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En résumé, Messieurs, on pourrait reprocher au mémoire qui vous est présenté : 1° que la très-grande ancienneté qu'il attribue à l'existence de l'homme préhistorique dans les plaines du camp de Châlons, repose peut-être un peu trop sur un enthousiasme d'archéologue; 2° Que la statistique du mouvement de la population, dans les deux Mourmelon et dans quelques localités environnant le camp, ne s'applique pas à une période de temps assez longue, ni à une étendue de territoire assez considérable pour pouvoir servir de base à cette question délicate; 3° Que les opinions de l'auteur en agriculture sont au moins très-contestables.

Toutefois, votre commission a reconnu que c'était un travail sérieux et qui a dû demander à son auteur beaucoup de recherches: ses déductions archéologiques par des moyens anatomiques et chimiques, et son catalogue des plantes que produit la contrée, ont aussi paru à votre commission présenter un véritable intérêt.

En conséquence, elle vous propose d'accorder à l'auteur de ce mémoire une médaille d'argent (1).

(1) L'auteur est M. Husson, pharmacien à Toul. (V. au Compte-rendu, page 42.)

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Le 7 novembre 1869, votre commission des BeauxArts s'est réunie dans la salie du musée de la ville de Châlons, dans le but d'examiner et d'apprécier les deux derniers ouvrages dus au talent de notre compatriote M. Gustave Navlet, de décider si ces travaux étaient dignes d'une récompense et d'un nouvel encouragement de la part de la Société d'Agriculture, Commerce, Sciences et Arts du département de la Marne.

L'une de ces œuvres représente Jacques Callot, le célèbre graveur lorrain, dans une des circonstances de sa vie. qui fait encore plus d'honneur à son patriotisme qu'à son talent.

En 1631, Louis XIII assiégea Nancy et s'en empara. Il fit proposer à Callot de retracer avec son burin les différents épisodes de cet évènement, comme il avait fait précédemment pour le siége de l'île de Rhé et celui de la Rochelle. Callot refusa, et comme certains courtisans

parlaient de l'y faire contraindre : « Je me couperais plutôt le pouce, s'écria le généreux artiste, que de commettre une action contraire à l'honneur et à ma patrie. >> L'œuvre de M. Gustave Navlet, qui rappelle cet intéressant épisode, est remarquable à plus d'un titre.

M. Navlet a présenté Callot debout, la tête rejetée en arrière par un mouvement énergique et fier, que suit presque tout le corps. Le bras droit est porté en avant, la main fermée, le pouce étendu, tandis que la jambe droite est également en arrière par un mouvement plein de distinction, dans lequel l'artiste a peut-être un peu sacrifié la vérité à l'élégance.

Le bras gauche pend le long du corps. La main qui le termine tient un crayon et un album, et relève un manteau élégamment drapé, attaché à l'épaule gauche et qui vient effleurer le sol. Cette disposition est à la fois ingénieuse et gracieuse, car elle dégage ainsi le côté droit, le côté agissant du sujet, et aide encore à enlever le mouvement d'ensemble.

Et d'abord, nous avons pu vérifier, par un excellent portrait de Callot, gravé d'après Van-Dick, que M. Gustave Navlet a reproduit exactement les traits du célèbre artiste. « On peut voir d'après son portrait gravé par Michel Lasne, dit M. Charles Blanc, dans son remarquable ouvrage intitulé la Vie des Peintres, que Callot avait une physionomie franche, l'œil ouvert, la pommette saillante, ce qui donnait à son masque la vivacité et l'esprit. L'au teur de tant de bouffonneries était d'ailleurs un gentilhomme rangé, qui portait avec dignité la collerette, l'épée et le pourpoint. >>

En effet, le peintre de tant de gueux dépenaillés et sordides était gentilhomme, fils de Jean Callot, hérault d'armes de Lorraine et de Barrois, et de Renée Brune

hault, fille de Jacques Brunehault, médecin de Christine de Danemarck, duchesse douairière de Lorraine. Claude Callot, son aïeul, était exempt des gardes du corps du duc de Lorraine, qui l'avait anobli en considération de ses services militaires, et l'épouse de ce dernier, Claude Fricourt, était parente, par sa mère, de la pucelle d'Orléans.

Bien que ces détails, messieurs, ne se rattachent que par un lien peu visible à l'œuvre de M. Navlet, nous n'avons point voulu les omettre, car ils viennent affirmer ici le talent d'observation de notre compatriote. En effet M. Navlet a bien reproduit dans l'aspect général du corps, et dans l'exacte et gracieuse simplicité des vêtements, l'artiste gentilhomme qui sut sans doute aussi bien manier l'épée que le burin.

La tête du Callot de M. Navlet semble d'abord trop petite; mais elle est exactement en proportion avec le corps car elle est contenue sept fois et demie dans sa hauteur totale. Les formes de la statue sont fines et soignées, les vêtements bien posés sur le corps. Le pied est élégant et distingué; la jambe nerveuse laisse deviner le muscle sous les plis légers et moirés d'un bas de soie.

La main fermée, qui termine le bras étendu, n'est pas trop carrée. M. Navlet a su la rendre moins massive en relevant légèrement l'index, qui, bien qu'également replié, se sépare des autres doigts. Tous les détails de l'œuvre de M. Navlet sont étudiés, les accessoires bien choisis.

Mais si jusqu'à présent nous avons loué sans réserve, nous devons nous livrer à quelques critiques que nous croyons fondées.

Tout d'abord l'attitude du Jacques Callot de M. Navlet semble exagérée; elle est en effet de nature à égarer

l'impression du spectateur au premier examen. Ce bras qui s'étend affirme-t-il un commandement ou une protestation? Ce visage énergique semble-t-il dicter un ordre ou imposer une volonté? Nous dirons pourtant, à la décharge de l'artiste, que la gamme des mouvements humains ne lui a peut-être point permis de singulariser davantage l'attitude caractéristique spéciale à l'épisode qu'il a voulu représenter.

Nous ajouterons que le corps ramené en arrière nous semble un peu en dehors des lois de l'équilibre, car la perpendiculaire, passant par le centre de gravité, semble tomber en dehors des points d'appui. Enfin, le bras droit paraît engorgé et distendre péniblement la manche à crevés qui le contient.

Quoi qu'il en soit, cet ouvrage de M. Gustave Navlet est remarquable, et renferme un véritable sentiment de grandeur qui frappe l'observateur le moins exercé, et rend un nouvel hommage au goût et au talent d'invention et d'exécution de notre compatriote.

La seconde œuvre de M. Gustave Navlet, dont nous avons à vous entretenir, représente Valentin Duval, le pâtre champenois, qui, comme Lantara et Sixte-Quint, devait s'élever de l'humble condition de gardeur de troupeaux à une remarquable destinée, et rester, dans les annales de la science un de ces hommes qui honorent l'humanité, car ce fut à sa haute intelligence qu'il dut l'énorme distance intellectuelle et sociale qui sépara sa tombe de son berceau.

Valentin Duval, né de parents obscurs, s'enfuit tout enfant de la maison paternelle. Errant, malade, mourant de faim, il fut (ici on croirait presque lire une légende) recueilli par un bon ermite qui lui donna les premiers livres. Doué d'un désir infatigable d'apprendre, il étudia

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