cune ne fe pouvoit comparer celle des Lettrez de la Chine; qu'ils difoient des injures aux Bonzes, & que les Bonzes leur en difoient à leur tour. » Je fuis, ajouta-t-il, le Maître fouve»rain du Royaume du milieu tous les autres Etats, grands petits, m'envoyent des tributs, je me fais un plaifir de leur don➡ner des inftructions : s'ils en profitent à la bonne heure s'ils » les rendent inutiles, je ne m'en facherai pas. Il s'informa enfuite de l'âge de quelques uns des Peres qui étoient le plus près de fa perfonne, & fans qu'ils pußent lui répondre que quelques mots à la derobée, il les con gédia

Les Peres étoient déja arrivés dans la grande Cour d'entrée, lorsqu'un Eunuque les rappella, & leur dit que l'Empereur ne vouloit pas les renvoyer les mains vuides. Ils rentrerent auffi tôt,& fe rangerent dans une des Cours intérieures, attendant avec modeftie la grace que S. M. leur vouloit faire. Il parut alors plufieurs Eunuques chargez de corbeilles. Les ·Peres fe mirent tous à genoux, & on leur donna à chacun un melon de Hami, Après avoir

*Hami eft un Payis de Tartarie fort éloigné de Pexing, qui eft renommé furtour par les excellens melons qu'on en retire. Ils fe confervent cinq ou fix mois dans leur fraicheur, & l'on ne manque pas d'en faire

* chaque année une grande provifion pour

Empereur.

frappé trois fois la terre du front graces, ils forti

en action de

rent du Palais, les Chinois les regardant avec d'autres yeux qu'ils n'avoient fait à leur entrée. Les dons des Rois font par tout trés-refpectables; mais à la Chine, recevoir quelque chofe de l'Empereur, ne fuft-ce qu'une bagatelle, c'eft dans l'idée des plus grands Seigneurs de l'Empire une faveur fignalée. Prefque en même tems deux Vaiffeaux arriverent de la Cochinchine au Port de Canton. Ils apporterent la trifte nouvelle, que le Roy de ce Payis avoit chaffe de fes Etats tous les Miffionnaires, & qu'il les ren voioit

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L

fur un Bâtiment à Canton, pour les remettre aux Mandarins de cette Ville. Funefte exemple de l'Empire de la Chine, qui pref que en tout donne le branle à fes voifins. Ces nouveaux exilez font au nombre de feize; un Evéque deux Prêtres Séculiers, un Barnabite, trois ·Francifcains, & neuf Féfuites. On a pris des mesures pour les faire débarquer à Macao, afin d'empêcher le nouvel éclat que leur arrivée ne manqueroit pas de faire à Canton, & enfuite à Peking. Combien de malheurs coup fur coup quelles pertes pour la Religion dans l'espace de pen

!

d'années! en 1722 le Chrif tianifme profcrit dans le Royaume du Tonkin; en 1723 dans la Province de Fokien ; en 1724 dans tout l'Empire de la Chine; &en 1725 dans la Cochinchine. Il faut que Dieu foit bien irrité contre ces infortunez Peuples de l'Orient.

Je finirai cette Lettre par un trait plus confolant d'un jeune Prince d'environ dix ans, qui étoit tendrement cheri du feu Empereur Canghi fon pere. Une des Dames qui l'a élevé, & qui eft Chrétienne, en a fait le récit au R. P. Dentrecolles Supérieur de notre Maison de Peking