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Pardonnez-moi, Messieurs, cette courte digression qui a pour but de faire ressortir l'importance du sujet dont je vais avoir l'honneur de vous entretenir, en traduisant le plus fidèlement qu'il me sera possible, les impressions de votre commission.

Le mémoire n° 1 porte cette épigraphe: Ce n'est pas en vue de l'École, mais en vue de la vie qu'il faut élever les enfants. ( Sénèque).

L'auteur commence par citer de nombreux exemples de l'intérêt que les peuples de l'antiquité attachaient à l'éducation des enfants.

L'historien Xénophon, dit-il, nous transporte chez les anciens Perses et nous fait connaître leur caractère, leurs mœurs et le secret de leur puissance.

C'est à l'éducation mâle et virile de la jeunesse qu'ils ont dù leur prépondérance sur les autres peuples de l'Asie. L'auteur, qui paraît se complaire dans l'étude de l'antiquité, cite tour à tour les grands hommes de la Grèce et de Rome : Agésilas, Lycurgue, Plutarque, Philippe de Macédoine; il note en passant des paroles remarquables de Cicéron, de Sénèque et de Quintillien; le moyen âge lui offre Charlemagne qui, dans un siècle barbare et en dépit de ses préoccupations guerrières, sut donner l'essor à l'enseignement.

Dans cette étude rétrospective, il ne pouvait pas omettre Rabelais, dont la verve satirique et bouffonne a signalé d'étranges abus; le nom de Montaigne sort au courant de sa plume; les pensées de Locke sur l'éducation des enfants, le traité de Fénelon sur l'éducation des filles, sont l'objet d'une mention spéciale.

Enfin l'illustre Rollin, Rousseau le philosophe, l'Italien Pastalozzi, l'Allemand Froebel, complètent cette nomen

clature un peu aride et nous arrivons à l'époque contemporaine.

La méthode d'enseignement universel de Jacotot, qui se proposait d'émanciper l'intelligence, a rendu quelques services, mais elle était entachée d'erreurs et de paradoxes de ce genre: Toutes les intelligences sont égales.— Qui veut, peut. On peut enseigner ce que l'on ignore,

etc.

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Des membres éminents du clergé, Monseigneur Dupanloup, le père Girard, entre autres, ont imité l'exemple de Fénelon, en écrivant sur l'éducation.

Parmi les ouvrages profanes, il ne faut pas oublier le livre de M. Michelet, intitulé: Nos fils, qui a eu un certain retentissement.

On voit quelle immense quantité de matériaux il faudrait rassembler pour faire seulement l'historique de la question. Que l'auteur nous permette de lui rappeler le précepte d'Horace: Sed non erat hic locus, et abordons avec lui le foyer de la famille

La première éducation est faite par la mère qui, tout en prodiguant à la faiblesse de l'enfant les soins qu'elle exige, lui apprend à bégayer le nom de son père et à connaître Dieu.

La plupart des hommes illustres descendaient de femmes d'un esprit élevé. Etait-il nécessaire de citer la mère de Coriolan, puis saințe Monique et Blanche de Castille, de consacrer encore quelques pages à démontrer l'importance du rôle assigné au maître que l'auteur du mémoire associe au Créateur en étayant ses raisonnements de citations latines?

J'aurais préféré moins d'érudition, mais enfin nous

arrivons à diviser l'éducation en physique, intellectuelle et morale.

L'éducation physique laisse à désirer dans notre pays au point de vue hygiénique. Les établissements d'enseignement devraient être à la campagne, loin du bruit des villes. Les promenades au grand air, indépendamment de leur influence salutaire pour la santé, favoriseraient l'étude des sciences naturelles. Dans nos colléges, on ne joue plus assez, la contrainte est trop grande, le silence trop prolongé; il faut y remédier par la gymnastique et tout le monde est d'accord sur ce point. On devrait également donner de bonne heure aux enfants le goût des occupations manuelles; la menuiserie, le tour, l'ébénisterie occuperaient utilement les loisirs des vacances et chasseraient l'ennui, ce mauvais conseiller des jeunes gens. Ecartons surtout de leurs regards les spectacles licencieux et les gravures obscènes, causes trop fréquentes des vices les plus déplorables.

