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Les bergers d'alentour que votre fils anime,
Dans le temple affemblés attendent leur victime;
Dérobez-vous, Seigneur, à leurs perfides mains,
Et craignez que leurs coups...

ABRAHAM à Pharès.

C'eft Dieu feul que je crains;

Sortez : dans ce combat pour un pere fi rude,
Je veux feul d'Ifmael fixer l'incertitude.
Sans rien appréhender ni de moi ni de lui,
Sçachez que c'est mon Dieu qui m'afflige aujour

d'hui.

ISA C.

O Ciel reprends ma vie, ou rends vaine ma crainte.

SCENE VI.

ZAEL, ISMAEL, ABRAHAM, ISA C.

ISMAEL.

ANS vous importuner d'une inutile plainte ;
Je ne viens point ici prêt à diffimuler,

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Vous ravir un fecret que vous voulez céler.
Je prétends encor moins vous cacher un oracle;
Qui met à vos deffeins un légitime obstacle.
Oui, les Dieux que j'adore, à vous perdre obfti-

nés,

Vous préparent le fort que vous me destinez ;

Votre Dieu, je le vois, leur a donné l'exemple;
Cet Autel authorife un crime dans leur temple;
Vous fuivez avec peine un devoir rigoureux :
Ifmael plus fenfible, & non moins généreux,
De leur ordre inhumain autant que vous foupire,
Mais un aveugle égard me force d'y foufcrire.
ABRAHA M.

(

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'Ah Ciel !

ISAC fe jettant entre le pere & le fils.

ZAEL à Ifmaël.

L'ordre eft porté, que tardez-vous ?
ISMAEL à Zaël.

Sortez:

A mon devoir, Zaël, je fçaurai fatisfaire...

(à Abraham.)

Menacé du trépas, que me falloit-il faire ?
Pour vous plaire, à l'Autel devois-je donc courir?
ABRAHAM.

Il falloit craindre Dieu, l'appaiser, & mourir.
Mais non ce n'est point là ce que le Ciel de

mande,

Et pour lui vous

feriez une trop vile offrande.

IS MAEL.

Comment donc expliquer ces mots dont je frémis, Et qu'à votre douleur on a deux fois furpris? Voulez-vous me payer d'une excuse frivole?

ABRAHAM.

Ne te fuffit-il pas, ingrat, de ma parole

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ISAC à Ifmaël.

Mon frere, par ce nom fi cher à mes défirs;
Car je ne parle point ici de mes foupirs,

Et je compte pour rien mes foucis & mes larmes, Des mains de vos faux Dieux faites tomber les armes;

Et ne me forcez pas dans votre défespoir,

A détefter le jour où j'ai pû vous revoir.
Ouvrez les yeux: voyez quelle eft votre victime!
Avez-vous pû, cruel, enfanter un tel crime?
Votre bras contre un pere eft-il bien assuré?
Ne frémiffez-vous point à ce nom fi facré?
Par les droits les plus faints que votre cœur abjure;
N'allez point contre vous foulever la nature,
Et fi pour vous toucher votre fang parle en vain,
Renouvellez plutôt les horreurs de Cain,
Ofez percer un frere, un exemple vous guide;
Mais ne devenez pas le premier parricide.
ABRAHAM.

Quoi, vous vous abbaissez, Isac, à supplier!
C'eft ce perfide fils qui doit s'humilier.
De fes iniquités il comble la mesure:
La foudre va punir l'ingrat & le parjure,
Si de tous fes forfaits dès ce jour expiés,
Il ne vient implorer le pardon à mes pieds.
ISMAEL à Abraham.

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Protégé par mes Dieux, menaces & priéres
Ne m'épouvantent plus, & ne me touchent guères.
Cependant aujourd'hui contre eux je vous défends,
Mais fongez que demain il n'en fera plus tems.

ISAC à Ifmael.

Courons dès ce moment écarter cet orage,

Je ne vous quitte point.

ABRAHAM feul.

Acheve ton ouvrage :

De mes fils & de moi, Ciel, remplis le deftin; Je t'en facrifie un, l'autre eft mon affaffin.

T

SCENE VII.

ELIEZER, ABRAHAM.

ELIEZER.

"EL eft le précipice où le deftin vous mene; Victimes du devoir ou d'une aveugle haine ;. L'un ou l'autre oubliant ce que vous vous devez : Ifmael vous pourfuit, & vous le poursuivez. J'ai dû le pressentir; mais mon ame abusée, A cet affreux foupçon s'eft toujours refusée. Et quel autre en effet auroit pû deviner L'effort où votre Dieu femble vous condamner? C'eft en vain qu'Ifmael à fa rage fe livre, Par les mains de fon pere, il va cesser de vivre. Dieu l'ordonne, il eft vrai ; j'adore en frémiffant, L'oracle qu'Abraham reçoit en gémiffant. Mais que dis-je! à préfent d'un efprit infenfible, Vous m'écoutez, Seigneur, & paroiffez paifible. Hé quoi! dans votre cœur la fombre inimitié, Auroit-elle étouffé l'amour & la pitié?

!

Sans doute un autre fils du premier vous confole

Cet Ifac...

ABRAHA M.

Et c'eft lui que l'on veut que j'immole !...
Ah! qu'ai-je dit? cruel, tes détours m'ont trompé
Le mot,
le mot fatal enfin m'eft échappé.
Tu confultois mes yeux, & ta perfide adreffe,
En me fondant le cœur, a furpris ma tendresse.
Je te pardonne, hélas, pourvû que dans l'oubli
Mon fecret pour toûjours demeure enfeveli.

ELIEZER.

Il eft donc vrai, Seigneur, qu'une main paternelle
Doit dans le fang d'un fils devenir criminelle :
C'est pour mourir qu'Ifac eft venu dans ce lieu;
Vous l'avouez! ô Ciel, qui vous l'ordonne?

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Penfez-vous que le Ciel l'authorise
A B RA H АМ.

Il parle : j'obéis.

ELIEZER.

Quoi, fans vous émouvoir

Vous fuivrez les leçons d'un auftère devoir ?

ABRAHA M.

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