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ceffairement la fuivre pour fauver fon ame, & mériter la béatitude éternelle.

Cet écrit fut porté au Tribunal des Mandarins. Ils le lurent, & ne purent s'empêcher d'avouer qu'il ne contenoit rien que de conforme à la droite raifon. Ils jugerent même que ce bon vieillard devoit être traité avec moins de rigueur. En effet fa vertu & fon zele le rendoient refpectable jusques dans les fers; & quoiqu'accablé du poids de fes infirmitez, & des incommoditez d'une affreufe prison, fe foutenant toûjours par fon courage, il ne ceffoit de confoler les compagnons, & d'animer leur ferveur. A l'égard des autres Chrétiens, qu'il n'étoit pas aporté d'entretenir, il leur écrivoit des lettres remplies de l'ELprit de Dieu pour les exhorter à

la conftance dans les tourmens, & à la perfeverance dans la Foy. Le Tyran Chua n'étoit qu'à demi fatisfait, parce que nonobstant ses ordres, & la ponctualité avec laquelle on les exécutoit, on n'avoit pû encore depuis un an que duroit la perfécution, fe faifir d'aucun Mif fionnaire. Enfin il eut lieu d'être content, & ce fut pour lui un fujet de triomphe, d'aprendre que le P. François-Marie Buccharelli, & le P. Jean-Baptifte Meffari étoient arrêtés. Voici comme la chofe arriva..

Les fatigues & les travaux que ces deux hommes Apoftoliques avoient à fouffrir, leur cauferent une maladie lente, qui les confumoit infenfiblement. le P. Jofeph Pires Provincial du Japon, qui fut informé du trifte état où ils fe trouvoient, leur ordonna

de paffer à la Chine. Ils étoient déja arrivez fur les confins de cet Empire, dans un lieu qu'on apelle Lofeu, qui eft tributaire des deux Couronnes.

Quelque foin qu'ils priffent de fe cacher, les infidéles furent bien-tôt inftruits de leur arrivée; c'est ce qui porta les Miffionnaires à fe retirer ailleurs. Ils allerent à trois lieuës de-là, où ils croïoient s'être dérobez à leurs recherches. On les y pourfuivit encore. Enfin pour éviter plus fûrement des perfécuteurs fi acharnez, ils fe réfu gierent dans un bois, que d'épaiffes broffailles rendoient pref que impénétrable. Il sembloit qu'ils étoient-là en fûreté, & qu'ils n'avoient d'autres ennemis à craindre que les bêtes feroces; mais les Gentils aprirent qu'un Chrétien avoit connois

fance du lieu de leur retraite, ils lé contraignirent à force de tourmens de le manifefter ; & auffitôt les Mandarins s'y tranfporterent avec une troupe de foldats. Ils fçûrent fi bien fe partager dans le bois, qu'ils n'y laifferent aucune iffuë propre à s'évader. Ils faifirent donc les deux Peres, trois Catéchistes qui les accompagnoient, & un jeune enfant qui étoit à leur fervice & ils les conduifirent en un lieu qu'on apelle Anloam.

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Ils y furent détenus pendant quelques jours, & durant ce tems-là on mit leur patience àdecontinuelles épreuves. Quelques petits Mandarins cherchant à fe divertir à leurs dépens, n'épargnerent ni les termes méprifans, ni les railleries ameres, ni les infultes & les affronts. Les Miffionnaires n'opoferent

à ces outrages qu'un modefte filence,tant qu'il n'y eut que leur perfonnes qui y furent intéreffées. Mais lorsque les Mandarins porterent l'infolence jufqu'à attaquer la Loy de J. C. & à vouloir contraindre les Peres & les Catéchistes à fe profterner devant leurs Idoles; ce fut alors que les Miffionnaires rompirent ce filence, & que leur zeie s'enflamma.

Le Pere Meffari prit la parole, & avec un air grave, mais plein de feu.» Ofez-vous bien, » leur dit-il, viles & méprifables » créatures que vous êtes, infulter » à l'Auteur de votre être, & tranf »porter aux Démons un culte » & des adorations, qui ne font » dûs qu'à Dieu feul? L'Enfer qui » cft leur partage fera auffi le vô>>tre. Pour nous qui fommes les » Miniftres du Souverain Maître

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