloquence, en un mot, y brilleroient encore. Le Bel-Esprit & le Philofophifme n'avoient pu s'y introduire du temps de ces grands Hommes; mais depuis que la Jeuneffe s'eft fait une idole de Voltaire, depuis qu'elle a voulu lui foumettre fes Plaidoyers & ses (1) Mémoires, fière des fuffrages trompeurs de cet

(1) ÉLIE DE BEAUMONT & LOYSEAU DE MAULEON ont été les premiers Avocats qui ont recherché l'approbation de Voltaire. Elie de Beaumont n'a jamais été que lourd & verbeux. Loyfeau de Mauléon a fouvent abufé de l'avantage d'être doué de beaucoup d'efprit. Il le fait trop paroître dans fes Plaidoyers & dans fes Mémoires. S'il eût affez vécu, le temps & des confeils fages

Écrivain frivole, peu fait d'ailleurs pour lui donner de bons principes, elle eft devenue philofophe & bel-esprit. De-là elle a jugé que COCHIN n'avoit point de vafles développemens, ni de grands principes créés, ni d'erreurs, ni de préjugés détruits. ( Voilà bien ce qu'on appèle du galimathias philofophique tout pur); qu'il approche du mauvais goût, fur-tout quand il veut animer fa penfée ou colorer fon expression: enfin qu'il n'eft ni un grand Jurifconfulte, ni un grand Orateur; & que fon talent n'eft qu'un talent du fecond ordre (1). On ne peut pas entaffer plus de bévues à la fois.

auroient modéré le feu de fon imagination, & lui auroient fait appercevoir, dans fes compositions, en quoi. il péchoit quelquefois contre le goût & la raifon, & en quoi fon ftyle pouvoit être défectueux; car il étoit do cile & modefte. Je lui rends cette jnftice avec d'autant plus de plaifir, que je l'ai beaucoup connu, & qu'il étoit infiniment aimable dans la fociété, par sa fimplicité & fa douceur, & n'affichant jamais les prétentions du BelEsprit.

(1) Nous oppoferons à la décifion tranchante, mais de peu de valeur, de M. de la Cretelle, le fentiment de

Nous laiffons aux gens inftruits & impartiaux à qualifier cette affertion, auffi injufte que tranchante, contre le Démofthène de nos jours. L'Auteur ne

judicieux & favant Traducteur de DEMOSTHENE & D'ESCHINE. Il s'exprime ainfi en parlant du célébre Cochin, « J'ai lu avec attention les principaux Plaidoyers » & Mémoires de nos plus célébres Avocats; COCHIN » EST LE SEUL qui m'ait paru pouvoir foutenir le pa» rallèle avec l'Orateur d'Athènes; mais je crois qu'il » lui eft bien inférieur pour la fubtilité & l'abondance

des raifons, pour la fimplicité piquante & la rapidité » du ftyle. Il écrit avec nobleffe, avec force; il a du » nombre & de l'harmonie; fon ftyle s'élève & s'anime» dans les grandes Caufes. A l'exemple de Démosthène

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il difcute & approfondit l'efprit des Loix, il généra» life les idées particulières, & en tire des principes lu» mineux, qui frappent & saisissent par leur évidence. La » raison principale & victorieufe d'une cause ne lui » échappe pas; il la préfente plufieurs fois fous des »jours différens; il en fortifie fes autres moyens. Ce » font-là de grandes parties dans lesquelles il ne le cède » guères à l'Orateur grec ». (Voyez EUVRES complettes de DEMOSTHENE & d'ESCHINE, traduites en François par M. l'Abbé AUGER, Tom. II, première Partie, pag 18, des Réflexions préliminaires). Le jugement que porte de Cochin M. l'Abbé Auger, eft affurément bien motivé. Plein de l'éloquence de Démosthène, cet excellent

l'auroit

pas hazardée, fans doute, s'il avoit réfléchi, que « l'on ne doit jamais » parler (1) qu'avec beaucoup de fageffe » & de circonfpection des grands Hom» mes, dont le mérite eft généralement > reconnu ; dans la crainte qu'il ne nous arrive de condamner ce que » nous n'entendons pas ; & fi l'on fe » trompe en accordant trop ou trop » peu d'eftime à leurs Écrits; j'excu » ferois plutôt le Lecteur à qui tout » plaît en eux, qu'un autre qui trouve » à redire à beaucoup de chofes ».

L'Auteur ne ménage pas davantage l'immortel d'AGUESSEAU, ce refpectable & pieux Magiftrat, l'organe & le flambeau des Loix, qui n'aura jamais d'é

la Cretelle, qui peut-être ne connoît pas plus Démofthène qu'il ne connoît Cochin, auroit-il faison?

(1) Modefte tamen & circumfpecto judicio de tantis viris pronuntiandum eft, ne (quod plerifque accidit damnent quæ non intelligunt. Ac fi neceffe eft in alteram errare partem, omnia eorum legentibus placere, quam multa difplicere maluerim. QUINTIL. Inft. Orat. Lib. X, Cap. I. pag. 732.

gal pour le favoir immense, pour la profondeur, l'étendue & la variété des connoiffances, pour la clarté, l'élégance & l'urbanité de fes Écrits. « Je fais, » dit-il, que fa philofophie fut timide » &fon éloquence fans ORIGINALITÉ............. » La majefté des Loix paffe souvent » dans fon ftyle, mais elle s'y montre » dans un trop grand repos; CAR LE » CALME MÊME DE LA SAGESSE ET » DE LA PUISSANCE DOIT ÊTRE ANIME ». Il faut l'avouer, il eft difficile de comprendre ce jargon mais nous concevons aifément que d'Agueffeau n'étoit pas né pour réformer la Jurifprudence, attendu que c'étoit un efprit trop foible, un Philofophe trop timide ; & que cette entreprise étoit réfervée aux cerveaux creux & exaltés de nos jours, aux efprits audacieux, inquiets & turbulens, aux adèptes du philofophifme, aux protecteurs aveugles & froids de l'humanité, aux écervelés

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