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moins à fe prevaloir de cette affection [ pour violer la foy qu'il devoit à Domitien mefme, ] & pour s'elever à l'Empire. Il me rita [ par cette modeftie ] d'y eftre elevé d'une manière plus le V. Nerva gitime & plus feure Car fur' la fin de l'an 97, & peut-eftre le 28 d'octobre, Nerva qui avoit fuccedé à Domitien, l'adopta pu bliquement, luy donna la qualité de Cefar, avec les noms de Nerva & de Germanicus,& peu aprésil y ajouta le titre d'Empereur,' avec la puiffance du Tribunat, fans confiderer autre chofe en luy que fon merite. ]

note 3.

1,

'Ainfi, s'il en faut croire les hiftoriens, jamais homme n'eut p.7/Vict.epit. plus que luy tout ce qui peut contribuer à faire un grand Prin ce.[Et comme nous fommes obligez de raporter ce qu'ils en difent, ce nous fera une occafion de donner par avance une idée generale de la maniere dont il fe conduifit eftant Empe

L

reur. J'Lorfqu'il fut elevé à cette dignité, il eftoit dans la vi- Plin.p.8/Dio, V. la note 3.gueur de fon âge, "ayant quelque 42 (ou 45 Jans, exemt de la 1.68.p.772.a. precipitation de la jeuneffe, & de la foibleffe des vieillars. 'Son Plin.pane.p.8, corps eftoit grand & robufte,fon vifage bienfait & majeftueux; 39/Dio,p.785. & fes cheveux mefmes qui blanchiffoient avant le temps, contribuoient à luy attirer du refpect.

'Il n'avoit pas d'étude, & peu ou point d'eloquence; mais il Dio,p.772.cl avoit, difent les auteurs, tout ce que l'étude & les lettres peu- cæl.p.38. Vict.epit Juli. vent donner. Il favorifoit auffi beaucoup les hommes de let Plin.pane.p tres, & les profeffeurs des fciences, baimant ceux qui excel. 84. Vict.epit. loient dans la connoiffance de quelque chofe. Il avoit mefme Juli.caf.p. du refpect pour les philosophes.

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140.

e Plin.pane.p.

[Chacun fçait qu'il a esté un tres grand homme de guerre. ] 'Il dormoit peu, deftoit vigilant, infatigable, marchoit à pié à Plin.pane.p. la tefte de fes troupes, mefme eftant Empereur: & traversoit 92. dp.92|Sid.car. en cet état de grands pays avec les armées, fans fe fervir de 7.V.115. Dio,l. chariot ni de cheval .Il paffoit de mefme les rivieres à pié tou 68.p.781.d. tes les fois que les foldats ne les pouvoient paffer autrement. 27.28. Il les accoutumoit à fupporter la faim & la foif,en la fouffrant Dio,l. 68.p. i 781.d. comme eux. Il fe contentoit de lard, de fromage, & des autres g Plin.pa ne.p. chofes qu'on a accoutumé de leur donner. Il faifoit avec eux 24. tous les exercices militaires, & fe mefloit dans les combats Spart.v.Adr. qu'ils faifoient pour cela, fans fouffrir qu'ils l'epargnaffent plus plin.pane.p. qu'un autre. Il les confoloit & les fecouroit quand ils eftoient 24.25. malades, ne rentroit dans fa tente qu'aprés avoir vifité celles des autres, & ne fe repofoit jamais que le dernier. ...Une inscription de l'an 100, montre qu'il l'avoit avant le 29 de decembre 97,

p.5.c.

kp.25.

P.30.

Dio,l.68.p. 772.d.

Eutrop.

'Il connoiffoit tous les vieux foldats, les appelloit par leur nom, favoit toutes leurs belles actions, ne manquoit point de les en loüer [ & de les en recompenfer.]Mais il favoit en mesme temps fi bien les maintenir dans la difcipline, qu'on ne les vit jamais devenir infolens, & s'elever audeffus de leur état, comme cela eft ordinaire fous les Princes qui aiment la guerre.

