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à une fête où ma parente m'a conduite, & un coup d'œil a fuffi... Que la princeffe... Alix embarraffée à fe tait & rougit.

ces mots,

Cependant on fixe le jour du mariage de la fille du lord Varuccy avec le comte ; il eft célébré à la campagne, & elle eft, en quelque forte, traînée aux autels; l'hymen l'a pour jamais affervie à Salisbury, qui, le lendemain même de fes nôces, quitte fa femme pour aller avec le comte de Suffolk porter la en Flandres, où divers fuccès les arrêtèrent.

guerre

Maly avoit fuivi la jeune comtesse au château de Salisbury. A peine cette dernière fe trouve en liberté, qu'elle remet un paquet cacheté entre les mains de fon amie. C'eft, dit-elle, la comteffe de Salisbury qui vous prie de garder un dépôt qu'il étoit permis à la fille de mylord Varuccy de pofféder; ma chere Maly, ne m'en parlez jamais, & fi j'étois affez faible pour vous le redemander, obftinez-vous à me le refufer; votre fermeté inébranlable me prouvera votre attachement ; je n'ai pas la force de détruire ce monument, dirai-je de mon infidélité à mon devoir; hélas ! je ne crois point l'avoir offenfé; qui fçait fe combattre, & remporter la

victoire, du moins en apparence, n'eft-il pas digne de quelque estime ?; ah! fi l'on pénétroit dans le cœur, que peu de vertus réfifteroient à des regards févères !

La fortune le laffa de favoriler le comte de Salisbury; il trouva en Flandres le terme de cette espèce d'afcendant qu'il avoit eu jufqu'à cette époque dans fes entreprises militaires ; Suffolk & lui furent battus, & envoyés prifonniers à la cour de France où on les reçut avec cette confidération que le Français généreux témoigne toujours à fes ennemis défaits.

Cette fâcheufe nouvelle caufa un violent chagrin à la comteffe: elle fentit en ce moment qu'elle étoit liée à Salisbury, & qu'une épouse partage la deftinée de fon époux ; elle éprouva que l'amour-propre excite peut-être des mouvements auffi vifs que ceux de la tendreffe; Maly recevoit fes larmes & elle s'étoit apperçue que la comtesse goûtoit une forte de plaifir à les répandre: il fembloit qu'elle cherchât à autorifer fa douleur, Les yeux d'une femme font quelquefois plus perçants que les nôtres. Maly entrevoyoit dans l'agitation de fon amie, quelque chofe de plus marqué qu'une tristesse occafionnée par des difgraces dont il étoit aifé de prévoir la fin. D'ailleurs elle fe rappelloit quelques-unes des expreffions

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de la comteffe, lorfqu'elle lui avoit remis le dépôt entre les mains; Maly vint à foupçonner que la fille de Varuccy nourrissoit une paffion fecréte qu'elle avoit de la répugnance à s'avouer; ces foupçons fe fortifièrent; cédant enfin à la curiofité, trahiffant la confiance l'amitié l'honneur, voulant peut-être fe rendre utile à fon amie, elle écoute un transport indifcrèt : elle ouvre ce dépôt le premier objet qui s'offre à sa vûe eft le portrait du roi, avec un écrit affez étendu, tracé de la main d'Alix, & qui contenoit ce qu'on pourroit appeller un journal exact où la fille du lord s'étoit rendu un fidèle compte de fes moindres fentiments. Voici à peu près ce que renfermoit cet écrit fingulier » Qu'est-ce que je fens ? quels mouvements : plus forts que tous ceux que j'ai éprouvés jufqu'à

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ce jour, entraînent mon ame? feroit-ce là ce qu'on » nomme de l'amour ? & qui auroit excité en moi » cette impreffion dont tout m'ordonne de triompher? perfonne ne m'entend-il, ne me voit-il ? » ah ! je rougis, je crains moi-même de m'interro

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de lire dans mon cœur! quoi! j'aurois conçu une paffion infenfée pour l'objet de nos hommages refpectueux! j'aimercis un monarque, notre maître, Edouard ! quel aveu vient de m'échap

» per ! feroit-il bien vrai ? oui, j'aime ; j'aime le

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plus grand des rois, le plus aimable des hom» mes; Edouard eft le héros d'Alix; ah ! il n'eft que > trop mon fouverain ! & qui règneroit sur mon >ame avec plus d'empire? quel plaifir je reffens à me

faire raconter toutes ces belles actions qui annon> cent à l'Angleterre la plus brillante époque de la > monarchie ! Mais pourquoi dépofé-je mes plus - secrétes pensées sur ce papier, le seul confident, » le feul ami qui reçoive l'épanchement de mon > cœur? eft-ce pour fixer fous mes yeux un fujet éter» nel de reproches, un monument de ma faiblesse, » de mon repentir? Ne nous abufons point; ayons

le courage d'aller chercher en nous la vérité; cette image de moi-même, que je me préfente, ces dé→ tails d'un fentiment que j'approfondis, où je me plais tant à m'arrêter : c'eft pour flatter, pour en» tretenir un penchant chimérique, condamnable, à

mes propres regards. Infenfée que je fuis tout » me ramène à ce portrait fi précieux pour ma folle > erreur. Oui, cher Edouard, oui, prince digne de toute notre admiration, j'aime à revoir fans ceffe » ces traits exprimés bien plus vivement encore dans

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» mon ame; je vous contemple, je vous parle, je » vous répéte que je vous offre avec transport l'hom »mage d'une tendreffe qui n'éclatera jamais ; je ne vi» vrai que pour vous aimer, pour vous adorer en fecret; je me dirai à moi-même que mon cœur vous eft » confacré ; & cet aveu ne fuffira-t-il pas à mon bonheur? tout le monde ignorera l'objet de mon attachement; je me contenterai de connaître, de fentir > l'amour ; n'est-ce rien que le plaifir d'aimer ? Mais qu'eft-ce que j'écris ! voilà bien un tableau fidèle » du bouleversement total de ma raison ! sçais-je ce » que je veux, ce que je fouhaite ? ce papier ne fert » qu'à me couvrir de honte; c'est une glace fidèle » où je me contemple avec humiliation.

Alix s'étoit arrêtée à cet endroit, & enfuite elle reprenoit le cours de cet examen d'elle-même. Maly n'eut pas besoin d'en lire davantage pour être éclairée sur la fituation de la comteffe de Salisbury; loin de fe reprocher fon indifcrétion, elle crut devoir s'applaudir; elle espéra d'amener la comteffe au point de lui réveler fon fecret, & alors elle fe flattoit que fes confeils falutaires rendroient à fon amie un repos qu'elle ne pouvoit acquérir par fes propres réflexions,

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