En un mot, réalisons dès le jeune âge cette condition de l'ancien aphorisme: mens sana in corpore sano.

Dans la seconde partie de son travail, l'écrivain examine si l'éducation intellectuelle est en rapport avec les besoins de notre époque et, en comparant les fortes études que l'on faisait il y a deux siècles dans les colléges de l'Université et les Communautés religieuses avec l'enseignement actuel, il se voit forcé de reconnaître qu'il y a entre elles autant de différence qu'il en existe entre les hommes célèbres des époques comparées.

Mais on oublie, ajoute-t-il, que l'éducation intellectuelle ne consiste pas à pourvoir l'esprit de certaines connaissances; c'est aussi une préparation à la vie de l'homme considéré comme citoyen. C'est ainsi que les études étaient autrefois dirigées et l'on sait quelles admirables productions l'esprit humain a enfantées. Quel était donc alors le secret des maîtres? Ils ont imité la nature qui ne

fait rien à la hate, ils ont laissé à toutes les facultés le temps de se développer et de se fondre en une complète harmonie.

Aujourd'hui, l'on veut aller trop vite, aussi le niveau des études a-t-il baissé. On étudie sans goût, non pour orner son esprit et élever son intelligence, mais pour atteindre une position ambitionnée et gagner le plus d'argent possible.

Tel est l'effet du matérialisme qui caractérise notre époque.

L'Angleterre pourrait, sur ce point, nous servir de modèle. Dans les vieux colléges d'Éton, de Saint-Paul, de Windsor et de Westminster, on enseigne en première ligne les belles-lettres par les langues anciennes.

En France, les changements de programmes sont trop fréquents dans l'enseignement secondaire, mais il faut rendre justice à l'enseignement primaire qui a réalisé, depuis quelques années, des progrès importants.

Doit-on maintenir l'exigence du baccalauréat ?

L'auteur ne le pense pas et propose de le remplacer par un certificat d'études décerné par les professeurs euxmêmes, mais les inconvénients de ce système frappent les yeux des personnes les moins compétentes.

Le mémoire insiste sur l'importance et l'utilité de la philosophie, qui nous parle de Dieu et de ses attributs, révèle l'homme à lui-même, analyse ses facultés, l'entretient de sa destinée future et lui apprend, en même temps, tous ses devoirs.

Passant rapidement en revue les diverses parties de l'enseignement, l'écrivain proscrit les grammaires trop compliquées et l'abus des règles qu'il voudrait remplacer par des observations tirées de l'analyse des auteurs. Il vante les charmes des sciences naturelles enseignées sur

les lieux mêmes. L'histoire devrait être réduite aux faits saillants, qui ont exercé une influence décisive sur les destinées des peuples.

Cette partie du mémoire renferme des idées excellentes mais exposées confusément et difficiles à suivre sous un amas de fleurs de rhétorique.

Examinons la dernière partie du sujet :

L'éducation morale est-elle au niveau des besoins de notre époque?

Elle se fait dans la famille, à l'église, au collége, dans la rue, au spectacle, partout. Elle marche de pair avec l'enseignement. En effet, l'étude des langues n'est pas seulement une analyse de mots, mais aussi de pensées, de discours et de récits de grandes actions. Les sciences elles-mêmes ont à ce point de vue une utilité incontestable, en nous fournissant des preuves évidentes de l'harmonie de l'univers et de la puissance de son créateur.

Le régime des colléges laisse à désirer sous le rapport de l'éducation morale. La surveillance est confiée à des jeunes gens qui n'ont aucune autorité sur leurs élèves et ne réussissent qu'à s'en faire détester. Il en résulte que le principe d'autorité s'affaiblit de plus en plus jusqu'à faire craindre de le voir disparaître.

L'auteur résume ainsi ses conclusions:

Prodiguer aux élèves tous les soins qu'exigent la conservation de leur santé et le développement de leurs forces physiques, exercer leur intelligence sans excès de fatigue, leur inspirer l'amour de la vertu et les habituer de bonne heure à réprimer leurs mauvais penchants.

Le mémoire n° 2 s'annonce sous ce titre : Insistez sur l'éducation, c'est-à-dire sur le côté moral de l'enseignement dans toutes les écoles.

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