'Il fe rendit encore plus admirable par fa bonté & fa modération dans la paix, que par fon courage & fa valeur dans la Dio,l.68.p.771. guerre. 'Car il eftoit porté naturellement à la douceur, & nulle772/val.p.710 ment fujet à colere. Il eftoit tres patient, & en mefme temps Dio.p.771.d franc, fimple, & ouvert, trouvant bon qu'on fçeuft ce qu'il vous val.p.710/Plin. loit ou ne vouloit pas; fans deguifement, fans défiance, fans, b Dio,1.68.p. envie; grand, genereux, & magnifique, qui aimoit mieux eftre aimé, que craint & refpecté des peuples.

Aur.Vict.

pane.p.104.

772.d.

a/val.p.710 Vict.epit.

Plin. pane.p.

84. p.132.

p. 78.79.

P.78,80.

p.130.

F.83.

p.710.

d Plin-pane.

83.

b

gran

'Il aimoit, honoroit, & elevoit tous ceux qui avoient de
des qualitez, foit pour la paix, foit pour la guerre, fans en hair
& en craindre aucun. 'Il favorifoit comme nous avons dit, les
hommes de lettres, & les philofophes. Il recompenfoit toutes
les perfonnes de merite, & donnoit de nouvelles charges à ceux
qui s'eftoient bien acquitez des premieres. 'Au lieu d'abatre &
d'étoufer les efprits ardens & elevez, comme avoit fait Dumi-
tien, il leur donnoit un nouveau feu par le plaifir qu'il témoi-
gnoit prendre à les produire, & par les emplois honorables
qu'il leur donnoit. 'Ceux qui avoient le plus de conftance & de
generofité, & le plus de haine pour la fervitude, eftoient ceux
qu'il aimoit & qu'il avançoit le plus [Quoique fa maison ne fust
devenue illuftre que depuis fon pere, il aimoit dans les autres
la nobleffe qu'il n'avoit pas: il recherchoit ceux qui restoient
des anciennes familles de la Republique, il les produifoit, les
elevoit, leur donnoit des charges mefmes avant l'âge porté
par les loix.

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Pour les méchans, il fe contentoit de les mettre hors d'état p. 83|Dio,val. de fe faire craindre. 'Il les "laiffoit, & ne les avançoit pas: mais nen il ne vouloit pas employer la terreur & la feverité contre eux aimant mieux attendre qu'ils fe corrigeaffent d'eux mesmes,& ne voulant point remedier aux maux que quand tout le monde le fouhaitoit. [C'estoit estre trop bon que de l'eftre mefme aux méchans, comine on le reprochoit à un Roy de Lacedemone.] Mais on luy perfuadoit que c'eftoit le moyen d'établir le 1.8.ep.14.p.478 calme & la paix : [ & il eftoit bien aife que ]' fon regne paffast Tac.v.Agr.c. pour un temps de liberté, 'où tout le monde "pouvoit faire ce facilitatem 3.p.140. qu'il vouloit.

&c.

ARTICLE III.

Trajan fans fafte; ennemi des flateurs; appliqué aux affaires, &
à faire du bien à tout le monde.

L

A bonté de ce Prince paroiffoit auffi-bien dans les petites

chofes que dans les grandes.] 'Il recevoit toutes fortes de plin.pane.p. perfonnes avec beaucoup de civilité, alloit audevant de ceux 133. qui le venoient faluer, les baifoit & les embraffoit, au lieu que les autres Princes leur donnoient à peine leur main à baifer fans fe lever de leur fiege. Mais il favoit mieux qu'eux qu'un fouverain n'a point à craindre de s'avilir, & qu'il ne peut s'elever qu'en fe rabaiffant par bonté. Auffi plus Trajan rendoit d'honneur aux autres, plus il leur paroiffoit grand & auguste.

