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toient produire que des actions extraordinaires, & des exemples capables d'inftruire les plus grands hommes qui devoient venir aprés lui. Ainfi les Royaumes de Grenade, d'Oran, de Bugie, de Navarre, ou conquis ou confervez, les tumultes appaifez, les Juifs chaffez & bannis de toutes les terres d'Espagne, les Synodes tenus pour le rétabliffement de la difcipline Ecclefiaftique; la réformation de l'Or dre de Saint François, la fondation de l'Univerfité d'Alcala, l'édition de la Bible en plufieurs langues, les manuf crits, tant de l'Ecriture-Sainte, que des plus excellens Auteurs, ramassez & imprimez avec une dépenfe immen fe; des bâtimens publics, dignes de la magnificence d'un grand Roy; les Sçavans attirez de tous côtez dans la Caftille par de groffes pensions; tout cela & bien d'autres chofes encore, font les merveilles du glorieux miniftere de Ximenez.

P'Hift du

Mais le fameux établiffement qu'il Ceci eft fit à Alcala, merite ici une attention tire de toute particuliere. Lorfqu'il n'étoit en cdinal core que Provincial de fon Ordre, il Ximenez, avoit remarqué en faifant fes vifites, folier qu'il y avoit dans les Monafteres des filles un grand nombre de Religieufes

par Mr.

qui n'ayant point d'autre vocation que la néceffité toute pure, & la violence de leurs parens, y vivoient en defefpérées, & tomboient dans tous les def ordres où portent d'ordinaire la continence forcée. Il avoit de plus remarqué, qu'il y avoit dans le monde beaucoup de filles, qui ayant toutes les qualitez neceffaires pour la Religion, ne pouvoient y entrer, parce qu'elles manquoient de moyens pour cela. Afin de remédier à ces deux inconveniens, Ximenez fit bâtir à Alcala deux Monafteres vaftes & magnifiques: il les pourvût de meubles, & généralement de tout ce qui étoit néceffaire. Il leur affigna de gros revenus, & leur donna dequoi fubfifter une année entiere fans y toucher, afin qu'ayant épargné les rentes d'une année, elles fuffent en état de fe mieux acquiter des charges ordinaires de leur fondation & de fournir aux extraordinaires qui pourroient arriver. Le premier étoit destiné pour les filles pauvres, dans lef quelles on verroit des marques extraordinaires de vocation à la vie Religieufe. Il leur étoit expreffément deffendu, non-feulement de rien éxiger, mais même de rien recevoir quand il feroit offert volontairement : Il lui

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donna la Régle de S. François; mais adoucie par des Conftitutions particulieres, & pour protecteur Saint Jean le Pénitent.

Il deftina le fecond Monaftere, qui étoit tout proche du premier, à l'éducation d'un grand nombre de pauvres filles de qualité. La Régle de S. François y étoit fuivie comme dans le premier; mais d'autant plus adoucie, que les filles qui y entroient avoient une liberté toute entiere, ou de s'y faire Religieufes, ou de retourner dans le monde, pour y vivre dans le Mariage d'autant plus chrêtiennement qu'on l'avoit eû en vûë dans leur éducation, la pratique des vertus chrêtiennes, dont l'ufage eft le plus néceffaire dans une famille, n'y étoient pas en moindre recommandation que celles des vertus Religieufes. Quatre Réglemens faits par Ximenez, & qu'il vouloit être inviolables, faifoient la diftinction particuliere de cet établissement.

& que

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Le premier étoit que les Penfionnaires y feroient reçues & élevées gratuitement, fans qu'il fut permis, ni d'éxiger, ni de recevoir aucune penfion.

Le fecond, qu'elles y feroient élevées dans tous les exercices qui étoient alors en ufage parmi les filles de qua

lité qu'on deftinoit pour vivre dans le monde & dans le Mariage, afin que f elles choififfoient ce parti, elles fe trouvaffent toutes formées pour l'état qu'elles auroient embraffé ou que fi elles fe faifoient Religieufes, elles en fuffent plus propres à former les filles dont l'éducation leur feroit confiée.

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Par le troifiéme Réglement, les places vacantes des Profefles ne pouvoient être remplies que des Penfionnaires qui aprés s'être diftinguées par une pieté exemplaire, & avoir été longtemps éprouvées, avoient donné des marques non fufpectes d'une vocation libre & exempte de toutes confidérations humaines; Il étoit encore tresexpreffement deffendu par le même Réglement, de recevoir ni argent ni prefens pour la récéption des Novices & Profeffes.

Le quatrième Réglement ordonnoit expreffément, que le revenu de la premiere année qu'on auroit eu foin d'épargner, & qui donnoit le moyen de faire tous les ans une pareille épargne, & généralement tout ce qui pouvoit être de revenu, les charges acquitées, feroit exactement emploïé, fans pouvoir être diverti à d'autres usages, à doter tous les ans un nombre de ces mêmes

filles qui auroient été élevées dans ce Monaftere, & qui n'auroient pas d'ailleurs dequoi être pourvûës. Pour conferver à jamais la memoire de la Reine Ifabelle fa bienfactrice, Ximenez voulut que ce Monaftere fut appellé, le Monaftere d'Ifabelle. Outre les fommes confidérables qu'il avoit fournies pour la fondation, les bâtimens & les meubles de ce Monaftere, il lui laiffa depuis de grands biens par fon Testa

ment.

Enfin Philippes II. le plus magnifique de tous les Rois d'Efpagne, & qui affectoit fur toutes chofes de paffer pour Auteur des grands deffeins, laiffant à Ximenez la gloire d'être le Fondateur de ce fameux Monaftere, fe contenta depuis de n'en être que le bienfacteur. Comme il étoit perfuadé qu'il ne s'étoit point fait dans toute l'E(pagne d'établiffement plus utile, il ne lui accorda pas feulement quantité de priviléges, mais il y fonda encore cin quante places pour autant de filles des premieres familles de toute l'Efpagne, Ximenez ne l'avoit d'abord fondé que dans la vûë de foulager la pauvre nobleffe des deux Caftilles; Philippes fit davantage, il voulut que la nobleffe de tous les Royaumes en deça des Pyre

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