[Il eftoit de mefme dans tout le refte.] 'Sa fuite eftoit modefte p.140. & mediocre. Il n'envoyoit point devant luy faire retirer le monde pour luy faire place, & il vouloit bien eftre quelquefois. obligé de s'arrefter dans les rues pour laiffer paffer les trains des autres. 'Sa table eftoit frugale pour un Empereur: mais il 1.6.ep.31.p.398 fe faifoit une joie d'y avoir compagnie; fon humeur gaie, & fon a pane.p.90entretien civil "en eftoient le principal agrément. Il paffoit 1.6.ep.31.p. quelquefois le refte de la nuit à s'entretenir avec ceux qui 398. avoient foupé avec luy, à qui enfuite il envoyoit des prefens.

92.

624.

pane.p.106

'Il n'aimoit point ce grand nombre de statues que la flatterie pane.p.98. elevoit alors aux Empereurs, '& il n'accordoit que rarement 1.10.ep.10.p. la permiffion de luy en dreffer. Pline dans fon panegyrique 572. b pane.p.98. 'femble dire qu'il n'y en avoit alors qu'une ou deux à Rome: & elles n'eftoient que de bronze. 'Il fe moquoit des vains ref- 1.10.ep.88.p.' pects qu'on leur vouloit rendre, fur lefquels on faifoit fouvent ›› des crimes de leze majesté fous les autres regnes. 'Il favoit, dit » Pline, quel eft le veritable honneur d'un Prince;que des statuës » & des arcs de triomphes font fujets à perir par les flammes, par » le temps, par la fantaifie d'un fucceffeur: mais que celui qui » meprise l'ambition, qui modere fes paffions, qui donne des bor»›nes à une puiffance qui n'en a point, eft loüé de tout le monde » durant fa vie, & encore plus aprés fa mort lorfque perfonne » n'est contraint de le louer. Il ne faut pas, ajoute le mefme au»teur, qu'un Empereur fonge à eftre comu de la pofterité: il le » fera toujours affez, quand mefme il ne le voudroit pas: 'mais à p.ro7.

1. fait l'an 100, au commencement de feptembre.

1.6.ep.27.p.389)
pane.p.104.
☐ pane.p.7.

P.6.

p.8.99

P-45-146,149

P.144

s'en faire eftimer. Et c'eft ce qu'il peut acquerir par lavertu &
par le merite, & non par des ftatues & des baftimens.

'Il n'aimoit point non plus qu'on luy decernat de nouveaux
honneurs qui fentiffent la flaterie:& ne vouloit pas mefme que
ceux à qui il avoit donné des charges, l'en vinffent remercier;
ne fouffrant qu'ils le fiffent dans le Senat, que parcequ'il euft
eu peine à l'empefcher. 'S'il en faut croire fon panegyrifte, il ne
voulut point qu'on luy fift de grands eloges.

L'infolence des autres Empereurs fait qu'on a loüé Trajan d'avoir témoigné quelque refpect pour la divinité, (quoiqu'il la connuft fi peu,] & de n'avoir pas voulu qu'on rendift des actions de graces à fon genie, mais à cette nature fuperieure, de qui il vouloit qu'on tinft tout le bien qu'il faifoit aux autres.

Quand il eftoit obligé d'interrompre les affaires de l'Etat pour se delaffer un peu, il ne s'amufoit pas, comme les autres Princes, à jo üer, moins encore à chercher une funefte joie dans des crimes: mais changeant feulement de travail, il s'en alloit à la chaffe dans les bois & dans les montagnes, fans se faire aider de perfonne; ou fe mettant fur un vaiffeau, il le conduifoit luy mefme comme un pilote, ou fe mettoit à ramer; & ces exercices par lefquels il fe fortifioit le corps, le rendoient propre pour les fatigues de la guerre.

Son occupation ferieufe & ordinaire eftoit de fatisfaire les defirs des peuples [foit de Rome & de l'Italie,] foit des provin ces, & de pourvoir aux befoins de toutes les villes particulieres. Il donnoit fans peine audience à tous ceux qui avoient des affaires, & les expedioit promtement: Il reconcilioit les villes qui avoient des querelles, il appaifoit les foulevemens des peuples autant par raifon que par autorité: Il s'oppofoit aux injustices des magiftrats, & caffoit ce qu'ils avoient fait contre l'ordre, toujours preft à ecouter & à fecourir ceux qui avoient Dio,l.98.p.77z befoin de luy, & à aller partout où il pouvoit faire du bien,'fans "faire jamais tort à perfonne. Car fa feverité *mefme eftoit un effet de clemence, comme fa douceur n'eftoit ni molle ni lafche. Tvá Eutrop 'II traitoit les moindres perfonnes & à Rome & dans les pro- tis. Plin.pane.p.4. vinces, comme s'il n'euft point efté audeffus des autres, 'fe fouvenant "non feulement qu'il commandoit à des hommes, mais &c. Entrop encore qu'il eftoit homme. 'Il eftoit liberal à tout le monde ; combloit de richeffes & d'honneurs ceux mefines qu'il ne connoiffoit que mediocrement, 'ou les confoloit en leur promet. tant pour l'avenir ce qu'il ne leur pouvoit pas donner encore.

2.

¿Plin.pane.p.

344

Plin.pane.p

129-130%

τινά

* quam mi

'Il accordoit beaucoup d'immunitez aux villes; & quand elles Eutrop. avoient besoin d'eftre foulagées, il le faifoit avec une genereufe Vict.epit. liberalité.

'Il traitoit tout le peuple avec beaucoup de bonté, le Senat Dio,1.68.p. ☛1⁄2μÿжрñ@ƒ,"avec gravité & avec refpect: en un mot il travailloit à eftre 772.b. aimé de tout le monde, & à n'estre craint que des ennemis de

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bc.

l'Etat. 'Il réuffit en cela: car tout le monde l'aimoit; [& per- b.
fonne ne le haiffoit, parceque perfonne ne le craignoit.] 'Il ne Plin.pane.p.
fe défioit point de ceux qui eftoient les plus illuftres [& les 130.
plus puiffans,] parcequ'il ne leur donnoit point fujet de le
craindre.

'Ses amis le blafmant un jour de ce qu'il eftoit "trop civil & Eutrop.
trop bon à tout le monde; il leur répondit: Je veux eftre tel
que je voudrois qu'un autre Empereur fuft à mon égard fi j'el
tois particulier. Auffi cette conduite maintint toutes chofes
dans une fi grande paix & une fi grande tranquillité, qu'il n'y
eut qu'un feul Senateur condanné [à mort] durant tout fon
regne, & encore fans qu'il le fçeuft. Car jamais il ne fit tort à
aucune perfonne de ce corps. Julien l'apoftat avoue qu'il a ex- Juli.cæf.p.40.
cellé fur tous les Princes pour la douceur & la bonté. Cepen-
Plin pane.p.8.
dant cette bonté ne diminuoit rien de fa majefté, & du refpect
qu'on luy devoit : '& il ne fe relevoit jamais mieux audeffus des P.4.
grands, que lorfqu'il s'egaloit aux plus petits.

772.a.b.

'll remplit l'Empire de nouveaux baltimens publics, fit faire Dio,1.68.p. en divers endroits des grands chemins [& des ports,] fit fecher Eutrop. des marais, [& fit beaucoup d'autres ouvrages femblables pour la commodité ou pour l'ornement des provinces.].

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Trajan aime la justice; ne foule point le peuple; n'eleve point fes

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affranchis.

fon amour pour la Dio,l.68.p.

771.d.

RAJAN ne fe relevoit pas moins par
juftice, que par fon courage & par fa bonté. Il ne vou- d Digef.48.x.
loit point qu'on prononçaft contre un abfent en matiere crimi- 19.1.5.p.1828.
nelle, ni que l'on condannaft qui que ce fuft fur des foupçons:

& on cite cette parole d'un de fes refcrits; Il vaut mieux qu'un
criminel demeure impuni, que non pas qu'un innocent foit

» condanné.

'Il eftoit auffi eloigné de prendre le bien des autres, que de Dio,p.771.e,

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